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Ne pas se fier au titre de son premier album, "Perdu d'avance", en 2009: OrelSan s'est imposé en un peu plus de dix ans comme un artiste incontournable, touchant un large public, intergénérationnel, bien au-delà du rap.
Le bientôt quadragénaire (cet été) a remporté vendredi la Victoire de la musique dans la catégorie artiste masculin. C'est un habitué (7 victoires avant vendredi, dont 3 en 2018).
"Dans les musiciens francophones, c'est un de ceux qui écrit le mieux, il creuse vraiment, il va loin", avait salué vendredi matin, sur France Inter, Stromae, président d'honneur de ces 37e Victoires.
Le succès, conséquent dès "La fête est finie" (2017) et démultiplié avec son dernier opus "Civilisation", sorti fin 2021, ne risque pas de lui faire tourner la tête. Le rappeur est resté "simple, basique" pour citer un de ses tubes. L'hiver dernier, il déboule ainsi seul, en trottinette électrique, dans la rue du rendez-vous parisien fixé avec l'AFP. Tout heureux de l'anonymat conféré par le port du masque.
Il est pourtant l'artiste de la charnière fin 2021/début 2022, salué par public et critique. "Civilisation", sorti en novembre, est le disque le plus vendu en France en 2021. Et celui qui colle le plus à l'époque. Le single "L'odeur de l'essence" est une peinture sans fard d'une société fracturée autour des débats de la campagne présidentielle.
"Avec ce titre, il s'adresse aussi bien à la génération des 14-15 ans qui commence à s'intéresser au monde autour d'elle, qu'à des gens de 50-60 ans", décrypte pour l'AFP Pierre-Olivier Toublanc, directeur du label 3ème Bureau, structure associée au rappeur. "Dans cette chanson, il a un regard de mec lambda de classe moyenne, il compile ce qu'il entend autour de lui, venu de toutes les couches sociales", poursuit ce responsable.
- "Fils d'instituteurs" -
"Montre jamais ça à personne", série documentaire évènement sur l'artiste, basée sur une vingtaine d'années filmées par son frère, diffusée (sur Amazon Prime Video) juste avant la sortie de l'album, a encore renforcé sa proximité avec le public. Et récolté... la Victoire de la création audiovisuelle vendredi.
Le documentaire met en lumière le parcours de ce "fils d'instituteurs d'une petite ville normande, qu'on aurait bien vu faire +Sup de co+ et finir cadre dans une PME plutôt que de devenir rappeur", souligne à l'AFP Maxime Delauney, producteur chez Nolita, impliqué dans ce projet.
"Montre jamais ça à personne", phrase qu'Aurélien Cotentin (son vrai nom) lance à son frère alors qu'il est veilleur de nuit dans un hôtel, montre les hauts et surtout les bas, ce qu'on voit rarement dans un biopic.
Une séquence, devenue culte, dévoile l'apprenti OrelSan ridiculisé lors d'un duel d'improvisation rap, sous l'oeil d'un jury où trônent des pointures comme Diam's et Booba.
- Heure du bilan -
Le documentaire revient aussi sur la polémique monstre autour de la chanson "Sale pute". "Ce n'était pas juste 30 dates de concerts annulées mais possiblement la carrière d'un chanteur prometteur qui s'arrête", comme le résume Maxime Delauney.
Poursuivi pour provocation à la violence envers les femmes, OrelSan est finalement relaxé en 2016. Dans le documentaire, on le voit revendiquer son droit à la fiction, ce n'est pas lui qui s'exprime, mais un narrateur imaginaire.
"Civilisation" parle sans doute un peu plus de lui. Un opus entre "ombre et lumière", comme il le chante dans les premier et dernier titres, "Shonen" et "Civilisation". Comme une boucle qui marque l'heure du bilan et des perspectives.
"J'ai 39 ans, je suis marié, c'est le dernier album de mon contrat (avec sa maison de disques), il y a une première partie réflexion sur le passé, un côté négatif puis un coté plus positif". Une tournée XXL est prévue dans l'immédiat. Tous les possibles s'offrent ensuite, écrire de la musique pour lui, pour d'autres ou écrire pour le cinéma, domaine déjà fréquenté avec "Comment c'est loin", qu'il avait réalisé.
(Y.Yildiz--BBZ)