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Les Namibiens votaient mercredi, parfois après de longues heures d'attente dans des files interminables, pour les élections les plus incertaines qu'ait connu le parti historique au pouvoir, dont la candidate Netumbo Nandi-Ndaitwah pourrait être contrainte à un second tour inédit.
Surnommée "NNN", la candidate de la Swapo, figure de la lutte pour la libération et qui à 72 ans pourrait devenir la première femme présidente du pays, a glissé son bulletin dès l'ouverture des bureau de vote à Windhoek, la capitale.
"En votant, vous faites en sorte que votre voix soit entendue et qu'elle ait un impact sur votre vie", a lancé l'actuelle vice-présidente. "Alors, venez voter en nombre".
Dans plusieurs bureaux de vote de Windhoek, les Namibiens ont attendu de cinq à sept heures après l'ouverture pour pouvoir voter, armés de patience, de chaises pliantes et de parapluies pour venir à bout de files progressant à un rythme de pachyderme.
Les près de 1,5 million d'électeurs inscrits ont jusqu'à 21H00 locales (19H00 GMT) pour remplir les urnes, bleues pour la présidentielle, jaunes pour les législatives, dont le dépouillement est attendu au plus tard samedi, d'après la commission électorale.
"Nous sommes on ne peut plus optimistes et confiants dans les résultats, nous en sortirons vainqueurs", a-t-il assuré après son vote dans le township de Katutura, fort du souvenir de ses 29,4% récoltés cinq ans plus tôt, sans parti sur lequel s'appuyer à l'époque.
Chômage massif, inégalités persistantes et renouvellement des générations ont érodé le soutien à la Swapo sur ce territoire désertique d'Afrique australe parmi les premiers fournisseurs mondiaux d'uranium.
"Mon père était un héros de la libération. Je n'abandonnerai pas la Swapo, c'est ma famille. Mais je veux qu'elle soit mise au défi pour améliorer les politiques publiques", témoigne Marvyn Pescha, un auto-entrepreneur de 50 ans, habitant de Katutura. "Certains dirigeants opportunistes ont terni la réputation du parti en l'utilisant à des fins d'enrichissement personnel", regrette-t-il.
Si les élections législatives se tiennent à la proportionnelle, un second tour à la présidentielle est pour la première fois une "option assez réaliste", selon Henning Melber, chercheur à l'Institut nordique de l'Afrique d'Uppsala (Suède).
Celui-ci doit se tenir dans les 60 jours suivant l'annonce des résultats définitifs, au plus tard, selon la loi électorale.
Après avoir immortalisé sa première expérience d'électrice en photographiant son pouce bleui par l'encre indélébile, Sophia Varela, 24 ans, confie qu'elle "espère du changement" et du "travail pour les jeunes", si nombreux dans ce pays où plus de 60% de la population a moins de 30 ans.
Plus tôt, dans la file des électeurs baignée des premiers rayons de soleil à Windhoek, Frieda Fillipus souhaitait voir une "femme présidente". "Le féminin représente l'avenir", clame cette femme de 31 ans travaillant dans l'industrie minière.
- Deuxième pays le plus inégalitaire -
Après trois décennies de règne de la Swapo, mouvement d'inspiration marxiste du temps de la lutte, la Namibie demeure, après l'Afrique du Sud, le deuxième pays le plus inégalitaire de la planète, selon la Banque mondiale.
"L'abondante activité minière ne se traduit pas vraiment" par "des opportunités d'emploi", observe l'analyste indépendante Marisa Lourenço. Et cela "alimente une grande part de la frustration des jeunes", dont 46% des 18-34 ans étaient sans emploi en 2018, selon les derniers chiffres.
L'Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (Swapo), qui a combattu pour l'indépendance du pays, sous le joug jusqu'en 1990 de l'Afrique du Sud de l'apartheid, peut craindre le même sort que ses partis de libération frères dans la région.
Un vent de changement souffle depuis quelques mois sur le sud du continent africain à la population très jeune. Dans la foulée du revers électoral de l'ANC en Afrique du Sud, dépossédé de sa majorité absolue, le BDP au pouvoir depuis 1966 au Botswana a été balayé.
Ces partis n'ont plus le même attrait auprès des "born frees", ces jeunes nés après la libération de leur pays. "Ce n'est pas seulement qu'ils sont jeunes et qu'ils n'ont pas connu la libération", observe auprès de l'AFP Nic Cheeseman, spécialiste de politique africaine à l'université de Birmingham. "C'est qu'ils subissent de plein fouet les effets de la crise économique."
(O.Joost--BBZ)