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Les poids lourds de la nouvelle Commission européenne passent mardi leur grand oral.
L'Italien Raffaele Fitto devra affronter la polémique sur son appartenance à l'extrême droite et le Français Stéphane Séjourné convaincre qu'il est armé pour un portefeuille stratégique.
Les six vice-présidents potentiels du nouvel exécutif bruxellois vont se succéder devant les eurodéputés à Bruxelles pour des auditions d'au moins trois heures, avant d'être adoubés ou pas lors d'un vote.
Premiers à se présenter à 09H00, la nouvelle cheffe de la diplomatie européenne et ancienne Première ministre estonienne Kaja Kallas et l'Italien Raffaele Fitto, chargé de la cohésion des territoires.
La gauche et le centre ne digèrent pas que M. Fitto ait obtenu un titre de vice-président alors qu'il appartient à Fratelli d'Italia, le parti d'extrême droite de la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni.
Le commissaire a tenté de déminer les critiques en mettant en avant son précédent parti, la Démocratie chrétienne, à la "vocation européenne".
Mais "cette vice-présidence est délicate" et suscitera "beaucoup de discussions", prévient le centriste italien Sandro Gozi (Renew). "L'issue finale reste ouverte et incertaine".
Les groupes politiques se montrent toutefois prudents car faire tomber un rival les expose à des représailles lors de l'audition des candidats de leur propre camp le même jour.
Au centre, le macroniste Stéphane Séjourné fera face aux parlementaires à partir de 14H30.
Considéré comme trop discret dans ses précédentes fonctions de ministre des Affaires étrangères, le Français de 39 ans devra prouver qu'il est à la hauteur du vaste portefeuille sur la stratégie industrielle dont il a hérité.
D'autant qu'il a été choisi in extremis mi-septembre par le président français Emmanuel Macron qui avait initialement affiché son intention de reconduire Thierry Breton malgré son conflit avec la présidente de la Commission Ursula von der Leyen.
Ses attributions sont cruciales à l'heure où l'Europe est en plein bras de fer commercial avec la Chine et où l'élection de Donald Trump aux Etats-Unis fait craindre une explosion des droits de douane pour accéder au marché américain.
"Le retour de Trump confirme la nécessité d'avoir une stratégie industrielle intégrée" en Europe dans "une forme d'urgence collective", souligne-t-on dans l'entourage de Stéphane Séjourné.
Durant son audition, le macroniste devrait aussi être titillé sur l'accord de libre échange controversé entre UE et pays latino-américains du Mercosur, que la France conteste mais que la Commission semble inciter à signer.
- La droite "très puissante" -
Pour Séjourné, "ça ira, il est intelligent et connaît bien le Parlement", considère l'eurodéputé néerlandais Dirk Gotink (PPE, droite), rappelant que le centriste y dirigeait le groupe Renew de fin 2021 à début 2024.
Les auditions de la Roumaine Roxana Minzatu, chargée des affaires sociales et de la Finlandaise Henna Virkkunen (souveraineté numérique) sont aussi considérées comme sans grand risque.
L'Espagnole Teresa Ribera, elle, sera dans le viseur de la droite et de l'extrême droite. La socialiste a hérité d'un portefeuille majeur sur la transition écologique et la concurrence.
Ministre de Pedro Sanchez, elle sera sans doute interrogée sur la situation politique en Espagne après les inondations meurtrières qui ont bouleversé le pays.
Et ses adversaires comptent l'interpeller sur son opposition au nucléaire.
"Elle sera attaquée", redoute le socialiste français Christophe Clergeau. Mais, ajoute-t-il, "si le PPE (la droite) shoote Ribera, on shootera l'ensemble du collège" le 27 novembre, date d'un vote global sur la nouvelle équipe exécutive qui pourrait prendre ses fonctions début décembre.
Après les grands oraux de mardi, l'analyste Sophia Russack du Centre for European Policy Studies pense "qu'il pourrait y avoir des questions écrites supplémentaires ou des demandes de secondes auditions".
Mais, in fine, les commissaires "passeront tous, parce que c'est politiquement compliqué. Le PPE (droite) est très puissant et les sociaux-démocrates ne voudront pas exposer Teresa Ribera".
Dix-neuf premiers commissaires ont déjà reçu l'aval des députés. Seul le Hongrois Oliver Varhelyi (santé et bien-être animal) attend toujours d'être fixé sur son sort.
L'audition de ce proche du Premier ministre hongrois Viktor Orban avait donné lieu à des critiques sur son peu d'empressement à répondre aux questions sur l'accès des femmes à l'avortement ou sur les droits LGBT+.
En 2019, trois commissaires avaient été récusés, dont la Française Sylvie Goulard.
(A.Lehmann--BBZ)