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La Russie a encore intensifié mardi son offensive en Ukraine, visant les villes dont Kiev et Kharkiv où les bombardements ont fait nombre de victimes civiles, poussant les Européens, exhortés à agir par le président ukrainien, à durcir encore leurs sanctions contre la Russie.
Au sixième jour de l'invasion russe de l'Ukraine, les frappes meurtrières se son succédées sur Kharkiv, deuxième ville du pays dont les forces russes donnent l'assaut.
Une frappe a touché la place centrale de cette ville d'1,4 million d'habitants, proche de la frontière russe, touchant le siège de l'administration régionale, a indiqué le gouverneur Oleg Sinegoubov, dans une vidéo sur Telegram montrant l'explosion.
Au moins 10 personnes ont été tuées et plus de 20 blessées, selon le service ukrainien des situations d'urgence. Une autre frappe sur un immeuble résidentiel a ensuite fait huit morts et six blessés, selon ce service.
A Kiev, la capitale autour de laquelle se massent des forces russes, une frappe a touché dans l'après-midi la tour de télévision, interrompant la diffusion, a indiqué le ministère de l'Intérieur.
Le président Volodymyr Zelensky a dénoncé "un crime de guerre" à Kharkiv, et souligné que la défense de Kiev était "la priorité".
La probabilité d'un assaut majeur sur la capitale, forte en temps normal de près de 3 millions d'habitants, semblait se renforcer d'heure en heure.
Des photos satellites diffusées dans la nuit de lundi à mardi par la société américaine d'imagerie satellitaire Maxar montraient un convoi russe s'étirant sur des dizaines de kilomètres et se dirigeant vers la capitale ukrainienne depuis le nord-ouest.
En début d'après-midi mardi, l'armée russe a appelé les civils de Kiev vivant près d'infrastructures des services de sécurité ukrainiens à évacuer, disant vouloir frapper pour faire cesser "les attaques informatiques contre la Russie".
Témoin de l'avancée russe, les forces de l'armée ukrainienne, files de camions et de tanks, se concentraient à l'ouest et au nord de la capitale, a constaté l'AFP.
Au centre-ville, où la neige était tombée dans la nuit, les magasins de première nécessité encore ouverts ne désemplissaient pas. Les habitants qui n'ont pas fui ont érigé ces derniers jours des barricades et creusé des tranchées.
Les Russes semblaient également avoir progressé dans le sud du pays, sur la mer d'Azov, où se trouvent plusieurs grandes métropoles ukrainiennes.
Dans le port de Marioupol, les forces russes "frappent tous les quartiers de la ville", a indiqué le gouverneur, parlant de 21 blessés et de morts en nombre non précisé.
Le ministère russe de la Défense a affirmé que ses troupes qui progressaient le long de la côte depuis la Crimée avaient réussi à rejoindre celles venues du territoire séparatiste prorusse de Donetsk, donnant une continuité territoriale stratégique aux forces russes.
L'information n'était pas immédiatement vérifiable. Peu auparavant, l'armée ukrainienne avait affirmé avoir fait échouer cette tentative.
L'armée russe contrôlait aussi les entrées de la ville côtière de Kherson (290.000 habitants), plus à l'ouest, selon son maire, Igor Kolikhaïev. Des vidéos d'habitants sur les réseaux sociaux montrent des soldats russes dans la localité.
Le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou a semblé confirmer ces offensives multiples, soulignant que "l'opération militaire spéciale" - expression utilisée par Moscou pour désigner l'invasion - continuerait "jusqu'à ce que les objectifs fixés soient atteints".
- Nouvelles sanctions
Face à cette évolution, le président Zelensky, qui demande désormais l'intégration "sans délai" de son pays à l'UE par une procédure spéciale, a demandé aux Européens de "prouver qu'ils sont avec l'Ukraine", lors d'une intervention par visioconférence au Parlement européen, qui l'a ovationné.
Si une admission rapide de l'Ukraine dans l'UE semble difficile, les Européens ont indiqué lundi soir, après un nouvel échange avec le président américain Joe Biden, qu'ils étaient prêts à durcir encore les sanctions contre la Russie, déjà d'une ampleur historique.
