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La rupture est consommée: les principaux actionnaires de Generali, deux milliardaires frondeurs liés par un pacte et la première banque d'affaires italienne Mediobanca, se livrent une bataille acharnée sur l'avenir du troisième assureur européen et la reconduction de son PDG, Philippe Donnet.
Le magnat de la construction Francesco Gaetano Caltagirone, qui détient 8% du capital de Generali, avait démissionné avec fracas jeudi dernier du conseil d'administration, suivi lundi du représentant de Leonardo Del Vecchio, fondateur du fabricant de lunettes Luxottica.
Les deux entrepreneurs comptaient ainsi protester contre la manière dont le conseil d'administration a adopté le nouveau plan stratégique 2022-24 et accordé son soutien à M. Donnet, candidat à un troisième mandat, estimant qu'ils n'ont pas eu voix au chapitre.
La riposte des onze administrateurs restants est venue tard mardi soir, à l'issue d'une réunion marathon: ils ont "rejeté catégoriquement", à la majorité, "les allégations sans fondement et souvent offensantes formulées" par les contestataires dans leurs lettres de démission.
Et comme prévu, le conseil administration a élaboré une première liste provisoire de "25 à 30 candidats" en vue de son propre renouvellement, dont fait partie M. Donnet, un polytechnicien français âgé de 61 ans. Une liste plus restreinte sera soumise au vote de l'assemblée générale des actionnaires le 29 avril.
- Contre-attaque -
Le camp adverse, sous l'égide de M. Caltagirone, 78 ans, et Leonardo Del Vecchio, 86 ans, deuxième fortune d'Italie qui possède une part de 6,6% de l'assureur, prépare sa contre-attaque.
Les contestataires comptent présenter "vers la mi ou fin février" un plan alternatif, suivi dans la foulée d'une liste de candidats concurrente, a indiqué à l'AFP une source proche du pacte.
Les actionnaires dissidents, qui ont fait monter la pression en multipliant les achats de parts supplémentaires, ont été rejoints dans leur fronde par la fondation Crt (1,5%).
Ensemble, ils pèsent désormais 16,1% du capital de Generali, soit quasiment autant que le principal actionnaire et soutien de M. Donnet, Mediobanca, qui en détient 12,8%, mais 17,2% des droits de vote, grâce à un emprunt d'actions.
Les deux milliardaires reprochent à Mediobanca de tirer d'importants revenus de Generali, sous forme de dividendes, sans oeuvrer pour sa croissance, et d'agir en coulisse pour imposer les dirigeants de son choix, sans concertation.
Des reproches réfutés sèchement par le président de Generali, Gabriele Galateri di Genola, qui a assuré que le groupe "a toujours mené ses activités selon des critères de transparence absolue et d'équité rigoureuse".
- Guerre des chiffres -
Les accusations portées contre Mediobanca sont d'autant plus explosives que M. Del Vecchio en est le principal actionnaire, avec une part de 18,9%, et M. Caltagirone en détient 3%.
"Rien n'a été fait au profit d'un actionnaire spécifique, nous avons toujours oeuvré dans l'intérêt de tous les actionnaires", a assuré à l'AFP une source interne de Generali.
Les frondeurs font valoir que, par rapport à ses concurrents comme Allianz, Axa ou Zurich Insurance, Generali a perdu du terrain ces 20 dernières années, en termes de croissance et capitalisation, et devrait se montrer plus audacieux quant aux fusions-acquisitions.
Après avoir acquis pour 1,2 milliard d'euros l'assureur italien Cattolica et pour 400 millions d'euros le groupe français La Médicale, Generali envisage de renforcer sa présence en Inde à travers ses co-entreprises existantes, selon une source financière.
La capitalisation du groupe fondé en 1831 à Trieste, soit 29,6 milliards d'euros, est à la traîne par rapport à des assureurs comme Allianz (92 milliards d'euros) ou Axa (69 milliards d'euros).
Les partisans de M. Donnet mettent en avant un autre bilan chiffré: depuis novembre 2016, le cours de l'action a grimpé de 62%, bien au-dessus de la moyenne du secteur, et le rendement des actionnaires s'est accru de 115%.
Le titre a clôturé mercredi en baisse de 0,72% à 18,72 euros à la Bourse de Milan.
Le dernier mot reviendra aux actionnaires institutionnels et petits investisseurs qui représentent 57% du capital de Generali, et qu'il faudra convaincre du bien-fondé du plan déjà présenté par M. Donnet ou de celui en train d'être élaboré par ses adversaires.
(U.Gruber--BBZ)