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Chaises empilées, lit désossé, canapé jeté... Dans cet appartement du 17e arrondissement de Paris, le locataire a dû déménager, laissant derrière lui un nouvel habitant, des punaises de lit, dont l'éradication relève des compétences d'entreprises spécialisées, particulièrement sollicitées ces dernières semaines.
"Je voulais vendre l'appartement, je n'en voulais plus", confie avec dégoût Céline de Gironde, la propriétaire de cet appartement de 50 m², généralement loué pour des durées comprises entre six mois à un an.
Il y a quelques semaines, son locataire l'appelle en pleine nuit: des punaises de lit ont envahi la chambre et le salon.
"Les premiers temps de la contamination, le nombre de punaises est minime. Ici, les lieux étaient contaminés depuis au moins trois ou quatre mois", assure David Bettach, technicien hygiéniste et directeur de la société Parasystem, en enfilant sa combinaison de protection.
En plein jour, dans les recoins de la tête de lit en bois et sur les tables de chevet, gisent encore quelques cadavres de ces nuisibles, devenus ces dernières semaines la hantise des Français.
Du bout des doigts, l'attachée de direction de 59 ans attrape les quelques draps encore entassés dans le placard afin de procéder à la deuxième intervention de la société.
Plinthes, rainures du parquet, encablures de porte et fonds de placards... L'intégralité de la pièce est ensuite aspergée d'un insecticide, qui doit poser entre deux et trois semaines.
- "Un peu sous l'eau" -
Au cours de l'intervention, le portable du professionnel ne cesse de sonner. "En ce moment, on est un peu sous l'eau. Rappelez lundi", conseille-t-il à une potentielle cliente.
"C'est une bulle. D'ici deux ou trois semaines, ça va se calmer", espère-t-il, affirmant recevoir "entre 30 et 50 appels par jour", sans compter les mails. "En ce moment, il faudrait faire du 24H/24."
Interrogée par l'AFP, la Chambre syndicale de la désinfection, désinsectisation et dératisation (CS3D), qui réunit les principaux acteurs de l'hygiène antiparasitaire, note une augmentation de 65% des interventions de désinfection "entre la fin du printemps et cet été" par rapport à la même période en 2022.
Pour Stéphane Bras, porte-parole de la CS3D, les raisons sont multiples.
"On est sorti du Covid, une période au cours de laquelle les gens bougeaient beaucoup moins à travers le monde. Quand vous regardez l'année qui vient de s'écouler, il y a eu beaucoup plus de mouvements que les années précédentes", indique-t-il.
M. Bettach estime quant à lui à 30, voire 50%, l'augmentation du nombre de signalements pour son entreprise. Pourtant, il l'assure, tous ne sont pas des cas avérés.
"Encore aujourd'hui, nous avons reçu une photo d'une jeune fille dont l'appartement avait déjà été contaminé". Cette fois-ci, fausse alerte.
- Appel à la "raison" -
"En tant que professionnels, on appelle aussi à la raison (...) Quand on parle aujourd'hui d'explosion, d'invasion... C'est tout sauf ça", pondère M. Bras.
"Il ne faut pas tout confondre. La punaise de lit est présente en Europe et dans le monde. On a constaté une hausse du phénomène +punaises de lit+ depuis le début des années 2000. Ces dernières années, il y a eu une progression régulière des présences, qui n'a rien d'étonnant au regard des modes de vie actuels".
Le grand retour dernièrement de ces nuisibles a pris des dimensions d'affaire d’État, à quelques mois des Jeux olympiques de Paris. Le gouvernement, qui veut rassurer y compris à l'étranger, assure prendre le problème à bras-le-corps. Une réunion interministérielle se tenait vendredi matin à Matignon sur le sujet.
D'ici quelques semaines, après le passage d'un maître chien pour une ultime vérification, Céline de Gironde pourra de nouveau louer son appartement, non sans crainte.
"La prochaine locataire arrivera le 1er novembre et partira en avril. Mais je ne suis pas sûre de le louer pendant les JO", assure-t-elle. "Je préfère le laisser vide plutôt que de renouveler cette mauvaise expérience".
(B.Hartmann--BBZ)