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Le cinéaste Sean Baker a reçu à 53 ans la Palme d'or samedi pour "Anora", un thriller new-yorkais qui passe des bas-fonds aux villas de luxe des oligarques russes, et laisse augurer d'un renouveau du cinéma indépendant américain.
"Ce film est magnifique, empli d'humanité (...) Il nous a brisé le coeur", a déclaré la présidente du jury et réalisatrice de "Barbie" Greta Gerwig avant de lui remettre le prix.
Sean Baker, dans son discours, a livré un plaidoyer pour les films en salles: "Il faut que le monde se rappelle que voir un film sur son téléphone portable ou la maison ce n'est pas la manière de voir des films". "En salle on partage la tristesse, la peur, le rire", a-t-il insisté.
Film qui n'appuie jamais sur la pédale de frein, "Anora" commence comme un conte de fées, Cendrillon version 2024, qui virerait au drame, avant de basculer vers des séquences franchement comiques.
Anora (Mikey Madison) est escort girl dans un club miteux. Un soir de cuite, Vanya (Mark Eydelshteyn), le fils d'un richissime oligarque russe, pousse la porte de l'établissement. Elle connaît des bribes de russe: sa grand-mère, immigrée aux Etats-Unis, n'a jamais appris l'anglais. On lui confie le client. Elle parvient à lui prendre son numéro. Ils se revoient.
Anora découvre l'argent à ne pas savoir qu'en faire, une vie de fête et d'insouciance. Les parents de Vanya sont restés en Russie pour affaires, confiant au prêtre de l'église orthodoxe du coin le soin de garder un oeil sur lui. Mais lorsque l'histoire entre Anora et Vanya semble devenir sérieuse, les choses déraillent.
Mafieux, virées dans la communauté russophone de Coney Island, courses nocturnes dans New York, homme de main aux faux airs de Robert De Niro, le film de 2h18 rembobine efficacement les classiques du cinéma américain et dépeint l'envers du rêve américain.
Mais surprend en prenant des chemins inattendus, et en promouvant son héroïne, Anora, qui tient bon voire ridiculise ce monde d'hommes corrompus par l'argent. De religieux aux petits bandits en passant par les ultra riches, tout le monde en prend pour son grade.
Après "Tangerine" et The Florida Project", Sean Baker confirme être un amoureux des personnages en marge, débordant d'humanité.
(B.Hartmann--BBZ)