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L'Afrique du Sud attend fébrilement jeudi les résultats des élections législatives tenues la veille, les premières tendances encore partielles laissant entrevoir un recul historique de l'ANC au pouvoir depuis trente ans.
Avec 22% des votes comptabilisés à 15H00 GMT, le Congrès national africain (ANC) se plaçait sous la barre fatidique des 50% avec 43,5% des suffrages exprimés, selon la Commission électorale (IEC).
Le plus grand parti d'opposition (Alliance démocratique, DA, centre libéral) cumulait moins de 25%. Les radicaux de gauche des Combattants pour la liberté économique (EFF) rassemblaient près de 9% des voix et le petit parti Umkhonto We Sizwe (MK) du sulfureux ex-président Jacob Zuma un peu plus de 8%.
Les résultats définitifs ne sont pas attendus avant le week-end.
"Habituellement, 80% des résultats sont compilés dans les premières 24 heures" suivant la clôture des bureaux de vote, a précisé l'IEC lors d'une conférence de presse, évoquant toutefois "des retards".
Ces résultats partiels reflètent pour l'instant les prévisions des experts et enquêtes d'opinion des dernières semaines.
Après trente ans d'une loyauté sans faille à l'égard de l'ANC, qui a libéré l'Afrique du Sud du régime raciste de l'apartheid, les électeurs devraient faire perdre, pour la première fois, au parti de Nelson Mandela sa majorité absolue au Parlement.
Pour nombre des 62 millions de Sud-Africains, le parti qui avait promis aux premières élections multiraciales en 1994 l'éducation, l'eau et un toit pour tous, n'a pas tenu ses engagements: la criminalité atteint des records, la pauvreté et les inégalités vont croissant.
Le quotidien est aussi rongé par des coupures d'eau et d'électricité. Et les affaires de corruption impliquant ses hauts responsables a fini d'entamer une confiance déjà mise à mal.
Les Sud-Africains étaient appelés à désigner leurs 400 députés, qui éliront ensuite le président.
- "Plus besoin de l'ANC "-
Dans le centre de Johannesburg, des télévisions allumées dans les boutiques font défiler en direct tendances et projections au lendemain du scrutin. Les clients affairés passent en jetant un rapide coup d'œil.
"J'ai bon espoir que l'ANC se rendra compte qu'on n'a plus besoin de lui", dit à l'AFP Shaun Manyoni, un étudiant de 21 ans.
Dans la province zouloue (KZN, est) et bastion traditionnel de l'ANC où l'armée est déployée jeudi, le MK est pour le moment en tête avec plus de 43% des voix contre 21% pour l'ANC.
"Ma mère et moi avons voté MK", lance bravache Londi Mbatha, 20 ans. "Avec l'ANC, le chômage n'a fait qu'augmenter, la jeunesse et la formation ont été laissées de côté".
"Le MK est vraiment venu grignoter des voix à l'ANC", souligne le professeur en politique Siphamandla Zondi interrogé par l'AFP. De nombreux observateurs prédisent que la province clef, qui rassemble plus de 20% de l'électorat du pays, tombera aux mains de Jacob Zuma.
L'ancien chef d'Etat (2009-2018) de 82 ans, déclaré inéligible quelques jours avant le scrutin, bénéficie encore d'un fervent soutien populaire particulièrement dans son fief du KZN.
L'ANC, qui détient actuellement 230 sièges de députés (57,5%) devrait rester le plus gros parti au Parlement. Mais s'il passait sous la barre des 50% des votes, il devrait se résoudre à nouer des alliances et tenir des négociations pour la formation d'un gouvernement de coalition.
Selon l'analyste politique Susan Booysen, l'ANC devra décider s'il se rapproche des velléités libérales de la DA, qui a promis de "sauver l'Afrique du Sud", ou des demandes "erratiques" de l'EFF.
Le parti au pouvoir devra aussi déterminer s'il est disposé à faire un pacte avec le MK. Les deux mouvements "ont des politiques et des tendances similaires", estime M. Zondi.
Mais le fossé entre Cyril Ramaphosa et Jacob Zuma, ennemis de longue date en politique, sera difficile à combler, selon les experts, qui s'accordent à dire que quelque soit le scenario, l'ANC tout-puissant ressortira affaibli du scrutin.
(U.Gruber--BBZ)