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Théâtre d'une tuerie dimanche entre bandes rivales d'un même cartel, l'Etat du Michoacan (ouest du Mexique) a pu reprendre l'exportation de ses avocats, désormais cultivés parmi des mines anti-personnelles, a constaté l'AFP lors d'un reportage avec l'armée dans le fief du narco le plus recherché du pays.
Du bout des lèvres, le gouvernement du président Andres Manuel Lopez Obrador a confirmé la tuerie survenue dimanche dans une localité du Michoacan proche de l'Etat du Jalisco voisin, où s'affrontent deux puissants cartels.
Une vidéo amateur anonyme, qui bouleverse un pays pourtant habitué à la violence, est la principale preuve de l'exécution par un peloton d'hommes armés d'une dizaine d'individus préalablement alignés sous un auvent contre un mur, les mains sur la tête.
Il s'agit d'"une possible vengeance entre groupes" du Cartel Jalisco Nouvelle Génération (CJGN), a déclaré le sous-secrétaire à la Sécurité Ricardo Mejía, mardi lors de la conférence de presse quotidienne du chef de l'Etat.
Le CJNG est considérée comme "l'une des cinq organisations criminelles transnationales les plus dangereuses au monde", selon l'Agence américaine de répression des drogue (DEA).
Active jusqu'en Europe et en Asie, le CJNG est "responsable du trafic de plusieurs tonnes de cocaïne, méthamphétamines et fentanyl", ajoutaient les Etats-Unis en 2018, offrant 10 millions de dollars pour la capture de son chef, Nemesio Oseguera "El Mencho".
Dans le détail, l'une des victimes, Alejandro, est arrivée aux funérailles de sa mère dimanche vers 15h30 à San José de Gracia, d'après le responsable sécuritaire qui a confirmé l'authenticité de la vidéo.
Alejandro était accompagné d'une quinzaine d'hommes armés chargés de sa sécurité.
Cinq minutes plus tard, une quarantaine d'hommes armés ont surgi, désarmant leurs rivaux, en les plaçant "en dehors d'une maison, contre un portail".
Alejandro a été abattu alors qu'il négociait au téléphone, ce que montre la vidéo.
Des tirs en rafales se font alors entendre sur l'image qui bouge au moment des détonations. A la fin de l'enregistrement, il n'y a plus personne sous l'auvent.
"Nous ne pouvons confirmer aucun bilan parce qu'il n'y a pas de corps", a ajouté M. Mejia, faisant état de traces de sang au sol.
Les assassins présumés ont eu le temps d'emporter les corps avant l'arrivée des forces de sécurité plusieurs heures plus tard, d'après des médias mexicains.
- Des mines et des drones -
Etat sur la route de la drogue le long du Pacifique, le Michoacan est aussi le premier producteur mondial d'avocats, dont l'exportation vers les Etats-Unis a été brièvement suspendue au mois de février.
La raison: un fonctionnaire américain du ministère de l'Agriculture, qui faisait une inspection de routine pour vérifier les normes d'exportation, a reçu des menaces par téléphone.
Finalement, les exportations vers le grand marché voisin ont repris une semaine plus tard, juste à temps pour préparer le "guacamole" (purée d'avocats) consommé en grande quantité lors de la finale du championnat de la Ligue nationale de football des Etats-Unis (le Super Bowl).
Avec 2,8 milliards de chiffre d'affaires en 2021, l'avocat est un butin de guerre pour le CJNG en plus de son activité dans les drogues et sa grande maîtrise des circuits de blanchiment d'argent.
Maisons criblées de balles, champs abandonnés et, fait nouveau, mines anti-personnelles: tel est le panorama dans la localité d'Aguililla, fief du "Mencho", le chef du CJNG, où l'armée mexicaine patrouille.
Mi-février, un de ses explosifs a tué un homme de 79 ans. Environ 250 mines ont été repérées, ont déclaré à l'AFP des militaires lors d'un exercice anti-explosifs.
Dans le fief de l'homme le plus recherché du Mexique, les 14.000 habitants préfèrent se taire en présence de l'armée. "Pourvu qu'il y ait la paix", lance un homme d'âge moyen, sans donner son nom.
Il y a quelques mois, Aguililla vivait en état de siège. Des habitants racontent même que "El Mencho", 55 ans, s'est promené l'année dernière dans son village.
En début d'année, le CJNG a été accusé d'avoir lâché des explosifs sur le village de Tepalcatepec avec un drone.
Des habitants ont fui les explosions, selon les deux minutes 39 secondes d'images du drone finalement abattu par les habitants qui ont pu récupérer son enregistrement, d'après des médias mexicains.
Des producteurs d'avocats ont constitué des groupes d'auto-défense face aux criminels. Une initiative rejetée par le président Lopez Obrador.
(Y.Berger--BBZ)