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Modèle à "bout de souffle" ou conséquence de l'envolée insoutenable des risques sociaux et climatiques pour les assureurs, les communes peinent de plus en plus à s'assurer, même en montrant patte blanche, alertent les maires réunis en congrès mardi.
"Je n'ai plus d'assurance +incendie et dégradations+ depuis le 1er janvier", confie à l'AFP le maire d'une petite commune francilienne, préférant garder l'anonymat. La faute selon lui à "la loi des séries", après deux incendies d'origine électrique et un d'origine criminelle en trois ans.
"Plus personne ne veut m'assurer ou alors à des conditions délirantes", poursuit l'élu, fort heureusement épargné par les émeutes déclenchées par la mort de Nahel, tué en juin par un policier.
A Arcueil (Val-de-Marne), le maire Christian Métairie a lui dû "se pincer" pour comprendre que la lettre envoyée par son assureur à la fin de l'été n'était "pas une blague".
Alors que la commune, qui verse 50.000 euros de cotisations d'assurance annuelles, lui a adressé une facture de 30.000 euros pour des bris de vitres dus aux émeutes, elle apprend que ce dernier a l'intention de passer sa franchise de 1.500 euros à 2 millions d'euros.
"Si une école brûle et qu'il y a un million d'euros de dégâts, on ne sera plus remboursés", vitupère l'élu EELV.
"L'assureur, c'est quelqu'un qui vous prête un parapluie quand il fait beau et vous le réclame quand il pleut", ironise Laurent Garcia, maire de Laxou (Meurthe-et-Moselle), "choqué" par la résiliation unilatérale, au 1er janvier 2024, de "la totalité des contrats municipaux", même ceux concernant "les VTT de la police municipale", après la vandalisation d'un centre culturel pendant les émeutes.
Selon la fédération France Assureurs, les émeutes ont généré un coût de 730 millions d'euros, dont 200 millions pour les collectivités.
Dans une tribune parue lundi dans le quotidien Le Monde, l'Association des petites villes de France (APVF) alerte sur ce "désengagement", accusant les assureurs de "déserter un marché peu rentable".
- "Au bout d'un système" -
Selon l'association, la multiplication des résiliations unilatérales, "parfaitement légales", ne concerne plus seulement les communes les plus exposées aux risques environnementaux mais aussi celles "dont les taux de sinistralité sont maîtrisés".
Pour trouver un nouvel assureur, Dinan (Côtes-d'Armor) a décidé de retirer de son appel d'offres ses remparts du XIIIe siècle, dont certains pans se sont effondrés récemment... Sans succès.
En Outre-mer, certaines villes se voient même contraintes de n'assurer que certains étages de leurs bâtiments.
"Les assureurs nous ont expliqué qu'ils avaient un nombre de collectivités quasiment équivalent au nombre d'aléas rencontrés, ce qui vient percuter leur modèle", observe Christophe Bouillon, président de l'APVF, pour qui "les collectivités ne sont plus assurables".
"On se retrouve le couteau sous la gorge", dénonce Sylvie Aubert, maire de Fontaine-le-Comte (Vienne). "C'est une prise en otage inadmissible. Si on ne peut plus être couvert, quid de mes aires de jeux, de ma salle des fêtes, de mon école?", interroge l'élue DVG.
Alerté par les associations d'élus, le gouvernement a lancé fin octobre une mission dont les conclusions sont attendues d'ici avril.
Alain Chrétien, maire Horizons de Vesoul et copilote de cette mission, fait remonter à "plusieurs années" cette situation.
"On a une accumulation de tensions sociales depuis la crise des +Gilets jaunes+ et une aggravation des conséquences du réchauffement climatique qui font qu'aujourd'hui le monde de l'assurance est au bout d'un système", analyse-t-il.
Avec la particularité selon lui que le marché des collectivités, évalué à 1,7 milliard d'euros sur un chiffre d'affaires global de 238 milliards, est "très limité", Groupama et la Smacl rassemblant à eux deux "75% des contrats".
"Les risques des collectivités ne sont pas mutualisés avec l'ensemble du monde de l'assurance. Dès qu'il y a un problème dans une collectivité, ça rejaillit sur tout le système", poursuit-il.
Interrogé par l'AFP, Groupama assure qu'il n'a "aucune intention" de se retirer du marché des collectivités.
"Nous procédons à des ajustements au cas par cas, des ajouts de franchises, hausses de tarifs, plus rarement des résiliations. La hausse des sinistres, notamment climatiques, a rendu la situation intenable pour les assureurs", justifie l'assureur.
(K.Lüdke--BBZ)