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Des heurts de plus en plus violents entre opposants à la Première ministre bangladaise Sheikh Hasina, forces de l'ordre et partisans du parti au pouvoir ont fait au moins 55 morts dimanche au Bangladesh, selon un nouveau bilan de la police et des hôpitaux.
Parmi les morts figurent au moins 14 policiers, selon le porte-parole de la police, Kamrul Ahsan.
Les camps rivaux se sont affrontés à coups de bâtons et de couteaux, les forces de l'ordre ont tiré à balles réelles.
Le bilan sanglant de dimanche porte à au moins 261 le nombre de personnes tuées depuis le début des manifestations en juillet.
La police a indiqué que des manifestants avaient pris d'assaut un poste de police dans la ville d'Enayetpur, dans le nord-est du pays.
"Les terroristes ont attaqué le poste de police et tué onze policiers", a déclaré Bijoy Basak, inspecteur général adjoint.
Face à ces heurts dans plusieurs villes, en particulier à Dacca, la capitale de vingt millions d'habitants, un ancien chef de l'armée a appelé au retrait des troupes de la rue.
Plus tôt dans la journée, des milliers de Bangladais s'étaient rassemblés sur une place de Dacca pour exiger la démission de Mme Hasina, après plus d'un mois de contestation initialement dirigée contre des quotas d'emploi dans la fonction publique.
Certains ont agité un drapeau bangladais sur un véhicule blindé sous le regard des soldats, selon des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux et vérifiées par l'AFP.
Ils répondaient à l'appel d'une coalition étudiante, Students Against Discrimination, qui avait exhorté la veille à la désobéissance civile.
"Il y a eu des affrontements entre des étudiants et des hommes du parti au pouvoir", a déclaré à l'AFP l'inspecteur de police Al Helal.
Des décès ont été signalés à Dacca et dans les districts de Bogra, Pabna et Rangpur, dans le nord du pays, ainsi qu'à Magura dans l'ouest, à Comilla dans l'est, et à Barisal et Feni dans le sud.
Tout Dacca s'est transformé "en champ de bataille" et une foule de plusieurs milliers de manifestants a mis le feu à des voitures et des motos près d'un hôpital, selon une autre source policière,
L'un des dirigeants étudiants, Asif Mahmud, avait prévenu dimanche ses concitoyens qu'ils devaient être "prêts à se battre". "Préparez vos bâtons de bambou et libérez le Bangladesh", a-t-il écrit sur Facebook.
De son côté, le secrétaire général du parti au pouvoir, la Ligue Awami, Obaidul Quader, avait appelé les Bangladais à se rassembler dimanche dans "tous les quartiers de Dacca" et "dans tous les districts" du pays.
- L'armée, "aux côtés du peuple" -
Ces affrontements comptent parmi les plus meurtriers depuis l'arrivée au pouvoir il y a quinze ans de Mme Hasina. Pour rétablir l'ordre, son gouvernement a notamment coupé l'accès à internet, imposé un couvre-feu et déployé l'armée.
D'anciens officiers militaires ont depuis apporté leur soutien au mouvement de contestation.
"Nous sommes profondément préoccupés (...) et attristés par tous les meurtres, tortures, disparitions et arrestations massives qui ont tourmenté le Bangladesh au cours des trois dernières semaines", a déclaré dimanche à la presse l'ancien chef de l'armée bangladaise, le général Ikbal Karim Bhuiyan.
"Nous demandons au gouvernement en place de retirer immédiatement les forces armées de la rue", a ajouté M. Bhuiyan, dans une déclaration commune avec d'autres anciens officiers supérieurs, en soulignant que les gens n'avaient "plus peur de sacrifier leur vie".
"Ceux qui sont responsables d'avoir poussé les habitants de ce pays dans un état de misère aussi extrême devront être traduits en justice", a-t-il encore estimé.
Samedi, l'actuel chef de l'armée, le général Waker-uz-Zaman, avait lui affirmé que l'armée avait "toujours été aux côtés du peuple et le sera(it) toujours", selon un communiqué.
- "Vivre librement" -
Dans ce pays musulman de 170 millions d'habitants comptant de nombreux diplômés au chômage, les étudiants exigeaient l'abolition d'un système de discrimination positive, accusé de favoriser l'embauche de proches du pouvoir dans l'administration.
Partiellement aboli en 2018, ce système a été restauré en juin par la justice, mettant le feu aux poudres, avant un nouveau retournement fin juillet de la Cour suprême.
La crise sociale s'est muée en crise politique à partir du 16 juillet, quand la répression a fait ses premiers morts, les manifestants réclamant alors la démission de Mme Hasina, 76 ans, au pouvoir depuis 2009.
"Il ne s'agit plus seulement de quotas d'emplois", a déclaré à l'AFP Sakhawat, une jeune manifestante rencontrée à Dacca, où elle réalisait un graff sur un mur qualifiant Mme Hasina de "tueuse".
"Nous voulons que les futures générations puissent vivre librement", a-t-elle expliqué.
Quarante-sept entreprises du secteur textile se sont dites "solidaires", dimanche, du mouvement de contestation.
"Nous ne pouvons pas rester silencieux et regarder des innocents perdre la vie et des revendications qui ne sont pas entendues", ont-elles écrit dans un communiqué commun.
(L.Kaufmann--BBZ)