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Pour éviter au gouvernement allemand de sombrer "au pire moment", Olaf Scholz réunit mercredi les ténors de sa coalition qui s'empoignent sur la politique économique mais que l'élection de Donald Trump pourrait ressouder.
Les pourparlers organisés toute la journée à la chancellerie étaient prévus avant la présidentielle américaine mais la victoire choc du leader républicain va inévitablement s'inviter à l'ordre du jour.
Le sort de la coalition composée des sociaux-démocrates (SPD), des écologistes et des libéraux (FDP) ne tient qu'à un fil après des mois de querelles sur le cap économique et budgétaire à donner à l'Allemagne, enlisée dans une crise industrielle.
Les responsables de la majorité, qui se rencontrent dans la soirée, vont pouvoir méditer sur les conséquences de l'élection aux Etats-Unis et se demander s'il serait raisonnable de laisser leur pays sans direction dans une période aussi décisive.
"C'est le pire moment pour que le gouvernement échoue", a averti en début de semaine le vice-chancelier écologiste et ministre de l'Economie Robert Habeck.
- "Monde changé" -
La victoire de Donald Trump pourrait contraindre la coalition à resserrer les rangs, compte-tenu des défis liés à un nouveau mandat du milliardaire adepte des outils protectionnistes et des confrontations diplomatiques.
"Si Trump gagne, tout porte à croire qu'il n'y aura pas de nouveau gouvernement en Allemagne", affirmait à l'AFP la politologue Ursula Münch, avant l'issue de la présidentielle.
Le résultat des élections américaines "va changer le monde", a prévenu mercredi le chef du SPD Lars Klingbeil, appelant à trouver des compromis car "nous ne pouvons pas nous permettre maintenant des semaines de négociations au sein du gouvernement".
L'Allemagne a besoin d'un nouvel exécutif uni et déterminé, capable de parler à Donald Trump "d'égal à égal, avec des concepts clairs", a au contraire plaidé l'un des responsables de l'opposition conservatrice CDU/CSU Jens Spahn, qui souhaite de nouvelles élections.
Les ruptures de coalition sont très rares en Allemagne et Olaf Scholz semble vouloir mener la sienne jusqu'aux prochaines législatives prévues pour le 28 septembre 2025.
Il a appelé ses partenaires à faire preuve de "pragmatisme" et non d'"idéologie" pour "relever le défi".
Autre argument contre des élections anticipées : les conservateurs sont largement en tête dans les sondages et leur chef, Friedrich Merz, deviendrait très probablement chancelier. Et le parti d'extrême droite AfD, en forte progression dans les derniers scrutins, se tient en embuscade.
- "Automne des décisions" -
Mais le fossé entre les partis de la coalition est devenu plus évident ces derniers jours, avec la fuite d'un document du ministre des Finances Christian Lindner (FDP) dont les propositions en vue d'un "tournant économique" libéral vont à l'encontre de la ligne centriste jusqu'à présent suivie par le gouvernement.
Les désaccords se concentrent sur les solutions pour relancer la première économie européenne qui risque d'être en récession pour la deuxième année consécutive.
Les sociaux-démocrates d'Olaf Scholz tentent de préserver leur priorités sociales ; les Verts de Robert Habeck font pression pour lutter contre le changement climatique malgré les coûts de la transition tandis que les libéraux sont arc-boutés sur le respect des limites constitutionnelles drastiques de l'Allemagne en matière de déficits budgétaires et de dette.
Christian Lindner réclame aussi la fin d'un "impôt de solidarité" instauré en 1991, initialement pour financer le coût de la Réunification de l'Allemagne, et l'abandon par son pays de ses objectifs sur le climat plus ambitieux que ceux fixés par l'Union européenne.
Il a qualifié la période actuelle d'"automne des décisions", laissant entendre que son parti pourrait quitter la coalition s'il n'obtenait pas gain de cause.
"Ne rien faire n'est pas une option", a-t-il déclaré à la veille des discussions de mercredi.
La guerre des nerfs pourrait aussi se poursuivre jusqu'à la semaine prochaine, lorsque le gouvernement devra boucler son projet de budget 2025.
Selon l'analyste Carsten Brzeski, de la banque ING, "le gouvernement allemand vient d'entrer dans la nouvelle phase d'une crise politique à combustion lente qui pourrait être la dernière étape avant l'effondrement final de la coalition gouvernementale".
(T.Burkhard--BBZ)