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Le président du Sénat qui interroge la "légitimité" d'un président qui serait élu sans campagne, un petit candidat -Jean Lassalle - qui menace de jeter l'éponge: à défaut de débats, la campagne présidentielle connaît mardi quelques remous, à 26 jours du premier tour.
L'attaque n'est pas nouvelle mais elle est frontale. Elle émane du deuxième personnage de l'Etat, Gérard Larcher (LR): "Le président de la République veut être réélu sans jamais avoir été réellement candidat, sans campagne, sans débat, sans confrontation d’idées".
"Tous les candidats débattent sauf lui. C’est un paradoxe!", a lancé le président du Sénat dans un entretien au quotidien Le Figaro. "S’il n’y a pas de campagne, la question de la légitimité du gagnant se posera", selon lui.
Cette attaque en règle du président-candidat, grand favori dans les sondages pour un second mandat, intervient juste après la première grande soirée électorale de la campagne, lundi soir sur TF1, avec la participation de huit candidats sur 12.
Ce vrai-faux débat, très policé et sans surprise, n'a pas permis une confrontation directe entre les prétendants à l'Elysée qui ne se sont même jamais croisés sur le plateau.
- "Propos irresponsables" -
Le camp présidentiel est très vite monté au créneau après les attaques de la droite, dont la candidate Valérie Pécresse (LR) est en difficulté dans les sondages autour de 11/13%.
Le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a ainsi dénoncé sur France Inter des "propos irresponsables", qui font "courir une petite musique qui serait un procès en illégitimité".
"Dès lors qu'il le peut", le chef de l'Etat "participe à cette campagne", a également riposté le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal sur France 2, rappelant que M. Macron doit présenter jeudi lors d'une conférence de presse "de trois heures" son projet pour un second quinquennat.
Mobilisé par la guerre en Ukraine et ses fonctions de président en exercice du Conseil de l'UE, M. Macron n'a pourtant pour l'heure participé à aucun meeting de campagne. A Marseille, il s'est fait représenter samedi par M. Attal et le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
Il avait expliqué être retenu par le dossier ukrainien, dans une vidéo de 22 minutes diffusée pour la première fois en public et appelée à être projetée dans plusieurs meetings régionaux.
Le président, donné à quelque 30% d'intentions de vote au premier tour, refuse également de débattre directement avec les autres candidats avant le premier tour, justifiant sa décision par le fait que les autres présidents sortants en lice pour un second mandat ne s'étaient pas prêtés à cet exercice.
Cette attitude le place sous le feu des critiques de ses rivaux, notamment la candidate d'extrême droite Marine Le Pen (RN), donnée par les enquêtes d'opinion à la deuxième place (17/18%), donc qualifiée pour le second tour, comme en 2017.
Pour le député et porte-parole du RN Sébastien Chenu, M. Macron "aimerait enjamber l’élection, être reconduit de façon tout à fait tacite".
"On ne peut pas effacer comme ça, (comme avec) une ardoise magique, un bilan catastrophique, qui a jeté notre pays dans la rue. La pandémie (de Covid-19) a chassé la crise des gilets jaunes, et on va recommencer?", a renchéri la candidate socialiste Anne Hidalgo en référence à la principale crise sociale du mandat Macron.
- "Ne plus faire semblant" -
Un des quatre candidats non invités à la soirée de TF1, le candidat iconoclaste Jean Lassalle s'était déjà étranglé d'être traité comme un "candidat de merde et inutile". Lors d'un grand oral sur la décentralisation mardi, il a haussé le ton, envisageant de se retirer de la course à l'Elysée, irrité de ne pas être invité aux débats électoraux.
"Je l'envisage fortement à l'heure qu'il est", a expliqué le député des Pyrénées-Atlantiques, promettant de prendre une décision dans la journée. Avec environ 2% dans les intentions de vote, il dépasse très régulièrement les deux candidats d'extrême gauche Nathalie Artaud (LO) et Philippe Poutou (NPA). Et fait même parfois jeu égal ou dépasse Anne Hidalgo.
BFMTV et France 2 ont indiqué qu'elles avaient bien invité Jean Lassalle à leur grande soirée présidentielle, respectivement les 23 et 31 mars.
Plusieurs responsables d'associations d'élus, dominées par l'opposition, ont également regretté l'absence - "un comportement pas très républicain" - au grand oral sur la décentralisation du président-candidat, qui a entretenu des relations tendues avec les collectivités tout au long de son mandat.
Pour le vice-président PS de l'Association des maires de France (AMF), André Laignel, "il est quand même curieux que celui qui s'est tourné vers les maires (lors de la crise des gilets jaunes) n'ait pas daigné venir devant les maires" pour "rendre compte" de son bilan et "de la manière dont il a considéré ou pas la démocratie locale", a-t-il déploré.
(L.Kaufmann--BBZ)