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Le président français Emmanuel Macron a prôné vendredi un "partenariat renouvelé" fondé sur la jeunesse, la diaspora et l'innovation pour relancer "l'histoire d'amour" qui lie la France à l'Algérie, au deuxième jour de sa visite officielle dans ce pays.
Devant la communauté française à Alger, il a annoncé par surprise qu'il reviendrait après Oran dans la capitale samedi pour "signer une déclaration commune" avec son homologue Abdelmajid Tebboune. Il s'agira, selon l'Elysée, d'un "partenariat renouvelé, concret et ambitieux".
Avec l'Algérie, c'est "une histoire qui n'a jamais été simple. Mais qui est et restera, parce que nous le voulons, une histoire de respect, d'amitié et, oserais-je le dire, d'amour", a dit M. Macron, en décrivant un partenariat élaboré "dans l'enthousiasme du moment", lors de multiples entrevues jeudi avec M. Tebboune et ses ministres.
Il s'agira d'"un partenariat nouveau pour et par la jeunesse", a anticipé le président français, annonçant d'ores et déjà l'acceptation de 8.000 étudiants algériens de plus cette année en France, qui rejoindront un contingent annuel de 30.000 jeunes.
Outre le dossier mémoriel autour de la colonisation française de l'Algérie (1830-1962), cette question a empoisonné la relation bilatérale quand Paris a décidé à l'automne 2021 de diviser par deux le nombre de visas octroyés en Algérie, jugée pas assez prompte à réadmettre ses ressortissants expulsés de France.
- "Sans tabous" et sans excuses -
Il s'agira de lutter contre l'immigration clandestine mais tout en assouplissant les procédures pour "les familles de binationaux, les artistes, les sportifs, les entrepreneurs et politiques qui nourrissent la relation bilatérale".
Après avoir rencontré de jeunes entrepreneurs, M. Macron a souligné que la diaspora algérienne souvent polyglotte et les jeunes des deux rives de la Méditerranée étaient "une chance" pour les deux pays.
Paris veut aider à "la formation de la jeunesse" algérienne, avec l'implantation d'une école 42, un cursus de codage ouvert aux non-diplomés déjà installé en France.
En outre, un incubateur commun de start-ups opérant dans le domaine du numérique sera mis en place.
En matinée, après avoir visité le cimetière européen Saint-Eugène, le principal d'Alger au temps de la colonisation, M. Macron avait surtout abordé le délicat dossier mémoriel, à l'origine d'une grave brouille à l'automne avec Alger.
En scellant la réconciliation bilatérale jeudi, M. Macron avait annoncé la création d'une commission mixte d'historiens "pour regarder ensemble cette période historique" du début de la colonisation (1830) jusqu'à la fin de la guerre d'indépendance (1962), "sans tabous et avec une ouverture complète des archives".
Pas question toutefois pour la France de présenter des excuses pourtant attendues en Algérie, a réitéré M. Macron.
"J'entends souvent que, sur la question mémorielle, nous sommes sommés en permanence de choisir entre la fierté et la repentance. Moi, je veux la vérité, la reconnaissance (car) sinon on n'avancera jamais", a dit M. Macron vendredi.
Il a ajouté qu'un match amical de football "serait une bonne chose pour conjurer le passé".
- Gaz et diplomatie -
Appelé avant sa venue à "ne pas occulter" à Alger la "dégradation des droits humains dans le pays", M. Macron a assuré avoir abordé le sujet avec le président Tebboune "avec beaucoup de liberté".
M. Macron a dit avoir parlé de "cas que nous connaissons" et préconisé "la transparence, les libertés politiques et leur respect". "Je sais qu'il y est sensible (..) qu'il est attaché à cela. Ces cas se règleront en plein respect de la souveraineté algérienne", a assuré M. Macron.
A propos du gaz algérien qui suscite toutes les convoitises, M. Macron s'est défendu d'être "allé à Canossa", c'est-à-dire d'avoir quémander, auprès de l'Algérie, soulignant le faible poids du gaz dans le mix énergétique français (environ 20%).
Il a "remercié l'Algérie" d'avoir accru ses livraisons via le gazoduc Transmed à l'Italie, permettant d'"améliorer la diversification de l'Europe", auparavant trop dépendante du gaz russe.
Il a également plaidé pour "renforcer le partenariat avec l'Algérie" dans la lutte contre la menace jihadiste au Sahel, notamment pour "éviter que des mercenaires puissent fleurir dans la région, en particulier ceux de Wagner".
Ce groupe privé russe est actif au Mali dont l'armée française s'est récemment retirée.
La Russie est un allié traditionnel de l'Algérie à laquelle elle fournit l'essentiel de son armement.
Après s'être rendu à la grande mosquée d'Alger en soirée, M. Macron ira à Oran, ville de l'Ouest connue pour sa liberté d'esprit et sa créativité, où il rencontrera samedi des jeunes artistes et sportifs.
Il visitera aussi la boutique du célèbre label de musique raï Disco Maghreb, remise au goût du jour par le Français DJ Snake.
(U.Gruber--BBZ)