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C'est une variété de riz aromatisé utilisée en Irak pour préparer les plats traditionnels. Mais dans un pays frappé par la sécheresse et une chute drastique des réserves en eau, le riz ambre lutte pour sa survie.
"Depuis que je suis enfant, je plante le riz ambre", confie Abou Rassoul, près d'une rigole quasi-asséchée, irriguant en temps normal ses deux hectares de terre dans la province centrale de Najaf, près du village d'Al-Abassiya.
"C'est avec l'eau que nous pouvons planter chaque année (...) On vit de cette terre", plaide l'agriculteur au visage buriné.
Après trois années de sécheresse et une chute des précipitations, cette saison la culture du riz ambre, qui tient son nom de son arôme, similaire à celui de la résine d'ambre, sera symbolique.
En principe, les champs plantés dès la mi-mai doivent rester immergés tout l'été. Un luxe que l'Irak ne peut plus se permettre.
Les réserves en eau du pays disponibles sont actuellement "bien en deçà de notre seuil critique de 18 milliards de mètres cubes", explique à l'AFP le responsable des ressources hydriques de Najaf, Chaker Fayez Kadhim.
Or les rizières drainent entre 10 à 12 milliards de mètres cubes d'eau pendant la période de culture jusqu'à la récolte en octobre, souligne-t-il. "Difficile de cultiver le riz à Najaf ou dans d'autres provinces, en raison de la consommation élevée en eau".
Auparavant, plus de 70% du riz ambre était cultivé à Diwaniya et dans les provinces voisines de Najaf.
Début mai les autorités ont limité les superficies des cultures: seuls 10.000 donums de riz (un millier d'hectares) y seront cultivés, selon le ministère de l'Agriculture, contre 350.000 donums en temps normal.
- Menacé de disparition -
Les consommateurs devront recourir à des variétés importées pour préparer le traditionnel Qouzi, viande de mouton servie avec du riz, ou encore le mansaf et les dolmas, légumes farcis.
L'Irak produisait annuellement jusqu'à 300.000 tonnes de riz, selon Mohamed Chasseb, haut responsable au département de la planification du ministère de l'Agriculture.
Surnommé en arabe le "pays des deux fleuves" -le Tigre et l'Euphrate- l'Irak voit depuis des années ses ressources en eau diminuer. Bagdad ne cesse de dénoncer ses voisins, Turquie et Iran en tête, qui construisent en amont des barrages et réduisent le débit.
Celui de l'Euphrate représente actuellement 30% de ce qu'il était en temps normal, selon M. Khadim, qui réclame une "action politique".
"Il y a un risque de voir disparaître la culture du riz en raison du manque d'eau", avertit le président des associations paysannes de Najaf, Ahmed Hassoun.
L'ingénieur agricole de 51 ans fustige la responsabilité des autorités: "Nous savons que l'Irak sera privé de pluies dans les années à venir". Malgré cela, rien n'a été fait pour "moderniser les systèmes d'irrigation".
"Le gouvernement n'a que faire de l'agriculture. Il a transformé l'Irak en marché pour tous les pays voisins", regrette M. Hassoun, en référence aux importations agricoles, iraniennes et turques notamment, qui inondent l'Irak.
- "Gagne-pain" -
En 2021, la Banque mondiale enregistrait une contraction de 17,5% de l'activité agricole en Irak, après notamment de "sévères sécheresses".
L'enjeu est de taille pour ce pays ultra-dépendant de la rente pétrolière qui veut diversifier son économie: l'agriculture représente 20% des emplois et est le second plus gros contributeur au PIB (5%), immédiatement derrière le pétrole.
"Ce qu'on veut c'est que l'Etat s'intéresse aux agriculteurs", témoigne Jassem Zaher à Najaf, dénonçant notamment les retards dans les paiements quand l'Etat est acheteur.
Le sexagénaire cultive aussi le riz ambre: "On n'a pas d'autres cultures, c'est le gagne-pain du paysan".
Cette année, la tonne de riz est vendue par les agriculteurs au ministère du Commerce 750.000 dinars irakiens, soit 500 dollars la tonne.
Outre les agriculteurs, c'est tout un écosystème qui est menacé.
Il y a notamment les dizaines de petits ateliers traditionnels, les "majracha", où le riz est trié et purifié avant sa commercialisation.
Dans l'atelier d'Adel al-Haj Ghafel à Najaf, deux ouvriers armés de pelle s'activent pieds nus au milieu de monticules de riz. Les grains sont versés dans de gros récipients métalliques et passent par plusieurs tamis pour éliminer toute impureté.
"On dépend totalement des agriculteurs", dit le quadragénaire qui a hérité son activité de son père.
Il résume simplement: "S'il n'y a pas de culture, on fermera les ateliers et on attendra l'année prochaine, avec l'espoir qu'ils vont planter."
(O.Joost--BBZ)