"Nous allons à coup sûr" prendre de nouvelles sanctions contre la Russie, a confirmé mardi le chancelier allemand Olaf Scholz, alors que la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen annonçait une aide humanitaire de 500 millions d'euros pour l'Ukraine.
"Nous allons provoquer l'effondrement de l'économie russe", avait affirmé plus tôt le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire, dont le pays assure la présidence de l'Union européenne.
Le camp occidental s'efforce de priver la Russie de tous ses financements internationaux et de bloquer les avoirs de Vladimir Poutine et son entourage.
Avec l'exclusion prévue des grandes banques russes de Swift et les sanctions contre la Banque centrale russe, les mesures de rétorsion ont déjà "un impact massif sur la Russie" et "le trésor de guerre de Poutine est sérieusement entamé", a estimé mardi le ministre allemand des Finances Christian Lindner, après une réunion avec ses homologues du G7.
Après une série de mesures pour soutenir l'économie et le rouble, tombé à des plus bas historiques, le gouvernement russe préparait mardi un nouveau décret pour enrayer la fuite des investisseurs étrangers. La bourse de Moscou restait fermée.
Les marchés mondiaux - surtout européens - accusent aussi le coup. Les prix du pétrole continuaient notamment de monter, avant la réunion mercredi de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et ses alliés.
- "Profond regret" de Pékin
Outre les sanctions économiques, la Russie est désormais exclue d'une multitude d'évènements culturels et sportifs, y compris du Mondial de football 2022 au Qatar.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a dénoncé les bombardements "absolument écoeurants" sur Kharkiv, les comparant aux frappes meurtrières qui avaient visé Sarajevo dans les années 1990.
A Genève, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a souligné que les "violations du droit humanitaire international commises par Moscou augmentent d'heure en heure", et a aussi suggéré une exclusion de la Russie du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU.
Même la Chine, qui n'a jusqu'ici pas condamné l'invasion russe, a exprimé mardi "son profond regret" face au conflit, lors d'un entretien de son ministre des Affaires étrangères avec son homologue ukrainien.
Mais malgré cette pression inédite, à laquelle s'ajoutent des manifestations de solidarité avec l'Ukraine dans de nombreux pays, Vladimir Poutine semblait décidé à poursuivre l'offensive et à mettre fin aux aspirations d'appartenance à l'UE et à l'Alliance atlantique de cette ex-république soviétique.
Lors d'un échange lundi avec le président français Emmanuel Macron, il a posé comme conditions, pour arrêter l'invasion, la reconnaissance de la Crimée en tant que territoire russe, la démilitarisation et la "dénazification" de l'Ukraine. Le président russe a précédemment qualifié les dirigeants ukrainiens de "néonazis".
Il a réitéré ses exigences alors que se tenaient de premiers pourparlers russo-ukrainiens. Des pourparlers qui ont duré quelques heures, avant de se terminer sur l'unique engagement qu'elles reprendraient "bientôt".
- Un million de déplacés -
Depuis le début de l'invasion russe le 24 février, le conflit a fait un million de déplacés en Ukraine même, et poussé plus de 660.000 Ukrainiens vers les pays voisins - essentiellement la Pologne, mais aussi la Hongrie, la Slovaquie et la Roumanie, selon le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés.
De longues files de voitures continuaient à se diriger vers la frontière polonaise, depuis la grande ville de l'ouest de l'Ukraine, Lviv, devenue porte de sortie et centre de repli, pour les Ukrainiens comme pour les ambassades occidentales.
Des femmes réfugiées à Lviv, laissant les hommes de leur famille "défendre l'Ukraine", se mobilisaient pour les soutenir, en donnant leur sang ou en confectionnant des filets de camouflage.
Le bilan du conflit reste incertain. L'ONU a évoqué lundi 102 civils tués et 304 blessés, ajoutant que les chiffres réels étaient "considérablement" plus élevés.
L'Ukraine a fait état lundi de 352 civils tués et 2.040 blessés depuis jeudi et affirmé que des milliers de soldats russes avaient péri.
Les forces russes ont reconnu des pertes, mais sans les chiffrer.
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(H.Schneide--BBZ)