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Jeunes, athlétiques, en short et chaussures de randonnée pour arpenter la montagne: les bergères des Pyrénées sont loin de l'image d'antan du gardien de troupeau, en velours côtelé et béret, mais houlette et chiens sont toujours là.
"Ma mère me mettait dans le porte-bébé pour aller voir les brebis (...) Je l'ai toujours suivie", raconte à l'AFP Alisson Carrere-Sastre, 23 ans, bergère nouvelle génération.
Diplômée d'un BTS en production animale, elle n'a pas abandonné la houlette, longue canne munie d'un crochet. Soutien pour grimper en altitude, ou se ralentir dans les descentes, le "caï", comme on l'appelle dans les Hautes-Pyrénées, sert aussi à attraper les brebis.
Autre tradition conservée: le chien, compagnon de solitude, indispensable pour contenir le troupeau. "Si je n'ai pas les chiennes, je ne peux rien faire", confie-t-elle.
Depuis quatre ans, Alisson emmène ses bêtes en estive seule avec Sony et Pany, ses border collie. Ouvrière agricole dans une ferme de Loudenvielle le reste de l'année, elle veille de juin à septembre sur 700 ovins de deux éleveurs de la vallée de la Soula.
- Multitâche solitaire -
Dresseuse canine, géographe cherchant les meilleurs pâturages, elle est aussi soigneuse, taillant un ongle infecté, injectant des antibiotiques, etc.
Pour repérer ses bêtes, elle scrute la montagne aux jumelles. Dès l'aube, elles se mettent en mouvement, parcourant des kilomètres en quête d'herbe plus riche.
Flanquée de ses chiennes, Alisson les guide. Ses ordres résonnent: droite, gauche, en haut, en bas. Sony et Pany courent, dévalent les pentes, remontent à pleine vitesse. Une fois le troupeau sur le bon sentier ou "biais", place aux caresses. "C'est ce que je préfère, le travail avec elles", confie-t-elle.
Plus la saison avance, plus les bêtes montent. En août, la bergère les suit jusqu'au vallon d'Aygues Tortes, à 2.100 m. Pas d'eau courante, pas d'électricité, pas de réseau pour son téléphone: "C'est la douche qui me manque le plus!"
- Renouer avec les humains -
Les randonneurs sont friands de ses conseils. Et sa cabane leur sert de refuge. Seule une petite pièce lui est réservée. Ce n'est pas de tout repos pour Alisson, première partie, dernière rentrée. "Souvent, je n'ai pas envie de parler. Mais il arrive qu'on fasse de belles rencontres", confie-t-elle, un agneau sur les épaules.
Chaleur et pluie alternent. Quand l'orage s'en mêle, le vallon devient dangereux, les rochers glissants. Un coup de tonnerre sème la panique: une agnelle dévisse, s'écrase 20 m plus bas. Les vautours plongent sur la dépouille. Dans la bousculade, une s'est brisée une patte. Il faut plâtrer. Il est 21h15.
Alisson mène alors le troupeau à la "couchade", passer la nuit gardé par Miss, impressionnante chienne des Pyrénées ou "patou". A la lueur de sa lampe frontale, la bergère regagne sa cabane.
L'été finissant, les brebis descendent jusqu'à la transhumance de retour. Pieds endoloris, visage brûlé par le soleil, Alisson mettra quelques jours à se réadapter. "Je vais aller au supermarché voir des gens", sourit-elle.
(Y.Berger--BBZ)