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Le sort du Premier ministre Boris Johnson en dépend: la classe politique britannique retient son souffle jeudi dans l'attente d'un rapport, décisif mais sans cesse repoussé, sur les fêtes tenues à Downing Street pendant les confinements.
Au coeur d'intenses spéculations, le moment où sera publié ce rapport interne de la haute fonctionnaire Sue Gray sur plusieurs garden parties, des pots de départ, une fête de Noël ou des anniversaires dans les cercles du pouvoir en 2020 et 2021 est entouré d'une grande incertitude.
Initialement attendues mercredi, les conclusions ne sont finalement pas tombées. Elles pourraient être imminentes... ou attendre la semaine prochaine, selon la presse britannique, qui devient plus prudente sur ses pronostics au fur et à mesure que les jours passent.
La police a bousculé le calendrier en lançant sa propre enquête sur plusieurs de ces événements, passibles d'une amende.
Cette enquête interne permettra-t-elle de faire toute la lumière sur ces réjouissances dans la résidence du Premier ministre, qui ont fortement choqué les Britanniques au moment où eux-mêmes étaient strictement confinés, avec noms, photos, messages et témoignages à l'appui?
Même si Boris Johnson répète à l'envi que le rapport sera dévoilé dans son intégralité, sa remise est retardée, selon les médias, par la délicate question de déterminer ce qui peut ou pas être publié pour ne pas compromettre l'enquête de Scotland Yard.
"Ce gouvernement s'est engagé à publier les conclusions du rapport dans leur intégralité, mais je n'ai aucune idée du timing", a déclaré la ministre du Travail, Thérèse Coffey, sur Sky News.
La teneur de ce rapport qui tient le pouvoir comme la presse en haleine pourrait se révéler cruciale pour le dirigeant conservateur de 57 ans, accusé de mensonges, appelé à la démission par l'opposition et fragilisé par des sondages désastreux.
Combatif, il s'est jusqu'ici refusé à tout commentaire et a exclu de partir, réussissant à temporiser en renvoyant aux conclusions du rapport.
Mais même au sein de sa majorité conservatrice, la colère gronde. S'il a jusqu'à présent échappé à un vote de défiance, qui peut être déclenché à la demande de 54 (sur 359) députés de son camp, Boris Johnson reste en position très délicate.
Un rapport accablant pourrait permettre d'atteindre rapidement ce seuil et déclencher, potentiellement dès la semaine prochaine, une course au leadership au sein du Parti conservateur, dont le leader devient de facto le chef du gouvernement.
- Le spectre d'élections -
Entretemps, les soutiens de Boris Johnson au sein du gouvernement tentent de refroidir les ardeurs des députés rebelles. Certains ont ainsi brandi le spectre d'élections générales anticipées en cas de désignation d'un nouveau chef de parti, à un moment où le Labour, principale formation d'opposition, jouit d'une rare et confortable avance sur les tories en termes d'intentions de vote.
Renforçant l'incertitude sur son sort, il n'est pas exclu non plus que Boris Johnson, fort de son habitude de se sortir des situations les plus inextricables, survive à un tel vote de défiance.
Il ne pourrait plus être délogé pendant un an. Le puissant "comité 1922" chargé de l'organisation parlementaire du parti n'a en effet pas donné suite à la demande de certains députés de réduire ce délai à six mois.
A l'inverse, un document expurgé des événements les plus compromettants dans le radar de la police permettrait au leader conservateur de sauver la face, du moins temporairement jusqu'aux conclusions de la police.
Selon le tabloïd Daily Mail, alors que les rencontres entre Boris Johnson et des élus se multiplient en coulisses, des députés auraient aussi conditionné leur soutien à un abandon de la hausse annoncée des cotisations sociales, en pleine inflation qui rogne le pouvoir d'achat des Britanniques.
Se prévalant déjà d'avoir réalisé le Brexit ou d'avoir réussi la campagne de vaccination contre le Covid, Boris Johnson a assuré mercredi au Parlement vouloir se concentrer sur la reprise économique ou encore la crise en Ukraine.
Mais outre les fêtes, une autre affaire vient nourrir jeudi les interrogations sur sa sincérité. Il est accusé d'avoir menti, ce que Downing Street dément, en assurant ne pas être intervenu dans l'évacuation controversée en août dernier de chiens et chats de Kaboul, tombée aux mains des talibans.
(H.Schneide--BBZ)