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Le Sénat, à majorité de droite, a débuté lundi l'examen en première lecture du projet de budget rectificatif, second volet des mesures de soutien au pouvoir d'achat, qui va voir ressurgir la question d'une taxation des "superprofits" de grands groupes.
Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, a d'emblée redit son opposition au "réflexe pavlovien de la taxe", soutenant que les grandes entreprises "doivent participer à l'effort collectif, en rendant l'argent directement aux Français plutôt qu'au Trésor public".
Il s'est en revanche montré réceptif à plusieurs modifications du texte proposées par la majorité sénatoriale, notamment sur les heures supplémentaires.
Poursuite du bouclier tarifaire sur l'énergie et de la remise carburant à 30 centimes le litre en septembre-octobre puis 10 en novembre-décembre, revalorisation du point d'indice des fonctionnaires... Le projet de loi de finances rectificative pour 2022 ouvre 44 milliards d'euros de crédits, dont 9,7 pour financer la renationalisation à 100% d'EDF.
Le ministre chargé des Comptes publics, Gabriel Attal, a vanté "un puissant réacteur (...), moteur d'une stratégie visant à permettre aux Français de dépenser moins et de gagner plus".
Les débats sont attendus au Sénat moins électriques qu'à l'Assemblée nationale, mais la Haute Assemblée n'échappera pas au débat sur la taxation des "superprofits".
Rejetée de peu par les députés, l'idée d'une supertaxe a été relancée par les énormes bénéfices engrangés par TotalEnergies, qui a plus que doublé son bénéfice net au deuxième trimestre, à 5,7 milliards de dollars.
Elle sera portée au Sénat par la gauche mais aussi par le groupe centriste. Son président, Hervé Marseille, entend poser ses "marqueurs", quitte à "diverger" avec LR, première composante de la majorité sénatoriale de droite.
"On a une vision plus sociale que budgétaire", indique-t-il. Son groupe proposera la mise en place d'une contribution exceptionnelle de solidarité sur les superprofits à 20%.
Mais même avec le soutien de toute la gauche, la supertaxe ne devrait pas, sauf surprise, être votée.
Autre point attendu de discussion, la suppression de la redevance audiovisuelle. La gauche s'y oppose et les centristes demandent qu'elle soit différée.
Sans la remettre an cause, le rapporteur général du budget Jean-François Husson (LR) propose de borner au 31 décembre 2024 l'affectation d'une fraction du produit de TVA destinée à assurer le financement de l'audiovisuel public, le temps de mettre en place "une véritable réforme du secteur".
- Coup de pouce aux heures sup -
Le groupe LR va revenir à la charge sur les heures supplémentaires, souhaitant pérenniser la hausse à 7.500 euros du plafond de défiscalisation, votée par l'Assemblée nationale pour 2022.
Le ministre s'est déclaré prêt à la rendre "définitive". En réponse à une autre disposition votée par les sénateurs dans le cadre du projet de loi "pouvoir d'achat", il s'est aussi dit "favorable (...) à ce que les entreprises de 20 à 250 salariés puissent voir leurs charges sociales patronales réduites de 50 centimes par heure supplémentaire travaillée".
Le gouvernement s'est encore montré ouvert au lancement d'une carte Vitale biométrique, à laquelle tient expressément le chef de file des sénateurs LR, Bruno Retailleau, pour lutter contre la fraude.
La chambre des territoires aura par ailleurs à cœur de pousser un peu plus loin le curseur des mesures de soutien aux collectivités, elles aussi touchées par l'inflation, le rapporteur général souhaitant "un filet de sécurité".
En commission, les sénateurs ont encore adopté une enveloppe "exceptionnelle de 40 millions d'euros" pour les banques alimentaires. Et ont remplacé la prime de rentrée exceptionnelle de 100 euros, réservée aux minima sociaux, par une majoration exceptionnelle de 150 euros aux bénéficiaires de la prime d'activité.
S'agissant d'une loi de finances, les amendements votés en commission doivent être de nouveau approuvés dans l'hémicycle.
Concernant le prix des carburants, M. Husson n'entend pas revenir sur le compromis trouvé par le gouvernement avec les députés LR. "On ne va pas rajouter de la confusion à un accord sorti d'un bras de fer", a-t-il déclaré à l'AFP.
Le ministre a aussi jugé "sage" de s'en tenir à la solution retenue par l'Assemblée nationale. Il estime possible d'avoir, avec les remises des distributeurs et des pétroliers, "un prix du litre d'essence ou de diesel à la rentrée autour de 1,50 euro".
Le Sénat a déjà voté vendredi soir en première lecture, après l'avoir amendé, le projet de loi d'"urgence" en soutien au pouvoir d'achat adopté à l'Assemblée.
Députés et sénateurs se réunissent en début de soirée en commission mixte paritaire pour tenter de s'accorder sur une version commune de ce premier volet de mesures, le gouvernement tablant sur une adoption définitive des deux textes au plus tard le 7 août.
(U.Gruber--BBZ)