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Les députés ont repris mercredi les débats en séance sur la partie recettes du budget de l'Etat, la gauche engrangeant à nouveau les victoires sur le camp gouvernemental, qui a remis en cause la crédibilité des mesures adoptées.
Le scénario était le même en commission des Finances, où les députés poursuivaient en parallèle l'examen de la partie "dépenses" de ce budget, qui devrait s'achever mardi. Mais déjà la gauche se vante d'avoir "totalement transformé" des pans entiers de la copie initiale présentée par l'exécutif.
"Le budget du gouvernement est complètement détricoté et c'est plutôt le notre qui prend le relais", s'est ainsi félicité l'Insoumis Eric Coquerel, quand le socialiste Boris Vallaud s'est targué d'avoir "pris au mot le Premier ministre" Michel Barnier qui avait "demandé d'améliorer ce qu'il posait sur le bureau de l'Assemblée".
Bilan contesté par le rapporteur général du budget, le centriste Charles de Courson, qui a ouvert les débats par son chiffrage des amendements adoptés précédemment: 30 milliards d'euros de "recettes supplémentaires", dont 23 milliards a priori "contraires au droit européen" ou "à la jurisprudence du Conseil constitutionnel", voire inapplicables car mal rédigés.
Analyse juridique qui prête "à discussion", a tenté de nuancer M. Coquerel, estimant que les défauts d'écriture pourraient être corrigés "au niveau de la navette parlementaire", c'est-à-dire au Sénat.
Dans l'autre sens, M. de Courson a comptabilisé 20 milliards d'euros de pertes de recettes, dont 3 milliards litigieux. Soit au bout du compte "des pertes de recettes nettes de 10 milliards" pour le budget de l'Etat.
M. de Courson a également chiffré à plus de 44 milliards d'euros les nouvelles dépenses votées en commission à l'initiative de la gauche, en particulier sur l'écologie, le logement et l'éducation.
"Nous sommes entrés dans l'ère du n'importe quoi fiscal", a aussitôt rebondi le macroniste Mathieu Lefevre.
- "Epouvante fiscale" -
Pas de quoi impressionner la gauche, qui a fait adopter dans la foulée un "impôt universel" sur les multinationales, inspiré de l'association Attac et de l'économiste Gabriel Zucman. Vote acquis à une large majorité avec les voix du Rassemblement national, face à un bloc central encore très peu mobilisé.
Le ministre du Budget Laurent Saint-Martin n'a pu que déplorer un amendement "totalement inopérant et totalement contraire aux traités et conventions internationales", dont le seul effet sera de "démontrer finalement que la France est un pays d'épouvante fiscale pour les grandes entreprises".
La gauche a ensuite enfoncé le clou avec d'autres taxes sur "les grandes sociétés du numérique" et sur les "superprofits" des "grands groupes", en particulier Total, CMA-CGM et les compagnies d'autoroutes. Elle a également laissé passer - en s'abstenant - un amendement du député RN Franck Allisio contre l'évasion fiscale.
Quand ses troupes ne manquaient pas à l'appel, le gouvernement s'est trouvé confronté à la division de son propre camp. Après un débat acharné sur le crédit impôt recherche (CIR), défendu bec et ongles par les macronistes, la droite et le RN, c'est finalement un amendement venu des groupes MoDem et Horizons qui a raboté - de justesse, par 122 voix contre 120 - la principale niche fiscale française.
Plus modestes et plus consensuels, les crédits d'impôt "collection" (pour le textile) et "innovation" (pour les PME) ont à l'inverse été prorogés sans difficulté jusqu'en 2027.
En fin de séance, plus de 1.200 amendements restaient à discuter avant le vote de la partie "recettes", prévu mardi. Un délai intenable au rythme actuel, puisqu'il faudrait encore plus de 40 heures de débat pour y parvenir, à moins de nouveaux retraits d'amendements, a relevé M. Coquerel.
Si le texte était adopté, les députés pourraient commencer l'examen de la partie "dépenses" du budget de l'Etat, jusqu'au jeudi 21 novembre minuit en raison des délais constitutionnels. En cas de rejet, celui-ci vaudrait pour l'ensemble du texte, qui pourrait poursuivre son parcours législatif au Sénat.
(A.Berg--BBZ)