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Drapeaux, sifflets et vuvuzelas contre balles en caoutchouc, gaz lacrymogène et canons à eau: la police tentait mardi d'empêcher mardi le rassemblement de centaines de personnes dans la capitale kényane Nairobi, pour la troisième journée d'une mobilisation antigouvernementale menée par la jeunesse.
Des manifestations se tenaient également, sans aucune opposition policière, dans plusieurs autres villes du pays, notamment dans les fiefs de l'opposition de Mombasa (est) et Kisumu (ouest), à Eldoret (ouest), grande ville de la vallée du Rift, région d'origine du président William Ruto, Nyeri (sud-ouest) et Nakuru (centre), selon des médias locaux.
Dans le centre d'affaires (CBD) de Nairobi, les premiers groupes de manifestants, majoritairement des jeunes venus avec drapeaux kényans, sifflets ou vuvuzelas et scandant "Nous sommes pacifiques", ont été d'abord tenus à distance par des tirs de gaz lacrymogène.
La police a ensuite fait usage de balles en caoutchouc, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Pour cette troisième journée d'action, les organisateurs ont appelé à des manifestations à travers le pays et à la grève générale.
Le mouvement baptisé "Occupy Parliament" ("Occuper le parlement") a été lancé sur les réseaux sociaux peu après la présentation au Parlement le 13 juin du budget 2024-2025 prévoyant l'instauration de nouvelles taxes - dont une TVA de 16% sur le pain et une taxe annuelle de 2,5% sur les véhicules particuliers.
Après une première manifestation le 18 juin à Nairobi de quelques centaines de personnes, majoritairement des jeunes de la "Génération Z" (nés après 1997), le gouvernement avait annoncé abandonner la plupart des taxes prévues.
Mais le hashtag #RejectFinanceBill2024 ("Rejet du projet de budget 2024") a cristallisé un plus large mécontentement de la population, frappée par les difficultés économiques depuis plusieurs années, et le 20 juin des cortèges ont défilé dans de nombreuses villes.
- Violences policières -
Les revendications antitaxes ont tourné à la contestation de la politique du président Ruto, qui s'est dit prêt à dialoguer avec jeunesse dimanche.
"Nous avons dépassé le stade des discussions et nous ne pouvons pas être réduits au silence", a répondu dimanche à l'AFP une des organisatrices du mouvement, la journaliste et militante Hanifa Adan.
Largement pacifiques, les deux premières journées de mobilisation ont été marquées par la mort de deux personnes à Nairobi.
Plusieurs dizaines d'autres ont été blessées par la police, qui a également procédé à des centaines d'arrestations.
"Malgré des arrestations massives et des blessés, les manifestations ont continué à prendre de l'ampleur, soulignant le mécontentement généralisé de la population", a souligné lundi dans un communiqué Amnesty International Kenya, mettant en garde contre un risque "d'escalade (qui) pourrait entraîner davantage de morts".
L'ONG Commission kényane des droits de l'homme (KHRC) a accusé les autorités de mener des enlèvements de militants, menés "principalement la nuit (..) par des policiers en civil et dans des voitures banalisées".
La porte-parole de la police kényane, Resila Onyango, n'a pas donné suite aux sollicitations de l'AFP sur ces accusations.
- Retrait total -
Le projet de budget doit être voté au Parlement avant la fin de l'année fiscale le 30 juin.
Les manifestants demandent le retrait intégral du texte, dénonçant le tour de passe-passe du gouvernement qui a annoncé le retrait de certaines mesures fiscales mais envisage de les compenser par d'autres, notamment une hausse de 50% des taxes sur les carburants.
Pour le gouvernement, ces taxes sont nécessaires pour redonner des marges de manœuvre au pays, lourdement endetté.
Le Kenya, pays d'Afrique de l'Est d'environ 52 millions d’habitants, est une locomotive économique de la région.
Mais le pays a enregistré en mai une inflation de 5,1% sur un an, avec une hausse des prix des produits alimentaires et des carburants de respectivement 6,2% et 7,8%, selon la Banque centrale.
(L.Kaufmann--BBZ)