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Plus d'un salarié d'EDF sur trois étaient en grève ce mercredi contre la demande de l'Etat de vendre davantage d'électricité à bas prix à ses concurrents afin de contenir la facture d'électricité des ménages et des entreprises, une décision dont ils craignent les conséquences pour la santé du groupe.
La participation au mouvement, qui ne devrait pas occasionner de coupures de courant, s'élevait à la mi-journée à "37,20% de l'effectif total", selon le groupe. A titre de comparaison, les derniers mouvements d'envergure, contre un projet de réorganisation du groupe, avaient été suivis par 20 à un peu plus de 25% des effectifs, en 2020 et 2021.
La grève a entraîné une baisse de la production de 2.500 MW dans la nuit de mardi à mercredi, jusqu'à 08H00 du matin environ, lorsque RTE a demandé l'arrêt des baisses, a indiqué à l'AFP le gestionnaire des lignes à haute et très haute tensions. C'est l'équivalent de deux gros réacteurs nucléaires.
Devant la flambée des prix de l'énergie, le gouvernement a dégainé un arsenal de mesures pour contenir les factures et honorer sa promesse de limiter à 4% l'augmentation des tarifs réglementés de l'électricité en 2022, à quelques semaines de l'élection présidentielle.
Le gouvernement multiplie depuis fin septembre les décisions contre la hausse générale des prix de l'énergie, avec un "bouclier tarifaire" sur le gaz, une indemnité pour compenser l'inflation notamment de l'essence, ou encore mardi un relèvement du barème de l'indemnité kilométrique.
Pour l'électricité, il a notamment demandé à EDF d'augmenter de 20% le volume d'électricité nucléaire vendu à prix réduit à ses concurrents cette année, pour le faire passer de 100 à 120 terrawattheures (TWh). Ce qui coûtera de l'ordre de 8 milliards d'euros au groupe.
Les quatre principaux syndicats du secteur énergétique ont alors appelé à la grève, et le PDG lui-même a fait part de son "choc", à un moment difficile pour EDF.
Le groupe est déjà aux prises avec de nouveaux retards pour l'EPR de Flamanville (Manche) et avec un problème de corrosion sur des systèmes de sécurité dans plusieurs centrales.
"C'est une décision totalement aberrante, prise sans en mesurer les conséquences à long terme. Elle va considérablement fragiliser EDF", a expliqué Eric Kozlowski, délégué syndical CFE-CGC à la centrale nucléaire de Golfech.
Des rassemblements ont eu lieu mercredi devant des centrales nucléaires, comme à Gravelines (Nord).
"Nous, ce qu'on demande simplement c'est de stopper cet Arenh" (Accès régulé à l'électricité nucléaire historique, le mécanisme qui permet à EDF de vendre son électricité à ses concurrents à bas coût), commentait auprès de l'AFP Franck Redondo, secrétaire du CSE EdF-CNPE de Gravelines.
"Ou alors, on demande à Total, Direct Énergie, toute la clique, (...) d'investir dans le futur électrique français. Parce que c'est facile de recevoir du courant et de le vendre à bas coût mais d'investir en rien", a-t-il ajouté, devant la centrale, où une cinquantaine d’employés étaient réunis derrière une banderole : "Non au sacrifice d’EDF et la concurrence déloyale".
- "Contribuer à la solidarité nationale" -
Le gouvernement, lui, estime qu'en tant que groupe détenu à 84% par l'Etat, il est normal qu'il contribue à l'effort pour limiter la hausse des tarifs.
Le patron des députés LREM Christophe Castaner a dit sur France 2 ne pas comprendre cette grève, "parce que quand vous avez la fierté d'être dans une entreprise publique comme EDF, vous assumez aussi de contribuer à la solidarité nationale".
Sans les décisions gouvernementales, les tarifs réglementés auraient bondi de 45% le 1er février, selon le régulateur, qui calcule des hausses annuelles en fonction des prix du marché.
Fait rare, cette mesure a ému jusqu'aux plus hautes sphères de l'entreprise: dans un message interne aux cadres d'EDF, le PDG Jean-Bernard Lévy a vivement critiqué la décision du gouvernement, un "véritable choc", qu'il a "combattue".
Pour les fournisseurs alternatifs d'électricité, premiers bénéficiaires de cette mesure, il est "logique que les consommateurs français bénéficient de la rente du nucléaire car ils ont financé ce parc nucléaire dans un contexte de monopole public grâce à leurs impôts et leurs factures", a indiqué l'Anode, qui regroupe ces entreprises.
(F.Schuster--BBZ)