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Le Parlement suédois vote mardi sur un accord de défense controversé avec les Etats-Unis, ses opposants craignant qu'il n'ouvre la voie à un déploiement d'armes nucléaires et à des bases américaines permanentes en Suède.
L'accord de coopération de défense (DCA) est une évolution majeure de la politique de défense de la Suède qui a renoncé en mars à deux siècles de non-alignement militaire en rejoignant l'Otan.
L'accord signé par Stockholm et Washington en décembre permet aux forces américaines d'accéder à 17 bases de défense suédoises et de stocker des équipements militaires, des armes et munitions dans le pays.
Pour ses opposants, l'accord devrait stipuler que la présence d'armes nucléaires sera interdite en Suède.
"L'accord ne fixe aucune limite", critique Daniel Helldén, co-dirigeant des Verts qui, comme le Parti de gauche, s'oppose à ce texte.
"Il ouvre la voie à la présence d'armes nucléaires sur le sol suédois (...) Et il est rédigé de manière si vague que le gouvernement pourrait même les autoriser en temps de paix", a-t-il déclaré lundi à la radio publique SR.
Le gouvernement de centre droit du Premier ministre Ulf Kristersson, soutenu par les Démocrates de Suède (SD, extrême droite), assure que l'accord respecte la souveraineté suédoise.
"La Suède est une nation souveraine et ce sera toujours à la Suède de décider quel type d'armes elle autorise" sur son sol, a assuré le ministre de la Défense Pal Jonson à SR.
"Le Parlement a déjà approuvé le fait que nous n'aurons jamais besoin de base permanente ou d'armes nucléaires sur le territoire suédois et cela a été précisé lors de notre adhésion à l'Otan", a-t-il ajouté.
- "Naïf" -
Pour être adopté, l'accord devra être approuvé par au moins trois quarts des parlementaires votant et par plus de la moitié de ces 349 élus. Le vote est prévu après 17H15 (15H15 GMT).
Avec 42 sièges, Les Verts et le Parti de gauche, qui avaient voté contre l'adhésion à l'Otan, ne peuvent bloquer seuls le texte.
Dans une tribune au quotidien Aftonbladet dimanche, deux députés du Parti de gauche jugent l'accord "non seulement naïf mais carrément insensé" et rend la Suède moins sûre car "la politique de défense et de sécurité américaine s'appuie sur les armes nucléaires".
"Le fait que le gouvernement n'ait exigé aucune garantie contre une arme de destruction massive aussi brutale est terrifiant", ont-ils écrit.
La Société suédoise de paix et d'arbitrage, une des principales voix critiques, a souligné que deux gouvernements suédois successifs ont insisté, au cours du processus d'adhésion à l'Otan, pour que la Suède adopte la même position que ses voisins, le Danemark et la Norvège, sur les armes nucléaires.
"Mais contrairement aux accords DCA de la Norvège et du Danemark, l'accord suédois ne contient aucune réserve contre l'introduction ou le stationnement d'armes nucléaires en Suède", a écrit Kerstin Bergea, présidente de l'association, dans une tribune.
La Finlande, qui a adhéré à l'Otan en avril 2023, "a une loi qui interdit les armes nucléaires sur le territoire finlandais et l'accord DCA de la Finlande mentionne cette loi", ajoute-t-elle.
Une telle mention par la Suède "renforcerait la région nordique et contribuerait à une désescalade commune face aux armes nucléaires russes".
- Nucléaire en temps de guerre? -
Le Premier ministre suédois a suscité un débat en mai en ouvrant la voie au positionnement d'armes nucléaires en temps de guerre.
"En temps de guerre, c'est une question complètement différente, cela dépendrait complètement de ce qui se passerait", a-t-il dit à SR.
"C'est une déclaration incroyable, totalement à l'opposé de ce que pensent les Suédois et de ce que la Suède défend depuis longtemps", ont écrit les deux parlementaires de la Gauche.
Mme Bergea estime, elle, qu'il n'est pas certain que la Suède pourra refuser l'accès ou les activités des Etats-Unis sur son territoire, si celles-ci devaient violer la loi ou les intérêts suédois.
"Un accord fondé uniquement sur la confiance n'est pas suffisant pour des questions aussi importantes que celles-ci", a-t-elle déclaré.
Pour le ministre Pal Jonson, "grâce au DCA, la Suède peut bénéficier d'un soutien militaire précoce, rapide et efficace de la part des Etats-Unis en cas de détérioration de la situation en matière de sécurité", a-t-il déclaré dans un communiqué en mai.
(T.Burkhard--BBZ)