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Les élections présentées comme les plus disputées de l'histoire de ma Namibie tournent au désastre organisationnel: d'immenses files d'électeurs attendaient encore de voter à la fermeture des bureaux à 21H00 locales (19H00 GMT).
Est-ce l'indication d'une participation élevée qui serait un mauvais signal pour la Swapo, le parti au pouvoir depuis l'indépendance en 1990, plus défié que jamais? Sa candidate Netumbo Nandi-Ndaitwah, en position de devenir la première femme présidente de ce pays d'Afrique australe, pourrait être contrainte à un second tour inédit.
L'attente interminable des électeurs, plus de douze heures parfois, s'explique aussi par les problèmes techniques ayant émaillé la journée.
Les tablettes servant à vérifier l'identité des votants au moyen de leurs empreintes digitales ont connu des incidents dans plusieurs bureaux: mise à jour intempestive, surchauffe ou batteries à plat, ont expliqué leurs responsables à l'AFP.
Les Namibiens pouvant voter dans n'importe quel bureau du pays, plusieurs d'entre eux ont aussi été à court de bulletins, a reconnu le président de la commission électorale.
Le Parti des patriotes indépendants (IPC), principale formation de l'opposition, a accusé la commission électorale de "tenter délibérément de dissuader les électeurs de voter", par la voix de sa secrétaire générale Christine Aochamus. Celle-ci a menacé de saisir un tribunal pour "qu'il ordonne à la commission de prolonger l'heure de vote".
Rien qu'au bureau de vote de l'Université des sciences et technologies de la capitale Windhoek, des centaines de Namibiens attendaient encore de voter à 21H00 après avoir attendu, selon certains, depuis 06H00 du matin, avant même l'ouverture.
Même spectacle au bureau du Musée de l'indépendance, où un électeur patientait encore pour son tour après douze heures d'attente. Comme une centaine d'autres, armés de patience, de chaises pliantes et de parapluies pour venir à bout de d'une file progressant à un rythme de pachyderme.
- Longue nuit à venir -
Selon la loi électorale, ceux ayant rejoint la queue avant 21H00 doivent être autorisés à voter. "Nous avons l'obligation de nous assurer qu'ils pourront voter", a insisté le président de la commission électorale Petrus Shaama dans une déclaration promettant une longue nuit.
La candidate de la Swapo Netumbo Nandi-Ndaitwah ("NNN"), figure à 72 ans de la lutte pour la libération, avait appelé les 1,5 million d'électeurs inscrits à "voter en nombre" au moment de glisser son bulletin dès l'ouverture.
Le dépouillement des urnes, bleues pour la présidentielle, jaunes pour les législatives était initialement attendu au plus tard samedi, d'après la commission électorale.
"NNN" affronte la concurrence de l'ex-dentiste et avocat Panduleni Itula, 67 ans, qui a fondé en 2020 sa propre formation, le Parti des patriotes indépendants. Sans formation sur laquelle s'appuyer à l'époque, il avait réuni 29,4% des suffrages en 2019.
Chômage massif, inégalités persistantes et renouvellement des générations ont érodé le soutien à la Swapo sur ce territoire désertique d'Afrique australe parmi les premiers fournisseurs mondiaux d'uranium.
"Mon père était un héros de la libération. Je n'abandonnerai pas la Swapo, c'est ma famille. Mais je veux qu'elle soit mise au défi pour améliorer les politiques publiques", témoigne Marvyn Pescha, un auto-entrepreneur de 50 ans, habitant de Katutura, le principal township de Windhoek. "Certains dirigeants opportunistes ont terni la réputation du parti en l'utilisant à des fins d'enrichissement personnel", regrette-t-il.
Un second tour à la présidentielle est pour la première fois une "option assez réaliste", selon Henning Melber, chercheur à l'Institut nordique de l'Afrique d'Uppsala (Suède).
Après avoir immortalisé sa première expérience d'électrice en photographiant son pouce bleui par l'encre indélébile, Sophia Varela, 24 ans, confie qu'elle "espère du changement" et du "travail pour les jeunes", si nombreux dans ce pays où plus de 60% de la population a moins de 30 ans.
A l'issue de trois décennies de règne de la Swapo, mouvement d'inspiration marxiste du temps de la lutte contre l'occupation de l'Afrique du sud de l'apartheid, la Namibie demeure selon la Banque mondiale, le deuxième pays le plus inégalitaire de la planète, après justement l'Afrique du Sud.
"L'abondante activité minière ne se traduit pas vraiment" par "des opportunités d'emploi", observe l'analyste indépendante Marisa Lourenço. En 2018, année des derniers chiffres diffusés, 46% des 18-34 ans étaient sans emploi.
La Swapo, qui a combattu pour l'indépendance du pays, peut craindre le même sort que ses partis de libération frères dans la région, affaibli comme l'ANC en Afrique du Sud ou balayé comme le BDP au Botswana.
(B.Hartmann--BBZ)