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Nestlé Waters, qui était visée par deux enquêtes préliminaires pour des forages illégaux et pour tromperie, va payer une amende de 2 millions d'euros après avoir conclu mardi une convention judiciaire d'intérêt public (CJIP) avec le parquet d'Epinal.
L'entreprise qui possède les marques Vittel, Perrier, Contrex, Hépar et San Pellegrino doit s'acquitter de cette amende dans un délai de trois mois, a précisé le procureur d'Epinal Frédéric Nahon dans un communiqué, en annonçant la conclusion de cette CJIP, "la plus importante en matière environnementale signée à ce jour en France".
La filiale du groupe suisse Nestlé s'est également engagée à "la réparation de l'impact écologique par la mise en place d'un ambitieux plan de renaturation et de restauration" de deux cours d'eau, le Petit-Vair et le Vair, et à la restauration de zones humides situées sur le territoire de Vittel et de Contrexéville. Ce plan représente un investissement de 1,1 million d'euros, et doit être mis en oeuvre sous la supervision de l'Office français de la biodiversité pendant deux ans.
La société va en outre indemniser plusieurs associations de défense de l'environnement à hauteur de 516.800 euros au total.
- Réparation de l'impact écologique -
La conclusion de cette CJIP intervient à la suite de deux enquêtes préliminaires.
La première portait sur des forages exploités sans autorisation et la seconde pour tromperie, en raison de l'utilisation de traitements non autorisés - reconnue par Nestlé - pour ses eaux minérales, en l'occurrence le traitement par ultraviolets et des filtres à charbon actif.
Le parquet d'Epinal note que Nestlé Waters a mis fin aux irrégularités constatées et a cessé les traitements de l'eau non autorisés et a "pleinement coopéré" avec les autorités judiciaires et administratives. Il ajoute qu'il n'y a eu aucune conséquence sur la santé publique.
"Compte tenu de ces éléments et de la connexité entre les deux procédures", le procureur d'Epinal explique avoir proposé la conclusion d'une CJIP qui "permet, tout en sanctionnant les non-conformités constatées, de privilégier la régularisation la plus rapide de la situation, la réparation de l'impact écologique et l'indemnisation de plusieurs parties".
Me François Zind, avocat d'Eau88, qui représente plusieurs associations de défense de l'environnement, a salué la conclusion de cette CJIP qui permet une "réponse rapide".
"C'est une étape importante pour nous et c'était la seule solution qu'on avait pour, face à l'urgence climatique, avoir une réponse rapide", a-t-il expliqué à l'AFP.
- "Climat d'impunité" -
"C'est la première fois qu'on est entendus. Alors, on est entendus par le biais d'une CJIP, ce qui n'est pas en soi glorieux, mais ça reconnaît notre travail, ça reconnaît notre cause de protection de l'environnement, des habitants et de la faune et de la flore du coin qu'on est en train d'assécher. Donc, pour nous, c'est une forme de consécration", a aussi réagi auprès de l'AFP Bernard Schmitt, du collectif Eau88. Il a toutefois jugé le montant de l'amende "dérisoire par rapport à l'ampleur de la fraude et de l'anomalie".
Ingrid Kragl, experte de la fraude chez Foodwatch, a elle estimé que l'homologation de cette convention, à laquelle Foodwatch était opposée, constituait "une décision scandaleuse qui envoie un très mauvais message sur le climat d'impunité: Nestlé Waters peut tromper les consommateurs pendant des années dans le monde entier et s'en tirer à bon compte en sortant simplement le chéquier".
Une CJIP permet d'imposer le versement d'une amende et/ou la conduite d'un programme de mise en conformité, ainsi que la réparation d'un préjudice. Mais elle n'a "ni la nature ni les effets d'un jugement de condamnation", et "n'emporte pas déclaration de culpabilité", précise le Code de procédure pénale.
Nestlé Waters fait de son côté valoir que "cette convention souligne qu'aux termes des enquêtes mises en oeuvre, les forages exploités dans le bassin vosgien ont été régularisés en 2019, qu'aucun préjudice à la santé publique n'était à déplorer, et que les traitements réalisés autrefois sur les eaux captées n'avaient en rien altéré la composition minérale des eaux commercialisées".
(U.Gruber--BBZ)