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Entre interrogations sur la rémunération du PDG Alexandre Bompard, sur le modèle social du distributeur ou sur l'efficacité de sa lutte contre le réchauffement climatique, l'assemblée générale du seul distributeur du CAC 40, Carrefour, promet d'être animée vendredi matin à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis).
Comme chaque année, le géant de la distribution rassemble ses actionnaires aux Docks de Paris, en proche banlieue nord. Et comme les années précédentes, les organisations syndicales seront de la partie. La CFDT a annoncé jeudi dans un communiqué qu'elle prévoyait de "porter la voix des salariés" devant les actionnaires.
"Hasard du calendrier, le même jour, une première audience" de pure forme "aura lieu au tribunal judiciaire d'Evry" après une assignation de la branche services de la CFDT contre Carrefour "pour pratique abusive de la location-gérance et de la franchise", a-t-elle exposé.
La CFDT reproche à Carrefour l'externalisation de plus de 300 magasins et 23.000 salariés via la cession à des tiers, franchisés ou locataires-gérants.
Passer les magasins en franchise ou en location-gérance permet au distributeur de conserver sa part de marché commerciale tout en se libérant d'un certain nombre de dépenses, à commencer par les salaires. Mais cela n'est pas sans conséquence pour les salariés.
Le distributeur défend cette politique qui permettrait d'éviter les fermetures pour les magasins les moins rentables, de relancer l'activité et de préserver l'emploi.
- "Champion olympique de la casse sociale" -
De son côté, la CGT a fait de son PDG le "champion olympique de la casse sociale" - Carrefour est l'un des importants sponsors des JO-2024 - et retient qu'il gagne 426 fois plus qu'un employé du groupe.
Ce chiffre est issu d'un rapport de l'ONG Oxfam, qui a récemment épinglé le distributeur comme l'un des groupes les plus "inégalitaires".
Carrefour conteste le calcul de l'association qui rapporte la rémunération de M. Bompard à celle des 334.000 salariés à travers le monde - dont une majorité au Brésil -, malgré des "écarts de pouvoir d'achat" entre pays.
En outre une part de la rémunération du dirigeant prendra la forme d'actions gratuites délivrées ultérieurement et sous critère de performances.
Pour 2023, il touchera, dans la continuité des années précédentes et si l'assemblée générale donne son feu vert vendredi, au moins 4,5 millions d'euros pour 2023, plus jusqu'à 5,3 millions d'euros en actions ultérieurement.
La rémunération du dirigeant pour 2024, également soumise au vote, prévoit une part fixe inchangée (1,6 million d'euros) et une part variable, sous critères de performance, pouvant aller jusqu'à 190% de cette part fixe (3,04 millions d'euros). Un plan à long terme en actions est également prévu, à hauteur "55% de la rémunération globale maximum".
L'assemblée générale permettra de connaître l'opinion des actionnaires, qui n'avaient entériné la rémunération d'Alexandre Bompard qu'avec réticence un an plus tôt.
Carrefour indique dans sa communication financière avoir pris en compte la grogne montante et prévoit de présenter vendredi "une structure de rémunération qui réponde aux principales préoccupations des actionnaires".
- Engagements climatiques -
Ces derniers devront également se prononcer sur l'entrée au conseil d'administration de Marguerite Bérard, inspectrice des finances qui était depuis 2019 et jusqu'à la mi-mars à la tête des activités de détail en France de BNP Paribas. Et entériner l'arrivée comme administrateur d'Eduardo Rossi, en remplacement du milliardaire brésilien Abilio Diniz, décédé mi-février.
Dernier point: Carrefour devrait être interrogé, par écrit cette fois, sur son déréférencement par la SBTi (Science Based Targets initiative), le principal label pour évaluer les engagements climatiques des entreprises, quant aux objectifs d'atteindre zéro émission nette à horizon 2050.
Quelque 200 entreprises internationales ont ainsi été déréférencées au motif qu'elles n'ont "pas étayé leurs engagements" "avec des objectifs précis" dans le délai imparti, indique l'ONG en pointe sur le sujet, Carbon Market Watch.
"Carrefour maintient et confirme son engagement auprès du SBTi", mais dit rendre compte "de ses données uniquement sur des temporalités qu'il maîtrise et peut mesurer", avait commenté fin avril le groupe auprès d'un journaliste de l'AFP.
(F.Schuster--BBZ)