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L'ONU doit lancer mercredi dans la capitale kényane Nairobi des négociations sur un traité "historique" pour lutter contre "l'épidémie" de pollution plastique qui menace la biodiversité mondiale.
L'Assemblée pour l'environnement de l'ONU (ANUE), plus haute instance internationale sur ce sujet, qui réunit actuellement des délégués de 175 pays, doit adopter une résolution créant un "Comité intergouvernemental de négociation" chargé d'élaborer un texte juridiquement contraignant d'ici sa prochaine réunion en 2024.
Selon ses responsables, un accord a été trouvé sur un texte donnant aux négociateurs un mandat large et "robuste". Ils devront notamment se pencher sur le "cycle de vie" complet du plastique, c'est-à-dire les impacts de sa production, de son utilisation, des déchets, du recyclage...
Implicitement, des mesures de limitation de certains produits sont donc envisageables, alors que de plus en plus de pays dans le monde ont interdit les sacs en plastique à usage unique, ou autres produits jetables.
Le mandat prévoit également de négocier des objectifs mondiaux chiffrés avec des mesures de contrôle, l'élaboration de plans nationaux ou encore un système d'aide pour les pays pauvres. Il concerne toutes les formes de pollution terrestre ou marine, y compris aux microplastiques.
"Ça se présente bien. Nous sommes tout près" d'une issue positive, a estimé le président de l'Assemblée, le ministre norvégien de l'Environnement Espen Barth Eide, qualifiant la pollution plastique de "véritable épidémie".
"Nous sommes satisfaits à 100%. Le texte d'origine a même été amélioré sur plusieurs points", a relevé Ana Teresa Lecaros, directrice pour l'environnement au ministère des Affaires étrangères du Pérou, pays cosignataire d'un des projets de résolution sur lesquels ont travaillé les délégués.
L'ouverture de négociations sur un traité plastique a été qualifiée d'"historique" par Inger Andersen, directrice exécutive de l'agence de l'ONU sur l'environnement (Unep).
- Triple crise -
Il s'agit pour elle de la principale avancée depuis l'accord de Paris sur le réchauffement climatique en 2015 pour faire face à la "triple crise" qui menace le monde: changement climatique, effondrement de la biodiversité et pollution.
L'inclusion dans le champ des négociations de toutes leurs préoccupations rend les ONG prudemment optimistes, même si elles soulignent, comme nombre d'observateurs et participants, qu'il faudra veiller à ce qu'elles ne soient pas édulcorées au fil des pourparlers.
La première session de discussions devrait avoir lieu en mai, selon des sources impliquées dans le processus.
L'engagement affiché de grandes multinationales, dont certaines utilisent beaucoup d'emballages plastique comme Coca-Cola ou Unilever, pour un traité fixant des règles communes, renforce l'optimisme, même si elles ne se sont pas prononcées sur des mesures précises.
Le futur texte doit leur donner de la visibilité et éviter les distorsions de concurrence au sein d'une industrie pesant des milliards, selon les promoteurs du texte.
Quelque 460 millions de tonnes de plastiques ont été produites en 2019 dans le monde, générant 353 millions de tonnes de déchets dont moins de 10% sont actuellement recyclées et 22% sont abandonnées dans des décharges sauvages, brûlées à ciel ouvert ou rejetées dans l'environnement, selon les dernières estimations de l'OCDE.
Cette pollution contribue notamment à l'effondrement de la biodiversité, relevé par tous les spécialistes, alors même que les "solutions basées sur la nature" sont considérées dans le nouveau rapport des experts sur le climat de l'ONU (Giec), publié lundi, comme un outil important de lutte contre le changement climatique et d'atténuation de ses effets.
(P.Werner--BBZ)