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Le chef du principal parti d'opposition tanzanien Freeman Mbowe a été libéré vendredi après-midi, après l'annonce de l'abandon des poursuites pour terrorisme engagées contre lui, qui met fin à son procès qualifié de "politique" par sa formation.
L'arrestation en juillet 2021, puis l'inculpation de cette figure de l'opposition avait jeté le doute sur l'ouverture démocratique espérée, dans le pays comme à l'étranger, avec l'arrivée au pouvoir en mars 2021 de Samia Suluhu Hassan, après le décès de l'autoritaire John Magufuli.
Âgé de 60 ans, Freeman Mbowe était accusé de "financement du terrorisme" et "complot terroriste" avec trois autres membres de son parti Chadema. Ils avaient été arrêtés le 21 juillet à Mwanza (ouest), où ils devaient participer à un rassemblement demandant des réformes constitutionnelles. Leur procès avait débuté le 31 août.
Lors d'une audience vendredi matin, un des procureurs, Robert Kidando, a annoncé que le ministère public n'avait "pas l'intention de poursuivre avec cette affaire".
Le juge Joachim Tiganga a donc ordonné la libération "inconditionnelle" et "immédiate" des quatre accusés.
Le parti Chadema a publié en fin d'après-midi sur Twitter une photo de Freeman Mbowe entouré des trois co-accusés libres, tous vêtus de t-shirts rouge.
- "Immense victoire" -
"Nous savourons notre immense victoire morale et légale", s'était réjoui quelques heures plus tôt auprès de l'AFP l'avocat de Freeman Mbowe, Peter Kibatala.
"La justice a gagné aujourd'hui", a lancé le secrétaire général adjoint de Chadema, Benson Kigaila, devant une foule de partisans réunie devant le siège du parti: "Nous leur avons dit dès le début qu'il n'y avait pas d'affaire et aujourd'hui ils l'ont confirmé."
Selon Chadema, les procureurs accusaient Mbowe d'avoir planifié une attaque contre un fonctionnaire et d'avoir donné 600.000 shillings tanzaniens (220 euros) pour l'organisation d'attentats contre des stations-service et des rassemblements publics, et pour abattre des arbres pour bloquer les routes.
Des accusations "infondées" pour un procès "politique" destiné à faire taire un opposant, n'ont cessé de dénoncer Mbowe, ses avocats et son parti.
Freeman Mbowe a affirmé avoir été torturé en détention et avoir dû enregistrer des déclarations sous la contrainte.
- "Tourner la page" -
Ces arrestations et ce procès avaient suscité l'indignation d'organisations de défense des droits civiques, ainsi que de plusieurs pays occidentaux. Des représentants d'ambassades ont régulièrement assisté aux audiences.
L'ambassadeur américain Donald Wright a salué sur Twitter la fin des poursuites comme "une occasion bienvenue pour la Tanzanie de tourner la page et de se concentrer sur l'avenir".
Pour Chadema, ce procès reflétait un retour en arrière du pouvoir vers la "dictature".
La formation accusait la présidente Hassan de renouer avec les pratiques autoritaires de son prédécesseur, après avoir affiché sa volonté de rompre avec certaines de ses politiques.
Peu après sa prise de fonctions, elle avait en effet tendu la main à l'opposition et autorisé la réouverture de médias interdits sous Magufuli, faisant le voeu de défendre la démocratie et les libertés fondamentales.
Dans une interview à la BBC en août, elle avait assuré que les accusations contre Freeman Mbowe n'étaient "pas politiques" et résultaient d'une enquête de près d'un an.
La cheffe de l'Etat tanzanien avait renouvelé le mois dernier les signaux d'ouverture envers l'opposition, levant l'interdiction de quatre journaux imposée sous John Magufuli, dont un propriété de Freeman Mbowe.
Avant le sommet UE-Afrique à Bruxelles, elle avait également rencontré le vice-président de Chadema, Tundu Lissu, candidat du parti à l'élection présidentielle de 2020 qui vit en exil en Belgique depuis une tentative d'assassinat en 2017.
(K.Müller--BBZ)