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Le leader du mouvement de protestation indigène en Equateur, Leonidas Iza, a été arrêté au lendemain de manifestations réclamant une baisse du prix des carburants, au risque de provoquer une "radicalisation" et de possibles violences.
"La police équatorienne a arrêté Leonidas I. à Pastocalle, dans la province de Cotopaxi, pour des délits présumés", ont tweeté mardi les forces de l'ordre sans préciser la nature de ces délits.
Le secteur de Pastocalle, à une vingtaine de kilomètres au sud de Quito, est un des points chauds des protestations du mouvement indigène contre la hausse des prix des carburants.
Le dirigeant indigène doit désormais comparaître devant un tribunal à Latacunga (80km au sud de Quito), selon les autorités.
Mardi, pour le deuxième jour consécutif, les manifestations, pour l'essentiel des barrages et barricades de fortune sur les routes, se sont poursuivies dans au moins onze des 24 provinces du pays, toujours selon les autorités. La police n'a cependant signalé aucun affrontement.
A la sortie sud de la capitale, des branches et des pneus enflammés bloquaient le passage des véhicules, a constaté l'AFP.
La "stratégie" des manifestants consiste à "paralyser, piller, kidnapper et attaquer" afin que "le désordre, le chaos et le vandalisme génèrent des troubles sociaux face à un gouvernement qui tente de créer des opportunités pour les Équatoriens", a accusé mardi le ministre de l'Intérieur, Patricio Carrillo.
Quatre policiers à Quito et un procureur dans la province de Cotopaxi (dont Latacunga est la capitale) ont été temporairement détenus par les manifestants.
- "Sabotage" -
Une vidéo publiée par le ministère de l'Intérieur a montré M. Iza entre les mains de la police, un policier lui annonçant son interpellation pour "sabotage", un crime passible de dix ans de prison.
Leonidas Iza est le président de la Confédération des nationalités indigènes de l'Equateur (Conaie), la plus grande organisation de peuples indigènes, à l'origine de protestations populaires depuis plusieurs semaines.
Elle a confirmé l'arrestation "illégale" de son dirigeant et a appelé à une "radicalisation" de la mobilisation. Elle a ensuite relayée sur les réseaux sociaux sa propre vidéo de l'arrestation de son leader, mouvementée, dans la nuit, par des militaires et des policiers.
Une arrestation "violente", a dénoncé devant la presse son avocat.
M. Iza, un ingénieur agronome de 39 ans, a été élu à la tête de la Conaie en juin 2021. Indigène Kichwa-Panzaleo, il est originaire de la province de Cotopaxi et l'ex-président du "Mouvement indigène et paysan" de cette même province.
Charismatique, aux discours souvent enflammés, il porte toujours un chapeau de feutre noir et un poncho rouge, caractéristique de sa communauté.
L'organisation avait mené de violentes manifestations en octobre 2019 (onze morts) et participé aux soulèvements qui ont renversé trois présidents entre 1997 et 2005.
Les indigènes sont environ un million en Equateur, sur 17,7 millions d'habitants.
Au pouvoir depuis un an, le président Guillermo Lasso a prévenu qu'il n'autoriserait pas le blocage des routes ni l'occupation des puits de pétrole dans la jungle amazonienne où se déroulent également des manifestations.
Dans la nuit sur Twitter, il a justifié les arrestations en réaction à "des actes de vandalisme interdits par la loi et la Constitution". "L'incendie de véhicules de la police, l'invasion d'exploitations agricoles, l'attaque d'une installation pétrolière, la rupture d'adductions d'eau dans les communautés (...)", a-t-il énuméré.
Lundi soir, les autorités n'avaient pourtant fait état d'aucune violence, parlant d'une "situation complètement sous contrôle" et d'une faible mobilisation dans tout le pays. M. Iza avait alors accusé l'exécutif de "minimiser" les manifestations.
La puissante Conaie proteste contre la hausse des prix des carburants mais aussi contre le manque d'emplois, pour un contrôle des prix des produits agricoles, et contre l'octroi de concessions minières dans les territoires autochtones. Elle exige une renégociation des dettes des paysans auprès des banques et un moratoire d'un an sur leur remboursement.
Depuis 2020, le prix du gallon (3,78 litres) de diesel a presque doublé, passant de 1 à 1,90 dollar, et celui de l'essence a augmenté de 46%, de 1,75 à 2,55 dollars. La Conaie, qui a tenu plusieurs réunions avec le gouvernement, demande une baisse des prix respectifs à 1,50 dollar et 2,10 dollars.
(F.Schuster--BBZ)