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Des obus explosant le long des routes, des bombes larguées du ciel: dans la périphérie ouest de Kiev, les bombardements russes ont jeté samedi sur les routes des milliers d'Ukrainiens qui cherchaient à partir par tous les moyens possibles.
Là où, la veille encore, un supermarché et une station-essence se dressaient au grand carrefour entre les villes ouvrières de Bucha et Irpin, il ne restait samedi qu'une ruine et des habitants en fuite.
L'assaut initial des forces russes sur Kiev, lancé avec des frappes de missiles et un assaut aérien sur une base aérienne, avait cessé à la fin de la semaine dernière.
Les deux camps se cantonnaient depuis à une guerre de bombardements à longue portée le long de la périphérie de Kiev, plaçant dans la ligne de mire Bucha et Irpin , dont beaucoup d'habitants étaient résolus à rester - jusqu'à ce que des avions de guerre russes commencent à tourner au-dessus de leurs têtes et à larguer des bombes vendredi, racontent ceux obligés de fuir.
"Des avions de guerre. Ils bombardent les zones résidentielles -- écoles, églises, grands immeubles, tout", pointe Natalia Dydenko, une comptable de 58 ans, avec un dernier regard sur le paysage de destruction qu'elle laisse derrière elle.
Elle fait partie des milliers d'habitants fuyant le front vers le centre de Kiev avec leurs enfants et, pour tout bagage, les maigres effets personnels qu'ils sont parvenus à empaqueter et emporter avec eux.
Le bruit répété des bombes russes lâchées par des avions survolant Bucha et Irpin ponctue cet exode désespéré.
- "Courir" -
Certains riverains n'ont pas d'autre choix que d'emprunter les décombres d'un pont franchissant la rivière Irpin en direction de la capitale que la défense ukrainienne avait fait sauter la semaine dernière pour bloquer l'avancée russe.
Des retraités en fauteuil roulant et des mères de famille avec des poussettes se font aider pour traverser sur un précaire passage en planches de bois par des soldats ukrainiens, fusils d'assaut à l'épaule.
Des milliers d'autres personnes, massées dans un silence de pierre sous ce qu'il reste du pont en béton, attendent leur tour pour passer.
Sur l'autre rive, la plus proche de Kiev, un groupe de soldats creuse une rampe de lancement de missiles anti-chars. D'autres militaires préparent un approvisionnement en mortiers et en Kalashnikov pour les acheminer vers le front.
Un missile à longue portée siffle au-dessus des têtes. Un bruit sourd environ une demi-minute plus tard signale de nouvelles destructions quelque part dans la banlieue nord de Kiev.
"Nous nous y attendions. Mais hier, quand un avion est passé et a largué un truc sur nous, on a juste dû courir", décrit Galina Vasylchenko, qui se dirige avec sa fille de 30 ans vers le pont de fortune.
- Changement de tactique -
Le changement apparent de tactique de l'armée russe, passée des tirs aux bombardements aériens, est de mauvais augure pour la capitale ukrainienne.
Des avions de combat russes ont bombardé et tué des dizaines de personnes dans la ville de Tchernihiv (centre) et à Kharkiv, deuxième ville du pays.
Beaucoup d'analystes estiment que l'exceptionnel patrimoine historique de Kiev, dont quantité d'églises dépendant du patriarche orthodoxe de Moscou, devrait empêcher la Russie de bombarder la capitale et ses trois millions d'habitants. Mais les destructions s'approchent de plus en plus près.
La ville de Bucha, plus éloignée de Kiev qu'Irpin, a été le théâtre des premiers combats et certains endroits sont désormais complètement rasés.
Le même niveau de violence s'abat maintenant sur Irpin.
- "Nulle part où aller" -
Des milliers d'habitants ont aussi fui en voiture, entassant leurs affaires pour sortir d'Irpin par un itinéraire détourné menant à la gare principale de Kiev depuis le sud-ouest.
Une file de voitures s'étendant sur au moins cinq kilomètres serpentait samedi à travers des dizaines de points de contrôle en sacs de sable tenus par des volontaires ukrainiens armés, dans l'ouest de Kiev. Beaucoup avaient collé des pancartes indiquant "enfants" sur leur pare-brise.
D'autres étaient coincés. Masha Shuta, 15 ans, calcule que dans les caves de son quartier d'Irpin, une centaine de personnes ont dû rester cachées. "Ils n'ont nulle part où aller", dit-elle. "Mais c'est vraiment dangereux de rester".
(Y.Yildiz--BBZ)