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L'UE a imposé jeudi à titre conservatoire jusqu'à 38% de droits de douane supplémentaires sur les importations de véhicules électriques chinois, avant une décision définitive en novembre, accusant Pékin d'avoir illégalement subventionné ses constructeurs.
Ces nouveaux droits "compensateurs", qui s'ajoutent aux taxes de 10% déjà appliquées par l'Union européenne aux véhicules fabriqués dans les usines en Chine, seront en vigueur à partir de vendredi.
A l'issue d'une enquête antisubventions entamée en octobre, Bruxelles avait annoncé ces nouveaux droits le 12 juin, tout en lançant des discussions avec Pékin pour tenter de résoudre les problèmes et désamorcer les risques de guerre commerciale.
L'exécutif européen a désormais quatre mois pour décider de surtaxes définitives, ce qui laisse ouverte une fenêtre de dialogue avec la Chine. Ces droits définitifs, qui devront être avalisés par les Vingt-Sept, seraient valables cinq ans.
Bruxelles emboîte le pas aux Etats-Unis, qui avaient annoncé mi-mai une hausse des droits de douane sur les véhicules électriques chinois à 100%, contre 25% précédemment.
Championne des moteurs essence et diesel, l'industrie automobile européenne craint de voir ses usines disparaître si elle échoue à endiguer la déferlante annoncée des modèles électriques chinois. Un marché en plein essor alors que l'UE interdira la vente de véhicules neufs à moteur thermique en 2035.
Ayant investi très tôt dans les batteries, la Chine a doublé le Japon l'an dernier comme premier exportateur automobile. Les véhicules électriques venant de Chine représentent près de 22% du marché européen, contre 3% il y a trois ans, selon les estimations du secteur, et les marques chinoises occupent 8% de parts de marché.
Bruxelles estime que les constructeurs chinois "bénéficient de subventions déloyales, ce qui constitue une menace de préjudice économique pour les producteurs européens".
- "Des contacts se poursuivent" -
"Les consultations avec le gouvernement chinois se sont intensifiées ces dernières semaines", avec des échanges entre le commissaire européen Valdis Dombrovskis et le ministre chinois du Commerce Wang Wentao, explique la Commission.
"Des contacts se poursuivent au niveau technique en vue de parvenir à une solution (...) qui réponde de manière adéquate aux préoccupations de l'UE", insiste-t-elle.
Bruxelles imposera des surtaxes de 17,4% au fabricant chinois BYD, 19,9% à Geely et 37,6% à SAIC. Les autres constructeurs seront soumis à un droit supplémentaire moyen de 21% s'ils ont coopéré à l'enquête ou de 37,6% dans le cas contraire.
Ces droits, différents selon les subventions publiques perçues, ne seraient perçus que si des droits définitifs sont institués.
Si elles sont confirmées, les surtaxes seront définitivement adoptées à moins qu'une majorité qualifiée d'Etats membres (15 pays représentant 65% de la population européenne) ne s'y oppose.
Selon l'institut allemand Kiel, ces droits additionnels pourraient réduire de 42% les importations de véhicules électriques venant de Chine, une baisse "largement compensée par l'augmentation des ventes de producteurs européens et d'importations de pays tiers".
Pour autant, à long terme, cela aurait peu d'incidence sur les prix des voitures électriques en Europe, prévient-il, table même sur un renchérissement moyen des prix de 0,3 à 0,9%.
-"Effets négatifs"-
Si la France et l'Espagne poussaient activement pour des mesures proportionnées contre Pékin, au contraire l'Allemagne, très engagée en Chine, a bataillé aux côtés de la Suède et de la Hongrie pour éviter des sanctions dans ce dossier, craignant des représailles.
Les constructeurs automobiles allemands Audi, BMW, Mercedes et Volkswagen réalisent près de 40% de leurs ventes mondiales en Chine. "Les effets négatifs de cette décision l'emportent sur les avantages possibles", a déploré Volkswagen jeudi.
Pékin avait déjà fustigé "un comportement purement protectionniste" de l'Europe et menacé de mesures de rétorsion. La Chine a annoncé en janvier une enquête visant les eaux-de-vie de vin importées de l'UE, dont le cognac. Le vin, les produits laitiers, le porc et les voitures à grosses cylindrées seraient aussi dans le viseur, selon la presse étatique chinoise.
Cette nouvelle passe d'armes s'inscrit dans un contexte plus large de tensions commerciales entre les Occidentaux et le géant asiatique, également accusé de détruire la concurrence dans d'autres secteurs comme les éoliennes, les panneaux solaires ou les batteries.
Ces droits "compensateurs" permettront de freiner les importations de véhicules électriques chinois sans les bloquer complètement, se défend l'UE, affirmant se conformer aux règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
Bruxelles espère ainsi protéger une filière qui emploie 14,6 millions de salariés dans l'UE tout en évitant un conflit mortifère avec son deuxième partenaire économique derrière les Etats-Unis.
(F.Schuster--BBZ)