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Au procès de l'assassinat du père Hamel dans l'église de Saint-Étienne-du-Rouvray, qui s'est ouvert lundi à Paris, l'un des accusés a craint qu'on lui fasse porter "un costume trop grand" pour lui, tandis que les victimes et leurs proches ont dit vouloir "comprendre" ce qui a mené à cet attentat.
Les deux jeunes jihadistes qui ont donné la mort au prêtre le 26 juillet 2016, Adel Kermiche et Abdel-Malik Petitjean, avaient été tués par la police à leur sortie de la petite église de la banlieue de Rouen (Seine-Maritime).
Les trois hommes dans le box de la cour d'assises spéciale de Paris, Jean-Philippe Jean Louis, Farid Khelil et Yassine Sebaihia, sont des membres de l'entourage des assaillants.
Ils comparaissent pour "association de malfaiteurs terroriste", soupçonnés d'avoir été au courant de leurs projets, d'avoir partagé leur idéologie ou tenté de rejoindre la Syrie.
Le quatrième accusé, Rachid Kassim, sera jugé en son absence. Ce propagandiste français de l'organisation Etat islamique est probablement mort en Irak en 2017. Il est le seul à être mis en examen pour complicité de l'assassinat du prêtre et la tentative d'assassinat d'un paroissien, accusé d'avoir "sciemment encouragé et facilité le passage à l'acte" des deux jihadistes.
Premier à répondre aux questions de la cour, Farid Khelil, 36 ans aujourd'hui, a assuré avoir "beaucoup de mal" avec les faits qui lui sont reprochés, qu'il "conteste". "Ce costume, il est trop grand pour moi", a-t-il estimé.
Interrogé sur son parcours, il a évoqué sourire aux lèvres ses "nombreuses petites amies", sa consommation de cannabis ("Ça fait 24 ans que je suis en sevrage") ou ses voyages aux Pays-Bas et en Allemagne "pour les maisons-closes".
Cheveux longs attachés en queue de cheval, petites lunettes et pull gris, il a aussi relaté le "manque d'affection" ressenti dans son enfance, après le divorce de ses parents, son éducation "à la française" par une fille de harkis et l'"injustice" ressentie après un licenciement économique en 2015.
S'il s'est un temps rendu à la mosquée pour renouer avec son père, puis a fréquenté son cousin Abdel-Malik Petitjean, qui l'a initié à la prière et lui a montré des vidéos de propagande pour le "sensibiliser" au sort des Syriens, il affirme n'avoir "jamais eu" d'engagement religieux et n'avoir "jamais pratiqué".
En détention provisoire depuis cinq ans, il encourt trente ans de réclusion criminelle.
- "Comprendre" -
Ce premier interrogatoire de personnalité a peut-être apporté quelques éléments de réponse à Guy Coponet, un paroissien grièvement blessé par les jihadistes, qui a souhaité lundi que le procès permette "que ça se termine de bonne façon".
Aujourd'hui âgé de 92 ans, il "veut comprendre (...) comment des jeunes tout juste sortis de l'adolescence en sont arrivés à commettre de telles horreurs", avait expliqué à l'AFP son avocat, Me Méhana Mouhou.
En revanche, les trois religieuses aussi présentes dans l'église ont fait parvenir un certificat médical attestant qu'elles n'étaient pas en état de témoigner.
"On attend que la vérité soit dite sur le manque de moyens qui n'a pu être donné aux forces publiques pour éviter ce massacre sur le corps de mon frère", a déclaré lundi l'une des sœurs du père Jacques Hamel, Roseline.
L'un des assassins, Adel Kermiche, était placé sous bracelet électronique au moment de l'attentat, après un départ avorté vers la Syrie.
La direction du renseignement de la préfecture de police (DRPP) de Paris avait aussi été mise en cause car, selon un article paru en 2018 dans Mediapart, ses enquêteurs avaient eu accès une semaine avant l'assassinat à des messages du jeune homme sur la messagerie cryptée Telegram où il évoquait une attaque dans une église.
Mais sur les cinq agents de ce service cités à témoigner par un avocat des parties civiles, quatre ne sont "pas aptes psychologiquement à être entendus lors du procès", selon des certificats médicaux cités par le président de la cour.
La directrice du renseignement a proposé de venir déposer à leur place, les disant pour certains "brisés psychologiquement" par cette affaire ainsi que par l'attentat survenu en 2019 dans les locaux de la préfecture de police de Paris.
Christian Saint-Palais, avocat de Roseline Hamel, a souligné que "l'excuse offerte" était "très difficile à entendre pour les parties civiles, qui elles aussi ont vécu le drame d'un attentat".
La cour décidera ultérieurement si elle renonce à leur audition.
(B.Hartmann--BBZ)