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La justice a décidé mercredi la suspension provisoire des travaux tout juste démarrés sur le site de stockage souterrain de déchets dangereux de Stocamine à Wittelsheim (Haut-Rhin), rendant toujours plus incertain le confinement définitif des résidus espéré par le gouvernement.
"Les travaux sont suspendus jusqu'à ce que le tribunal, qui se prononcera dans un délai rapproché, examine la légalité au fond de l'arrêté", pris par le préfet du Haut-Rhin en janvier, a indiqué le tribunal administratif de Strasbourg, saisi dans le cadre d'une procédure en référé-suspension par la Collectivité européenne d'Alsace (CEA) et l'association Alsace Nature.
Une nouvelle audience sur le fond concernant ces travaux aura donc lieu d'ici la fin de l'année 2022.
"Il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision de permettre la poursuite des travaux, notamment le remblayage du bloc 15 et l'achèvement de certaines barrières de confinement des galeries de la mine", a argumenté le tribunal administratif dans un communiqué.
A proximité de la nappe phréatique d'Alsace, la plus importante d'Europe, cette ancienne mine de potasse, dont les galeries s'affaissent petit à petit, compte encore, à 550 mètres sous terre, quelque 42.000 tonnes de déchets industriels dangereux (amiante, arsenic...) mais non radioactifs, enfouis au tournant des années 2000.
Arguant de la détérioration de l'état de la mine, la préfecture du Haut-Rhin avait autorisé en janvier le lancement de travaux préparatoires à la fermeture, bien qu'un contentieux sur le fond soit toujours en cours quant au stockage définitif ou non des déchets.
- "Protection de la nappe phréatique" -
Ces travaux débutés le 10 mai, confiés au groupe BTP Bouygues, portent sur la construction de bouchons en béton imperméables. Puis en juin était prévu le remblayage définitif du "bloc 15", où s'était produit en 2002 un incendie qui a mis une fin abrupte à l'ajout de nouveaux déchets.
Depuis cette date, le devenir de Stocamine, censé à l'origine demeurer un stockage non définitif, est source de désaccords et d'incertitudes.
Après avoir beaucoup tergiversé, l’État, en la personne de la ministre de l'époque Barbara Pompili, avait tranché en janvier 2021 en faveur d'un enfouissement définitif des déchets restants.
Mais la justice administrative a annulé en octobre dernier l'arrêté préfectoral, à la grande satisfaction des collectivités et défenseurs de l'environnement réclamant qu'un maximum de déchets soient retirés tant que les galeries sont accessibles.
Un nouvel arrêté doit encore être pris après un avis de l'Autorité environnementale et une enquête publique.
"Cela fait deux fois qu'on remporte la bataille contre l’État, mais on est loin d'avoir remporté ce qu'on veut, à savoir le déstockage de tous les déchets pour la protection de la nappe phréatique", a réagi auprès de l'AFP Me François Zind, avocat d'Alsace Nature.
- "Il faut confiner" -
De son côté, la CEA s'est dite "satisfaite" de la décision du tribunal administratif. En attendant la décision sur le fond, "la proposition de compromis de la Collectivité européenne d'Alsace (confinement des galeries en mauvais état et du bloc 15 et retrait du plus de déchets possible, NDLR) tient toujours", a-t-elle souligné dans un communiqué, espérant "pouvoir avancer positivement dans la résolution de ce dossier" avec l'arrivée d'Amélie de Montchalin comme ministre de la Transition écologique.
Les Mines de potasse d'Alsace (MDPA), exploitant de Stocamine, n'ont pour leur part pas souhaité commenter cette décision de justice, qu'elles "mettront en œuvre".
Lors de l'audience jeudi dernier devant le tribunal administratif, Céline Schumpp, liquidatrice amiable de MDPA, avait affirmé ne pas être "dans la précipitation, mais dans la sécurité", car "la mine se ferme et si on veut mettre en sécurité la nappe phréatique, il faut confiner".
Stocamine est toujours également l'objet d'une enquête pénale concernant la nature exacte des déchets enfouis. L'incendie de 2002 avait mis deux mois à être complètement éteint. Pourtant, la règlementation interdisait normalement d'entreposer tout "produit inflammable" sur le site.
Par ailleurs, un rapport d'enquête publique de 2016 notait que le remplissage des galeries de Stocamine par l'eau de la nappe phréatique d'Alsace était "inéluctable", dans un délai de 70 à 300 ans.
(H.Schneide--BBZ)