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Le pape François s'est envolé vendredi vers Marseille pour une visite de deux jours consacrée à la Méditerranée et au défi migratoire, dans un contexte d'hostilité croissante envers les candidats à l'exil au sein d'une Europe tentée par le repli.
La deuxième ville de France s'est pavoisée aux couleurs jaune et blanc du Vatican, notamment sur le Prado, l'artère que remontera le souverain pontife en papamobile samedi, où 100.000 personnes sont attendues. Et le mistral s'est invité, chassant les nuages noirs qui surplombaient encore la ville au lever du jour.
"C'est un personnage sympathique, et ça va réveiller peut-être quelques consciences", estime Denis Olivery, quinquagénaire marseillais juché sur son vélo: "Et puis ça fait du bien à Marseille de voir une autre image, ça change des faits divers et du foot".
L'avion du pape a décollé de l'aéroport de Rome Fiumicino à 14H45 (12H45 GMT). Il doit atterrir à Marseille à 16h15.
Le jésuite argentin de 86 ans a prévenu: il ne vient pas en visite d'Etat en France mais bien à Marseille, où cohabite un large éventail de communautés et religions, pour dénoncer le drame des naufrages de migrants et plaider la cause des exilés. Un thème cher à François qui ne cesse depuis son élection en 2013 de dénoncer les discours de rejet et les politiques de fermeture.
Son séjour intervient d'ailleurs alors qu'une nouvelle vague d'arrivées sur l'île italienne de Lampedusa a poussé l'Union européenne à adopter un plan d'urgence pour aider Rome à gérer les flux migratoires en provenance d'Afrique du Nord.
La route migratoire considérée comme la plus dangereuse au monde: plus de 28.000 disparus en mer depuis 2014, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). "Le plus grand cimetière au monde", déplore régulièrement le pape.
- "L'humanité qui coule" -
Cette visite se fera sous haute protection, avec quelque 6.000 personnels des forces de l'ordre mobilisés, police, gendarmerie, unités mobiles et de protection des personnalités, Raid, unités anti-drone, canines ou maritimes...
Un "dispositif hors norme", supervisé sur place par le ministre de l'Intérieur, soulignait vendredi Christophe Allain, directeur zone sud de la police nationale.
En France, la visite de Jorge Bergoglio a été diversement reçue, certains à droite critiquant une "ingérence" politique. "Il faut espérer qu'on ne retienne pas de ce message la critique qui en est faite, mais que la Méditerranée peut être un point d'union", a estimé l'archevêque de Paris, Laurent Ulrich. "Catholique ça veut dire universel donc ouvert à tous", a-t-il dit vendredi à l'AFP.
"Nous attendons des paroles très fortes, c'est notre humanité qui coule si l'Europe ne fait pas quelque chose", a commenté vendredi matin François Thomas, président de SOS Méditerranée, ONG basée à Marseille et qui affrète un navire de sauvetage en mer des migrants en détresse.
Des élus de gauche ont appelé Emmanuel Macron à écouter le message d'accueil "courageux" du pape, au moment où une nouvelle loi sur l'immigration est en préparation. La France insoumise organise de son côté vendredi soir un rassemblement à Marseille "en solidarité avec les victimes de la barbarie antimigrants". Un "recueillement laïc" auquel participera Jean-Luc Mélenchon, alors que l'opposition de gauche a accusé le président Macron de "piétiner" le principe de laïcité de la loi de 1905 en participant à la grande messe que le pape célébrera samedi au stade Vélodrome.
- "La chance d'une vie" -
Près de 500 ans après la dernière visite papale à Marseille, ce déplacement est le premier d'un pape en France depuis Benoît XVI en 2008. François s'était brièvement rendu en 2014 à Strasbourg, mais c'était au Parlement européen.
Malgré le déclin du catholicisme en France, accéléré par la crise des violences sexuelles dans l'Eglise, la visite suscite un fort engouement, avec quelque 60.000 fidèles attendus à la messe.
"Habemus papam" titre le quotidien régional La Provence, "Je vous salue, migrants" lance Libération à sa Une, tandis que Le Figaro souligne la "visite très politique" du Pape, à Marseille pour clôturer la troisième édition des Rencontres méditerranéennes (18 au 24 septembre), qui rassemble évêques et jeunes du bassin méditerranéen autour des inégalités économiques, du dialogue inter-religieux et du réchauffement climatique.
Joseph Achji, Syrien de 25 ans participant à ces rencontres, a confié à l'AFP être "vraiment excité à l'idée de voir le pape", la "chance d'une vie".
Il s'agit du 44e voyage à l'étranger du pape, qui se déplace désormais en fauteuil roulant et a reconnu début septembre que voyager ne lui était "plus aussi facile qu'au début".
(Y.Yildiz--BBZ)