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L'interminable queue pour se recueillir devant le cercueil d'Elizabeth II ne cessait de s'allonger vendredi à Londres, avec plus de 24 heures d'attente, pendant que Charles III était ovationné à Cardiff où il a achevé sa tournée de nouveau roi dans le pays.
Preuve de l'immense émotion suscitée par la mort de la reine Elizabeth II le 8 septembre, les autorités avaient dû suspendre temporairement vendredi l'accès à la longue file d'attente qui s'est formée pour voir le cercueil de la monarque à Westminster Hall, la plus ancienne salle du Parlement britannique.
"Mes chevilles me font atrocement mal, mais c'est un petit sacrifice à faire", a confié à l'AFP Peter Stratford, 70 ans, se reposant brièvement après huit heures d'attente.
"Je n'aurais pas voulu manquer ça", a ajouté cet ancien pompier qui était intervenu lors d'un important incendie au château de Windsor en 1992, où Elizabeth II sera inhumée lundi.
- David Beckham -
Comme des milliers d'anonymes, l'ex-star du football David Beckham a attendu patiemment, plus de 12 heures depuis 02H00 du matin, vêtu de sombre. Devant la dépouille, il a sobrement incliné la tête et essuyé une larme.
"C'est très émouvant, et le silence et l'atmosphère dans la salle sont très difficiles à expliquer, mais nous sommes tous là pour dire merci à Sa Majesté d'avoir été si gentille, attentionnée, réconfortante à travers les années", a-t-il dit à sa sortie, pris d'assaut par les journalistes.
"Elle a été notre reine et l'héritage qu'elle laisse est incroyable", a-t-il ajouté.
Ceux qui auront la chance de parvenir dans l'édifice au bon moment espéraient assister en fin de journée à la "veillée des princes", pendant laquelle les quatre enfants d'Elizabeth II - Charles, Anne, Andrew et Edward - viendront veiller un quart d'heure sur le cercueil de leur mère.
Pour l'occasion, Andrew, privé de titres militaires à la suite d'un scandale sexuel, a été autorisé à porter l'uniforme.
Huit des petits-enfants de la reine devraient faire de même samedi soir.
Ce moment solennel viendra clore pour le nouveau souverain une journée riche en émotion, durant laquelle il a été ovationné lors de la dernière étape de sa tournée dans les quatre nations constitutives du Royaume-Uni (Angleterre, Ecosse, Irlande du Nord et Pays de Galles).
"Long Live the King!" ("Longue vie au roi!"): pendant une vingtaine de minutes, l'ancien prince de Galles de 73 ans s'est offert un bain de foule, serrant de nombreuses mains.
Il est reparti avec la reine consort Camilla au son de l'hymne "God Save the King" entonné par le public, après avoir assisté à un service religieux et renouvelé sa promesse, dans un discours prononcé partiellement en gallois devant le Parlement, de suivre "l'exemple" de sa mère.
"C'était très émouvant de voir quelqu'un de si spécial pour le pays", a déclaré à l'AFP Ffion Driscoll, 14 ans, pleurant à chaudes larmes avec sa mère.
Mais si le roi a été acclamé par des spectateurs conquis, une poignée d'anti-monarchistes portant des pancartes avec "abolir la monarchie" ou "Démocratie maintenant", étaient réunis devant le château.
Hasard du calendrier, le 16 septembre est aussi le jour où le Pays de Galles célèbre le "prince rebelle" Owain Glyndwr, dernier prince de Galles effectivement Gallois, qui en 1400 s'était soulevé contre le roi d'Angleterre.
Une pétition protestant contre la transmission du titre de prince de Galles - pour certains un symbole d'oppression anglaise - au nouvel héritier du trône William plutôt qu'à un Gallois a recueilli près de 30.000 signatures.
De retour à Londres, Charles III a reçu des responsables religieux du pays au palais de Buckingham.
- 2.000 invités -
Le public pourra défiler jusqu'au petit matin lundi devant le cercueil d'Elizabeth II, drapé de l'étendard royal et orné de la couronne impériale, avant les funérailles d'Etat à 10h00 GMT, les premières depuis celles de Winston Churchill en 1965.
Ensuite, une procession accompagnera le cercueil jusqu'à l'Abbaye de Westminster où se tiendront les funérailles.
Des millions de personnes devraient suivre l'évènement devant leur télévision en cette journée fériée au Royaume-Uni.
Quelque 2.000 invités, dont plusieurs centaines de dirigeants du monde entier, de têtes couronnées, mais aussi d'anonymes décorés pour leur engagement associatif, assisteront à la cérémonie.
Joe Biden, Ursula von der Leyen, l'empereur du Japon, ou encore Emmanuel Macron sont attendus, tandis que le Pape se fera représenter. Les dirigeants de Russie, d'Afghanistan, de Birmanie, de Syrie et de Corée du Nord n'ont pas été conviés.
L'évènement représente un défi sécuritaire inédit pour le Royaume-Uni qui a déployé un dispositif impressionnant dans la capitale, avec de nombreux renforts venus de tout le pays.
"Ce sera le plus grand événement que la police londonienne" ait eu à encadrer, a déclaré vendredi le sous-commissaire adjoint Stuart Cundy, plus imposant encore que les Jeux olympiques de 2012.
Quelques heures plus tôt, l'agression de deux policiers, poignardés dans le centre de Londres, qui n'est pas considérée comme un acte terroriste par les autorités, a relevé d'un cran la tension.
- "Indépendance" -
De nombreux défis attendent Charles III, qu'on décrit souvent, à 73 ans, comme un roi de transition précédant son fils, le populaire William, mais aussi comme un modernisateur soucieux de réduire la voilure de la monarchie.
Entre les velléités d'indépendance de l'Ecosse, les tensions communautaires en Irlande du Nord, la crise économique et sociale dans le pays, mais aussi les tentations républicaines émergeant dans certains de ses 14 autres royaumes, il aura fort à faire pour incarner l'unité de la nation.
Ainsi, à quelques mètres de l'entrée du château, Zahra Ameri, 22 ans, qui travaille dans un magasin de thés, se dit déjà fatiguée par toute l'agitation autour de la venue du roi.
"J'espère que le Pays de Galles deviendra indépendant", dit-elle à l'AFP. "(Le roi) est juste une personne, (il n'est) pas vraiment important pour moi".
Les premiers pas de Charles III ont été plutôt jugés dignes, à l'exception de quelques gestes d'agacement publics très commentés sur internet, beaucoup attendant de voir comment il endossera le costume de sa mère, immensément respectée, et comment il gèrera les crises familiales.
(K.Müller--BBZ)