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Michel Barnier va tenter dimanche soir de répondre aux critiques sur son gouvernement, attelage fragile entre les macronistes et Les Républicains, le député Eric Ciotti, rallié au RN, annonçant de son côté qu'il quitte LR et sa présidence.
A peine formée, l'équipe gouvernementale est déjà marquée par des tensions avec les députés du bloc central et sous la menace de la gauche et du Rassemblement national.
Une motion de censure sera déposée par la gauche juste après la déclaration de politique générale du Premier ministre, prévue le 1er octobre, a déclaré sur France 3 le patron du PS Olivier Faure. Il a toutefois relevé qu'elle ne serait sans doute pas votée par le Rassemblement national et était "vraisemblablement vouée à l'échec".
Le RN attend d'en savoir plus sur l'élaboration du budget 2025 pour se prononcer "Nous nous réservons évidemment la possibilité de censurer" à ce moment-là, a déclaré sur franceinfo son vice-président Sébastien Chenu.
L'attelage fragile de centre-droit est aussi d'emblée marqué par les tensions entre le Premier ministre et le bloc central du président, qui gouvernait sans partage depuis sept ans.
Le groupe macroniste à l'Assemblée restera "fidèle à ses valeurs et libre dans ses prises de positions", a déclaré Gabriel Attal, chef de file des députés Ensemble pour la République (EPR, ex-Renaissance), lors d'une réunion avec ses troupes.
L'ex-Premier ministre demande à son successeur "d'affirmer clairement dans sa déclaration de politique générale qu'il n'y aura pas de retour en arrière sur la PMA, le droit à l'IVG, les droits LGBT", faisant état de "désaccords de fond avec certaines personnalités", selon des participants.
- "éloignée de l'opinion" -
En cause notamment, l'arrivée au ministère de l'Intérieur du LR Bruno Retailleau, au profil très conservateur sur les sujets de société et très ferme sur l'immigration.
L'entrée au gouvernement (secrétaire d'Etat à la Consommation) de la sénatrice Les Républicains Laurence Garnier, opposée au mariage homosexuel et à la constitutionnalisation de l'IVG, fait aussi grincer des dents, tout comme celle du LR Patrick Hetzel à l'Enseignement supérieur.
C'est le gouvernement "le plus à droite de la Ve République", a dénoncé Olivier Faure.
Au sein de LR, c'est "une branche conservatrice, catholique (...) qui tire son épingle du jeu", relève le politologue Vincent Martigny. "C'est une surprise (...) c'est celle qui est la plus éloignée a priori de l'opinion".
Comment Michel Barnier peut-il essayer de déminer le terrain ? Sa première interview depuis la formation de son gouvernement au 20H00 sur France 2 sera particulièrement scrutée.
Quant au député Eric Ciotti, que Les Républicains tentaient en vain d'exclure depuis son alliance avec le RN aux législatives, il a annoncé quitter le parti et sa présidence. "Il ne sera plus possible de travailler avec ceux qui sont dans le gouvernement d’Emmanuel Macron", "une équipe compromise", a-t-il déclaré dans un entretien au Figaro.
Même si une première passation de pouvoir se tiendra dimanche en fin d'après-midi à Bercy, les premiers pas officiels des 39 nouveaux ministres n'auront lieu que lundi, avec un petit-déjeuner à Matignon, leur prise de fonction dans leur ministère, puis un Conseil des ministres à 15H00 à l'Elysée autour d'Emmanuel Macron.
- Contexte très tendu -
L'élaboration du budget, qui a déjà pris un retard inédit, est l'urgence numéro un dans un contexte très tendu. Signe de son importance, Michel Barnier a voulu garder un oeil sur ce dossier explosif en mettant sous sa tutelle directe le ministre macroniste des Comptes publics Laurent Saint-Martin.
Exclure "d'office certains prélèvements exceptionnels et ciblés ne serait pas responsable" vu l'état des finances publiques, a estimé dans le Journal du dimanche le nouveau ministre de l'Economie et des Finances, le jeune macroniste Antoine Armand.
"Au travail et au Travail, dans le respect, dans l’écoute": Astrid Panosyan-Bouvet a, elle, joué sur X la carte de l'humilité dans ses premiers mots de ministre alors qu'elle devrait hériter de l'épineux dossier de la réforme des retraites, toujours très contestée, et de la réforme de l'assurance chômage, en suspens.
Chez les entrants, la principale surprise est la députée Renaissance Anne Genetet à l'Education, plutôt connue sur les questions de défense.
Les syndicats enseignants tirent déjà à boulets rouges sur la ministre, "une erreur de casting au regard des enjeux pour l'école" pour Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU. En "colère", Guislaine David, secrétaire générale de la FSU-Snuipp, déplore la nomination d'un "clone de Gabriel Attal pour continuer la politique engagée".
Seule prise venue de la gauche, alors qu'Emmanuel Macron prônait un gouvernement de "rassemblement" et que Michel Barnier s'est évertué à attirer des sociaux-démocrates: Didier Migaud à la Justice.
Mais l'ex-député socialiste a quitté la politique active depuis 2010. "Ce n'est plus une personnalité qu'on peut considérer de gauche", a balayé sur France bleu Limousin François Hollande, taclant un gouvernement "déjà brinquebalant".
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(A.Lehmann--BBZ)