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Le taux de participation s'est établi à près de 28% lors de l'élection présidentielle de dimanche en Tunisie, dans un scrutin où le président Kais Saied est donné favori pour une réélection après l'élimination de ses concurrents les plus sérieux.
Le président de l'autorité électorale Isie, Farouk Bouasker, a jugé ce taux de 27,7% "respectable", alors qu'il s'agit de la participation la plus faible pour un premier tour de scrutin présidentiel depuis l'avènement de la démocratie en 2011 dans ce pays, berceau des Printemps arabes. En 2019, environ 45% des électeurs avaient participé au vote.
Des sondages à la sortie des urnes seront annoncés à 19H00 GMT sur la télévision nationale Wataniya mais les résultats préliminaires officiels sont prévus lundi, selon l'Isie.
Une heure avant la fermeture, des électeurs continuaient d'arriver dans des bureaux du centre de Tunis, mais l'affluence était moindre que le matin.
"Le rythme a baissé à mi-journée puis a repris dans l'après-midi. Mais celui de la matinée reste le plus élevé", a indiqué à l'AFP Nouredine Jouini, président d'un bureau de la rue de l'Inde.
"Je suis venu soutenir Kais Saïed, toute la famille va voter pour lui", déclarait à l'ouverture Nouri Masmoudi, 69 ans. Le matin, les électeurs étaient surtout d'âge mur ou âgés, alors que l'après-midi, on notait davantage de femmes mais très peu de jeunes.
M. Saied a voté avec son épouse dans le quartier aisé d'Ennasr.
- Le "moins pire" -
Le président sortant affrontait deux concurrents: Zouhair Maghzaoui, 59 ans, un ex-député de la gauche panarabiste, et Ayachi Zammel, 47 ans, un industriel libéral inconnu du grand public, qui n'a pas pu faire campagne car il est emprisonné depuis début septembre et sous le coup de trois condamnations à plus de 14 ans de prison pour des soupçons de faux parrainages.
En votant dans le centre ville, Hosni Abidi, 40 ans, a dit craindre une manipulation des urnes: "Je ne veux pas qu'on choisisse à ma place, je veux cocher moi-même la case de mon candidat".
Porteur d'un projet de gauche souverainiste similaire au président Saied et considéré comme "un faire-valoir", M. Maghzaoui a appelé les Tunisiens "à voter en masse", en déposant son bulletin tout sourire sous les flashs des photographes.
Wajd Harrar, une étudiante de 22 ans, "trop jeune pour voter" il y a cinq ans estime qu'à l'époque, "les gens ont choisi un mauvais" président et a dit vouloir "donner sa voix au moins pire des candidats".
Le président Saied "a verrouillé le scrutin" et devrait le "remporter haut la main", affirme l'expert de l'International Crisis Group, Michaël Ayari.
La sélection même des candidats a été contestée pour le nombre élevé de parrainages exigé, l'emprisonnement de candidats potentiels connus, et l'éviction par l'Isie des rivaux les plus solides du président.
M. Saied, élu en 2019 avec près de 73% des voix (et 58% de participation), était encore populaire quand ce spécialiste de droit constitutionnel à l'image d'incorruptible s'est emparé des pleins pouvoirs à l'été 2021, promettant l'ordre face à l'instabilité politique.
Trois ans plus tard, beaucoup de Tunisiens lui reprochent d'avoir consacré trop d'énergie à régler ses comptes avec ses opposants, en particulier le parti islamo-conservateur Ennahdha, dominant pendant la décennie de démocratie ayant suivi le renversement du dictateur Ben Ali en 2011.
- "Nouvelle Tunisie" -
Depuis 2021, les ONG tunisiennes et étrangères et l'opposition, dont les figures de proue ont été arrêtées, dénoncent une "dérive autoritaire" de M. Saied, via un démantèlement des contrepouvoirs et un étouffement de la société civile avec des arrestations de syndicalistes, militants, avocats et chroniqueurs politiques.
Selon Human Rights Watch, "plus de 170 personnes sont actuellement détenues pour des motifs politiques ou pour avoir exercé leurs droits fondamentaux".
Le président Saied jouit encore "d'un soutien non négligeable dans les classes populaires", selon M. Ayari, mais il est "critiqué pour son incapacité à sortir le pays d'une profonde crise économique".
Avant le vote, M. Saied a promis une "traversée (...) vers une nouvelle Tunisie" dans les cinq ans à venir, après un premier mandat consacré à lutter "contre les forces du complot sous influences étrangères" ayant "infiltré de nombreux services publics et perturbé des centaines de projets".
(Y.Yildiz--BBZ)