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L'armée et la police équatoriennes ont repris dimanche le contrôle de plusieurs prisons et libéré plus de 200 fonctionnaires de l'administration pénitentiaire otages de mutins, ramenant le pays à une certaine normalité après une semaine de chaos.
Sur fond de "guerre" ouverte ces derniers jours entre les bandes criminelles liées au trafic de drogue et les forces de sécurité, l'armée a diffusé des images montrant des centaines de détenus alignés mains sur la tête, torse nu ou en sous-vêtements, tenus en joue par des militaires.
Strictement encadrés par les soldats, les prisonniers devaient chanter l'hymne national, en rangs serrés au pied du drapeau équatorien.
Selon le général Pablo Velasco, "le contrôle a été rétabli dans six centres" de détention, et une opération est "en cours" dans une dernière prison de la province méridionale de Cotopaxi.
"(Il n'y a pas eu) d'accord (...), l'intervention militaire a été postérieure à la libération" des otages, a affirmé le général Velasco.
Cette opération à l'échelle nationale a été déclenchée quelques heures après l'annonce de la libération de 136 gardiens et autres fonctionnaires pris en otage par les mutins.
L'administration pénitentiaire (SNAI) avait annoncé que "l'action commune de la police et de l'armée ont permis la libération de tous les otages qui étaient retenus dans différentes prisons du pays".
Mais selon le dernier communiqué dimanche soir, le nouveau bilan de prisonniers libérés s'élève à 201.
Le président Daniel Noboa s'est félicité sur X de "la libération" des otages et dit "continuer à travailler pour rétablir la paix".
Les images diffusées par la police ont montré les gardiens, parmi lesquels de nombreuses femmes, en pleurs, épuisés et soutenus par leurs collègues peu après leur libération.
"Grâce à Dieu, nous nous en sommes tous bien sortis. Nous sommes en bonne santé", ont déclaré dans une autre vidéo sur les réseaux sociaux les otages libérés de Cotopaxi, brandissant un drapeau équatorien.
Depuis une semaine, des otages, couteau sous la gorge ou pistolet sur la tempe, appelaient les autorités à l'aide et à la retenue, dans des vidéos diffusées sur les réseaux. Au moins deux d'entre eux, dont l'un a été pendu, ont été exécutés par les mutins, selon des images atroces.
Le SNAI a rapporté samedi la mort d'un gardien lors d'affrontements avec des détenus dans la province d'El Oro (sud-ouest, frontalier du Pérou), portant le bilan global d'une semaine de terreur à 19 morts, parmi lesquels des civils, des gardiens de prison, des policiers et des prisonniers, selon le dernier bilan officiel.
- Retour à la normale -
Tout au long de ces prises d'otage, l'administration pénitentiaire a donné très peu de détails, les forces de sécurité affrontant les prisonniers mutins dans certains pénitenciers et jouant la négociation dans d'autres.
Une quarantaine de fonctionnaires de l'administration pénitentiaire avaient été libérés samedi, les autorités évoquant une médiation de l'Eglise catholique.
L'annonce de l'évasion le 7 janvier du complexe de Guayaquil (sud-ouest) du redouté chef du gang des Choneros Adolfo Macias, alias "Fito", a provoqué une vague de mutineries avec prises d'otages dans au moins cinq prisons, des attaques contre les forces de l'ordre et d'autres actes ayant visé à semer la terreur.
Le président Daniel Noboa a décrété l'état d'urgence et ordonné à l'armée de neutraliser ces bandes criminelles, désormais considérées comme "terroristes".
Plus de 22.400 militaires ont été déployés, avec des patrouilles terrestres, aériennes et maritimes, tandis qu'un couvre-feu a été imposé.
Après un vent de panique dans tout l'Equateur provoqué par l'attaque en direct mardi des studios d'une chaîne de télévision publique à Guayaquil, épicentre de la violence des narcotrafiquants, la situation est revenue à une relative normalité.
C'est le cas, de jour, à Guayaquil comme à Quito, la capitale, même si les Equatoriens rentrent rapidement se mettre en sécurité chez eux en fin d'après-midi.
Autrefois un havre de paix, l'Equateur est devenu ces dernières années le centre d'expédition de la cocaïne produite chez ses voisins colombien et péruvien.
Les trafiquants de drogue ont peu à peu imposé leur loi dans ce pays, livré à la violence des bandes criminelles. Les prisons équatoriennes, surpeuplées et mises en coupe réglée par les gangs, sont régulièrement le théâtre de massacres entre ces bandes rivales: Choneros (ceux de Chone, une ville de l'ouest de l'Equateur), Tiguerones (Tigres), Lobos (Loups) et autres Aguilas (Aigles).
Daniel Noboa, 36 ans, a été élu en novembre dernier plus jeune président de l'histoire de l'Equateur sur la promesse de rétablir la sécurité.
Son prédécesseur, le conservateur Guillermo Lasso, a été confronté à plusieurs accès de violence dans les prisons et a décrété l'état d'urgence plus d'une fois, sans parvenir à reprendre le contrôle de la situation et plus généralement à endiguer le trafic de drogue, lié à la corruption, qui gangrène le pays.
(H.Schneide--BBZ)