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L'avenir du loup est-il menacé en Europe? C'est ce que dénoncent de nombreuses ONG, alors que le statut de l'espèce fait l'objet d'un examen mardi à Strasbourg par les pays signataires de la Convention de Berne.
Sous pression des agriculteurs, nombre de pays européens penchent pour faciliter l'abattage du canidé, dont le nombre a augmenté rapidement ces dernières années.
Le comité permanent de la Convention de Berne, dont le but est d'assurer la protection de la faune, envisage de rétrograder l'espèce de "strictement protégée" à "protégée", selon une proposition d'amendement soumise fin septembre par l'Union européenne.
"On ne pourra pas se mettre à chasser le loup sans aucun cadre, mais un déclassement permettrait de généraliser la possibilité de tirer et de tuer des loups, selon des règles qui devront être déterminées nationalement", récapitule pour l'AFP le directeur des programmes de WWF-France, Yann Laurans.
Des loups peuvent être tués dans des conditions très précises pour protéger des troupeaux, une disposition déjà mise en oeuvre en France via des dérogations.
Dans sa proposition, l'UE, qui assure se fonder sur "une analyse approfondie du statut" du carnivore sur son territoire, fait état d'une population grandissante, atteignant les 20.300 individus en 2023, pour la plupart dans les Balkans, les pays nordiques, en Italie et en Espagne.
Une expansion qui serait à l'origine de difficultés de "coexistence avec les activités humaines, notamment en raison des dommages causés au bétail, qui ont atteint des niveaux importants", selon Bruxelles.
De nombreux agriculteurs français dénoncent depuis début novembre des attaques sur leurs bêtes ainsi qu'une inaction de l'Etat concernant l'autorisation de tirs de défense.
"Le risque de rétrograder ce statut est de fragiliser voire provoquer le déclin de cette espèce en Europe", alerte M. Laurans, avant de rappeler que le loup avait entièrement disparu de l'Hexagone il y a un siècle.
De plus, déstabiliser "l'organisation sociale très précise" qu'est une meute par des tirs sporadiques risque de créer "des comportements plus désordonnés" de celle-ci envers les troupeaux, selon lui.
- "Aucune conséquence positive" -
Un potentiel déclassement du loup n'aurait "aucune conséquence positive sur le bétail des éleveurs en France et en Europe", assure le cofondateur de l'Observatoire du loup, Jean-Luc Valérie.
"Il n'y a qu'une solution viable: laisser les élus gérer la situation à l'échelle régionale voire locale, et que ces derniers implantent sur leur territoire des personnes formées sur le sujet, qui puissent renseigner les éleveurs inquiets au sujet de potentielles attaques", affirme-t-il.
Dans une lettre adressée fin novembre au secrétaire de la Convention, Mikaël Poutiers, plusieurs ONG pointent une proposition "largement considérée comme illégale, manquant de justification scientifique et violant les principes de participation démocratique".
"En affaiblissant l'espèce qui est le sommet du système écologique européen, on risque de fragiliser l'ensemble de la santé, déjà assez peu robuste, de l'écosystème", appuie Yann Laurans.
L'estimation du nombre de loups en France en 2023 s'est établie à 1.003 individus, en baisse de 9% sur un an. Environ 20% de la population est abattue chaque année.
Lors d'une visite au Sommet de l'élevage début octobre, le Premier ministre français Michel Barnier avait estimé que la nouvelle évaluation officielle du nombre de loups en France, attendue d'ici fin 2024, pourrait représenter un potentiel "moment clé" pour augmenter les abattages.
Si l'amendement à la Convention de Berne est adopté, il entrera en vigueur dans les pays ayant voté en sa faveur trois mois plus tard. Au contraire, si un tiers des pays formulent des objections, la proposition sera annulée.
La Convention de Berne est composée des 46 Etats membres du Conseil de l'Europe, exception faite de Saint-Marin, ainsi que de quatre Etats africains: le Burkina Faso, le Maroc, le Sénégal et la Tunisie.
(F.Schuster--BBZ)