Berliner Boersenzeitung - Relancer Gucci: le chantier prioritaire et impératif de Kering

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Relancer Gucci: le chantier prioritaire et impératif de Kering
Relancer Gucci: le chantier prioritaire et impératif de Kering / Photo: STEPHANE DE SAKUTIN - AFP/Archives

Relancer Gucci: le chantier prioritaire et impératif de Kering

Gucci aura longtemps été la locomotive du groupe de luxe Kering. Mais les ventes de la célèbre marque italienne sont aujourd'hui résolument en recul, dans un marché mondial du luxe qui ralentit. Et Kering n'a guère d'autre solution que de la relancer en montant en gamme.

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"Un groupe qui est dépendant à ce point d'une maison, c'est quelque chose de dangereux", explique à l'AFP Eric Briones, auteur de "Luxe et digital" (ed. Dunod).

La marque italienne, connue notamment pour ses sacs et ceintures en python, représente 50% du chiffre d'affaires du groupe dirigé par François-Henri Pinault et les deux tiers de la rentabilité opérationnelle.

Mais le premier trimestre 2024 s'annonce en baisse, avec des ventes pour Gucci qui devraient "être en retrait de près de 20%", a prévenu Kering en mars, et un repli attendu "de l'ordre de 10%" pour tout le groupe.

Chez le grand concurrent LVMH, "il y a deux moteurs qui sont Dior et Vuitton", ajoute M. Briones. "Mais clairement la feuille de route donnée pour Michael Burke (PDG du LVMH Fashion Group, pôle fédérant des marques comme Céline, Givenchy, Loewe, Kenzo...), c'est d'ici cinq ans d'avoir cinq maisons moteurs", souligne-t-il.

Autre exemple, "l'obsession" du concurrent italien Prada est "de faire grandir Miu Miu", l'une de ses marques.

Gucci est très dépendante d'une clientèle asiatique et "aspirationnelle", c'est-à-dire plus jeune et moins fortunée, et adepte des produits "tendance". Or, le marché asiatique du luxe n'a pas retrouvé sa vigueur d'avant-Covid, et la clientèle aspirationnelle est touchée par l'inflation.

En 2019, quelques mois avant la pandémie de Covid-19, Gucci a entamé une stratégie de "montée en gamme", développant "des segments plus sophistiqués, plus haut de gamme, avec une clientèle qui a un pouvoir d'achat plus élevé", selon son PDG François-Henri Pinault.

- "De quoi faire avec Jackie Kennedy"-

"La stratégie dite d'élévation, en théorie, c'est la bonne", commente auprès de l'AFP Julie El Ghouzzi, auteure du "Manuel du Luxe" (Presses universitaires de France).

La mode est dans le temps fugace, le luxe est plus intemporel. "Gucci initialement a un modèle économique plus proche de celui de la mode, il faut se renouveler plus rapidement. De ce fait, l'amour ou le désamour pour la marque, lui-même, est cyclique", explique-t-elle.

L'élévation, "c'est la capacité d'avoir des pièces iconiques, intemporelles, à nourrir avec des paillettes de mode", selon la spécialiste.

Prendre ce virage pour Kering, "cela veut dire aussi remettre en question un positionnement mode qui a été extrêmement fort et bénéfique pour Gucci", à l'époque Michele: en effet, grâce aux collections originales du créateur Alessandro Michele (parti en 2022), le chiffre d'affaires de Gucci est passé de 3,9 milliards d'euros en 2015 à 10,5 milliards en 2022.

"Il y a un énorme travail de narration à faire sur les pièces iconiques: il ne faut pas starifier le directeur artistique mais les produits", analyse Julie El Ghouzzi.

"On dit +j'ai acheté un Kelly+ (sac iconique de Hermès). On ne sait pas qui l'a fait, on achète l'icône, l'histoire qui l'accompagne: c'est Grace Kelly qui a caché son ventre avec le sac quand elle était enceinte", raconte-t-elle.

"Il y a de quoi faire avec Jackie Kennedy!", allusion au sac "Jackie" de Gucci popularisé par Jacqueline Kennedy, souligne Julie El Ghouzzi.

En parallèle, Kering a aussi revu la gouvernance de Gucci en nommant l'un des collaborateurs les plus proches de François-Henri Pinault, Jean-François Palus, à la tête de la marque et autour duquel depuis quelques mois se forme une nouvelle équipe.

Jeudi, Gucci a annoncé la nomination d'un directeur général adjoint de l'entreprise, Stefano Cantino, venu de chez le concurrent Louis Vuitton et qui sera chargé de "définir et mettre en œuvre la stratégie de la marque".

"On n'avait pas en place, à des positions clés de l'entreprise, suffisamment d'expertise et de talents", avait expliqué en février François-Henri Pinault soulignant que le luxe exige des expertises "très fortes" dans la vente, le merchandising ou l'approvisionnement.

(U.Gruber--BBZ)