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Onze jours après l'agression en prison d'Yvan Colonna, une grande manifestation est attendue dimanche à 15h00, à Bastia, entre colère et appel au calme, avec un mot d'ordre: "vérité et justice" pour le militant indépendantiste, toujours entre la vie et la mort.
Présent lors de chaque manifestation depuis l'agression du berger de Cargèse dans la prison d'Arles (Bouches-du-Rhône), où il purgeait une peine de prison à perpétuité pour sa participation à l'assassinat du préfet Erignac en 1998 à Ajaccio, le slogan "Etat français assassin" reste mis en avant par deux des trois syndicats étudiants à l'origine de la manifestation.
Si les deux dernières soirées ont été plutôt calmes dans les rues corses, beaucoup craignent des débordements devant le palais de justice de Bastia. Car la tentation est grande chez certains, notamment les indépendantistes, d'utiliser la force pour tordre le bras du gouvernement.
"On avance plus en sept jours de violence qu'en sept ans de négociations", a noté sur Twitter le parti indépendantiste Core in Fronte. "Il faut constater qu’a priori la violence (...) a permis d’obtenir un certain nombre de choses réclamées depuis des années", pointe Ugo Colombani, conseiller en formation, la trentaine, interrogé par l'AFP.
Une ligne rejetée par les autonomistes.
Vendredi, le Premier ministre Jean Castex a tenté l'apaisement en annonçant la levée du statut de "détenu particulièrement surveillé" (DPS) de Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, deux autres membres du "commando Erignac" encore détenus sur le continent. C'est ce statut qui bloquait le rapprochement des trois hommes dans une prison corse.
Mais ce geste, après la levée du statut de DPS d'Yvan Colonna dès mardi --unanimement reçue comme une provocation en Corse, l'homme étant désormais dans le coma--, n'a pas fait baisser la tension dans l'île de Beauté.
"+L'Etat français assassin+, oui nous le clamons haut et fort", maintient l'association de défense des prisonniers Sulidarità, selon qui "la société corse, révoltée par des années d'humiliation et de mépris, retrouve le sens de ce qui fait un peuple: l'acte de marcher ensemble".
- "Agissez sans violence" -
Pour tenter d'éviter des débordements dimanche après-midi, la Préfecture de Haute-Corse a interdit par arrêté le transport de "pétards, fumigènes, mortiers et feux d'artifices", ainsi que l'utilisation sur la voie publique de "récipients contenant des produits chimiques, inflammables ou explosifs". Une référence notamment à ces bombes agricoles et autres cocktails molotov lancés sur les forces de l'ordre et les bâtiments publics de l'île par certains militants.
La météo pourrait également jouer les trouble-fête, une vigilance jaune pluie-inondation étant annoncée sur toute l'île jusqu'à lundi matin.
Du côté des élus, nombreux ont appelé à l’apaisement.
Près de 60 maires et élus de Haute-Corse ont rappelé, dans une motion remise au préfet de Corse, que "si l'émotion est légitime, elle ne peut et ne doit conduire à la violence".
Marie-Antoinette Maupertuis, présidente de l'Assemblée de Corse, et Jean-Félix Acquaviva, député nationaliste de Haute-Corse, ont eux relayé sur Twitter la lettre de la soeur d'un militant indépendantiste tué en 1987, proche d'Yvan Colonna.
Dans ce message, la jeune femme appelle les manifestants à ne "jamais retomber dans le piège fatal" qui serait de "croire que +le pouvoir est au bout du fusil+, alors que le fusil est entre les mains de l'Etat qui assassine !": "Agissez sans violence, agissez dans la plus grande des dignités", insiste-t-elle.
"C’est le voeu de beaucoup de gens, que la vie reprenne son cours normal, que les choses s'apaisent (...). Surtout pour nos enfants et nos petits-enfants", insiste Patricia Massei, la soixantaine, auxiliaire puéricultrice à Ajaccio.
Dans le même objectif, les cloches de toutes les églises de Corse se feront entendre, à midi, a annoncé l'évêque d'Ajaccio, Mgr François Bustillo: "comme un appel à la paix, l'unité et à la réconciliation".
(K.Lüdke--BBZ)