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De San Francisco à Seattle, la tech américaine inquiète avec des croissances au ralenti et des prévisions peu enthousiasmantes, montrant que les géants d'internet qui semblaient intouchables sont rattrapés par la crise économique et la concurrence de nouveaux acteurs.
"Cette semaine restera dans l'histoire des résultats financiers comme l'une des pires pour les Big Tech, voire même un possible tournant", a souligné jeudi l'analyste Dan Ives de Wedbush Securities.
Alphabet, la maison mère de Google, a réalisé cet été la plus faible croissance de son chiffre d'affaires depuis 2013, hormis le début de la pandémie de Covid-19.
Microsoft, porté par le cloud, a publié mardi de bons résultats trimestriels, mais a averti qu'Azure, sa plateforme d'informatique à distance, allait croître moins vite pendant cette fin d'année.
Quant à Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp, Oculus), c'est un "désastre", selon Dan Ives. Le titre de la société a plongé de 19% mercredi soir, conséquence de bénéfices divisés par deux à 4,4 milliards de dollars, et surtout des propos de Mark Zuckerberg.
Le fondateur du groupe californien a insisté lors de la conférence aux analystes sur ses priorités, à savoir "les technologies d'intelligence artificielle qui permettent de recommander les reels (vidéos courtes copiées à TikTok, ndlr) aux utilisateurs", "les outils publicitaires sur les messageries" et "notre vision pour le métavers".
"Ceux qui sont patients et investissent avec nous seront récompensés au final", a affirmé le dirigeant.
- "Le pire est passé" -
Mais l'immense déploiement de ressources pour construire un monde parallèle, accessible via les réalités augmentée et virtuelle, suscite de plus en plus de scepticisme de la part des observateurs, à l'heure où l'inflation et la hausse des taux d'intérêt grignotent les marges des entreprises.
"Il n'y a aucune information sur le potentiel en termes de revenus que Meta pourrait dériver du métavers. Personne ne sait", note Debra Aho Williamson, analyste d'Insider Intelligence.
"Google a plus de chance de rebondir rapidement, parce que son moteur de recherche est un socle d'internet depuis des décennies, tant pour les consommateurs que pour les entreprises. Son modèle économique n'est pas cassé", élabore-t-elle.
Face aux difficultés économiques mondiales, de nombreux annonceurs ont coupé dans leurs budgets marketing.
Snapchat en souffre particulièrement: malgré la bonne croissance de ses utilisateurs, l'application aux effets de réalité augmentée est considérée comme un canal de communication expérimental.
Meta, de son côté, a vu le nombre d'espaces publicitaires vendus augmenter de 17% au troisième trimestre, tandis que leur prix moyen à l'unité a diminué de 18% sur un an.
"Nous savions que les dépenses publicitaires mondiales allaient se contracter. Mais je pense que le pire est passé", nuance Tejas Dessai, analyste chez Global X ETFs. "Et ça ne va pas si mal, les baisses restent modestes étant données la pression sur les taux de changes et l'inflation".
- "Concurrent redoutable" -
La Silicon Valley souffre aussi d'un effet de comparaison défavorable avec 2021, quand la pandémie profitait encore énormément aux services en ligne.
Mais une des raisons de la déprime des grandes plateformes n'est pas sur le point de disparaître: l'ultra populaire TikTok n'en finit plus de prendre de la place.
En 2021, l'application de divertissement a dépassé Google en tant que site web le plus populaire au monde, d'après Cloudflare, un fournisseur de services sur internet.
Google et Meta ont copié le format à succès de TikTok, avec les "shorts" et les "reels", respectivement, mais elles peinent à transformer leurs investissements en bénéfices pour l'instant.
"Plus de 140 millions de reels sont jouées sur Facebook et Instagram chaque jour, soit 50% de plus qu'il y a six mois", a cependant annoncé Mark Zuckerberg. "Et nous pensons que nous gagnons des parts de marché de temps passé (sur nos applis) à des concurrents comme TikTok".
"TikTok est un concurrent redoutable, mais en termes de recettes publicitaires, il n'y a pas de comparaison possible", rappelle Debra Aho Williamson. Les vétérans du secteur sont "encore largement en avance".
Amazon et Apple doivent annoncer leurs résultats trimestriels jeudi soir.
Le marché s'attend à ce que la demande pour les iPhone résiste bien malgré les conditions économiques défavorables.
(U.Gruber--BBZ)