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Les Nations unies ont exprimé mardi leur inquiétude face à ce qu'elles considèrent comme un "climat de peur" au Venezuela, où les députés doivent examiner des lois jugées liberticides par l'opposition, qui revendique la victoire à la présidentielle.
Le Conseil national électoral (CNE) a ratifié le 2 août la victoire fin juillet du président sortant Nicolas Maduro avec 52% des voix, sans publier le décompte exact et les procès-verbaux des bureaux de vote, assurant avoir été victime d'un piratage informatique.
Selon l'opposition, qui a publié les procès-verbaux obtenus grâce à ses scrutateurs, son candidat Edmundo Gonzalez Urrutia a remporté l'élection avec 67% des voix, un résultat rejeté par M. Maduro.
L'annonce de la réélection de ce dernier a provoqué des manifestations spontanées, avec un bilan de 25 morts, 192 blessés et 2.200 arrestations de source officielle.
"Il est particulièrement troublant que tant de personnes soient détenues, accusées ou inculpées pour incitation à la haine ou en vertu de la législation antiterroriste", a affirmé mardi le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits humains, Volker Türk, dans un communiqué.
Citant des sources officielles, l'ONU indique que plus de 2.400 personnes ont été arrêtées depuis le 29 juillet, lendemain du scrutin.
M. Türk a demandé la "libération immédiate" de toutes les personnes détenues arbitrairement et un "procès équitable pour tous les détenus".
- Climat de peur" -
"Dans un climat de peur, il est impossible de mettre en oeuvre les principes démocratiques et de protéger les droits humains", a ajouté sa porte-parole, Ravina Shamdasani, lors d'un point de presse.
Cet avertissement survient au lendemain d'un appel à la fermeté de M. Maduro, qui a exigé que les services de l'Etat agissent avec une "main de fer" après les troubles qui ont suivi la proclamation de sa réélection.
Le dirigeant a estimé que le diplomate Edmundo Gonzalez Urrutia et la cheffe de l'opposition Maria Corina Machado, qui vivent dans la clandestinité depuis une dizaine de jours, devraient être "en prison".
L'opposition, qui n'a jusqu'à présent organisé qu'une seule mobilisation, le 3 août, a appelé à de grandes manifestations samedi prochain.
L'Assemblée nationale, contrôlée par le pouvoir, a interrompu ses vacances pour voter à partir de mardi une batterie de lois, dont certaines sont considérées comme liberticides par l'opposition.
"Nous allons (...) approuver un ensemble de lois que vous (M. Maduro) avez demandées pour pouvoir défendre notre population contre la haine", a affirmé le président de l'Assemblée nationale Jorge Rodriguez lors d'une réunion lundi du Conseil de défense et de l'Etat.
Il promet une régulation des réseaux sociaux, une loi pour punir le "fascisme" - un terme utilisé régulièrement par le pouvoir pour désigner l'opposition - et une sur la surveillance et le financement des ONG. Cette dernière, en préparation depuis des mois, figure en tête de l'ordre du jour mardi.
"Il existe de nombreuses organisations non gouvernementales qui servent de couverture au financement d'actions terroristes", a assuré M. Rodriguez.
"J'exhorte les autorités à s'abstenir d'adopter ces lois et toute autre loi qui porte atteinte à l'espace civique et démocratique dans le pays", a réagi M. Türk, également préoccupé par le fait que certaines personnes ont vu leur passeport "suspendu".
- "Apologie du fascisme" -
L'issue du vote ne fait pas de doute, 256 des 277 députés soutenant le pouvoir, l’opposition ayant boycotté les législatives de 2020.
Autre axe de travail de l'Assemblée nationale: "le fonctionnement des réseaux sociaux".
Depuis l'élection, M. Maduro les attaque régulièrement, assurant qu'ils tentent de déstabiliser le pays et de mettre en doute la validité de sa réélection. Il a notamment fait suspendre X pour 10 jours, après avoir accusé son propriétaire Elon Musk d'incitation à la haine et au fascisme. Il a aussi lancé une campagne de boycott de Whatsapp.
Dans le même ordre d'idées, le parlement va se pencher sur un projet de "loi contre le fascisme, le néofascisme et les expressions similaires".
La loi, réclamée par M. Maduro en avril, a déjà été approuvée en première lecture mais la deuxième lecture avait été repoussée.
Le texte sanctionne la promotion de réunions ou de manifestations faisant "l'apologie du fascisme". Il propose également l'interdiction des partis politiques et des amendes pouvant aller jusqu'à 100.000 dollars pour les entreprises, les organisations ou les médias qui financent des activités ou diffusent des informations qui "incitent au fascisme".
Mais "pratiquement tout est fascisme" pour le pouvoir, soulignait Alí Daniels, avocat et directeur de l'ONG Access to Justice, à l'AFP en mai.
(L.Kaufmann--BBZ)