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La principale opposante au Nicaragua, Cristiana Chamorro, a été condamnée lundi à huit ans de prison: elle pensait vaincre Daniel Ortega lors de l'élection présidentielle de novembre 2021 mais elle a été arrêtée six mois avant et placée en détention à domicile sur ordre de la justice nicaraguayenne.
Reconnue coupable le 12 mars de blanchiment d'argent et détournement de fonds, Mme Chamorro, 68 ans, restera en résidence surveillée, selon le Centre nicaraguayen des droits de l'homme (Cenidh).
Les accusations portées par le gouvernement du président Daniel Ortega l'avait empêchée de participer à la présidentielle de novembre pour laquelle elle était donnée favorite par des sondages.
Selon le tribunal, qui l'a jugée à huis clos pendant sept jours dans l'enceinte de la sinistre prison d'El Chipote, les faits reprochés ont été commis par l'intermédiaire de la Fondation Violeta Barrios de Chamorro (FVBCH), un centre de formation et de défense de la liberté de la presse que Cristiana Chamorro a dirigé pendant vingt ans.
La fondation servait à recevoir de l'argent de l'étranger destiné à déstabiliser le gouvernement de Daniel Ortega et de sa vice-présidente et épouse Rosario Murillo, selon le parquet.
Le frère de Mme Chamorro, Pedro Joaquin Chamorro, également reconnu coupable a été condamné à neuf ans de prison, qu'il devra purger à la prison d'El Chipote où il est détenu depuis son arrestation.
Des peines allant jusqu'à 13 ans de prison ont été infligées à deux anciens employés de la FVBCH, ainsi qu'au chauffeur de Mme Chamorro.
Des "amendes (se montant à) des millions" ont été imposées à l'opposante et à ses trois anciens employés. Elles sont "impossibles à payer" et si celles-ci "sont commuées en peines de prison cela équivaudrait à la détention à perpétuité", relève le Cenidh.
- "Servir les Nicaraguayens" -
Arrêtée le 2 juin 2021, Cristiana Chamorro a rejeté les accusations en assurant que le dossier a été monté contre elle pour avoir tenté de "servir les Nicaraguayens" en se présentant à l'élection présidentielle.
"Quand on prend une position qui met en danger le pouvoir de la dictature, on s'attend à tout, même au pire", avait déclaré fin mai à l'AFP Mme Chamorro.
"Le peuple m'a placé en tête des intentions de vote. C'est pourquoi le dictateur leur a ordonné de m'accuser, c'est une vengeance contre le peuple", avait-elle dit.
Au total sept candidats de l'opposition, ainsi que 39 autres opposants ont été arrêtés dans les mois précédant le scrutin, ce qui a permis au président Daniel Ortega, un ancien guérillero âgé de 76 ans, d'être élu pour un quatrième mandat sans opposant de poids face à lui.
Une trentaine d'opposants ont déjà été déclarés coupables, dont maintenant plus d'une vingtaines ont été condamnés à des peines allant de 8 à 13 années de prison. L'un d'eux, Hugo Torres, un héros de la guérilla sandiniste passé à l'opposition à Daniel Ortega, est mort en détention à l'hôpital en février.
L'élection de M. Ortega n'est pas reconnue par la majeure partie de la communauté internationale, notamment par l'Organisation des Etats américains (OEA), les Etats-Unis et l'Union européenne, au motif que les élections nicaraguayennes n'étaient pas démocratiques.
Cristiana Chamorro est la fille de l'ancienne présidente Violeta Barrios de Chamorro (1990-1997), qui avait battu M. Ortega dans les urnes en 1990.
Son père, le journaliste Pedro Joaquín Chamorro, a été abattu à Managua en janvier 1978 pour s'être opposé à la dictature de Somoza, qui a dirigé le Nicaragua pendant près d'un demi-siècle jusqu'à la victoire du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) en 1979.
(B.Hartmann--BBZ)