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Depuis le début de l'épizootie de grippe aviaire en novembre, 16 millions de volailles ont été abattues en France, a indiqué lundi le ministère de l'Agriculture, un nombre d'abattages record fragilisant l'ensemble de la filière.
"Le pic épidémique a été passé à la fin du mois de mars et l'épizootie décélère", a cependant relevé le ministère.
Depuis le premier cas recensé dans le nord de la France fin novembre, 1.364 élevages ont été contaminé par le virus, dont 857 foyers recensés en Vendée et dans les départements limitrophes, où les autorités vident les élevages via des abattages massifs d'animaux malades mais aussi sains, de façon préventive.
D'ordinaire, les crises liées à la grippe aviaire restent globalement circonscrites au Sud-Ouest, en particulier aux élevages de canards destinés à la production de foie gras. L'an dernier, près de 500 foyers avaient été recensés dans des élevages et 3,5 millions d'animaux, essentiellement des canards, abattus.
Mais pour la première fois, les oiseaux sauvages ont contaminé cette année des élevages lors de la remontée de leur migration des pays du Sud, ce qui a entraîné une deuxième vague, en train de prendre fin.
Des oiseaux qui ont hiverné en Afrique, dans le sud de l'Europe ou du bassin méditerranéen "sont remontés avec une très forte contamination, suffisante pour contaminer les environnements des élevages", a expliqué Gilles Salvat, directeur général délégué au pôle recherche de l'agence sanitaire (Anses).
"On a longtemps dit que la période à risque était du 15 novembre au 15 janvier", remarque M. Salvat. "Si la migration remontante est aussi massivement contaminée dans les années qui viennent, la période à risque va s'étendre sur presque la moitié de l'année et c'est un vrai problème, notamment pour les volailles élevées en plein air."
Ces crises à répétition génèrent des coûts considérables pour les professionnels, en raison des arrêts de production et la fermeture de marchés à l'exportation, et pour l'État qui indemnise les éleveurs pour les animaux abattus et les pertes économiques induites.
- Une lente remise en production -
Lorsqu'un élevage est décimé, il faut compter "un temps de décontamination obligatoire de 21 jours consécutifs de totale détection du virus dans une zone complètement dépeuplée et désinfectée" avant de pouvoir le repeupler, explique Loïc Coulombel, vice-président de l'interprofession de l'oeuf (CNPO).
Ensuite, "la zone passe au stade de la +surveillance+ et il faut encore attendre trois semaines supplémentaires", ajoute Christophe Labour, responsable syndical FNSEA dans les Pays de la Loire, qui produit des poules et des dindes.
Pour les éleveurs, chaque jour de vide sanitaire est un manque à gagner, malgré les indemnités versées par le gouvernement.
Selon les estimations de l'interprofession de la volaille (Anvol), la zone Pays de la Loire représente par exemple environ "5 millions de volailles toutes espèces confondues (canards, poulets, pigeons, pintades, etc...) par semaine en temps normal".
Depuis novembre, la grippe aviaire a engendré une perte "d'environ 6% de la production nationale d'oeufs dans un pays en auto-suffisance à 101%" a quant à lui relevé Loïc Coulombel, vice-président de l'interprofession des oeufs (CNPO).
Le prix des oeufs a déjà augmenté de 13% entre février et mars et de 63,3% entre mars 2021 et mars 2022, à cause d'une très forte augmentation du coût de production liée à la guerre en Ukraine, selon l'indice des prix agricoles de l'Insee.
L'équivalent de la population de volailles abattues au cours de l'épisode de grippe aviaire ne pourra pas être remis en production avant l'été prochain, estiment les professionnels du secteur. Il faudra même attendre la fin de l'année, voire le début de l'année prochaine pour retrouver l'ensemble de la production perdue, à condition qu'un nouvel épisode de grippe aviaire n'éclate pas à l'automne.
(L.Kaufmann--BBZ)