AEX
4.0100
Vingt-six personnes ont été blessées, en majorité des manifestants lors des heurts lundi soir avec la police en Géorgie, ont annoncé mardi les autorités, alors qu'une sixième nuit de protestations pro-européennes, émaillées de violence, se prépare.
Les secouristes ont "transporté 26 personnes vers des infrastructures médicales", dont 23 manifestants et 3 policiers, a indiqué le ministère de la Santé dans un communiqué.
Lundi soir, des milliers de manifestants se sont à nouveau réunis à Tbilissi, la capitale, pour le cinquième jour d'une mobilisation d'ampleur contre le gouvernement.
Le parti Rêve géorgien, au pouvoir depuis 2012, a déclenché jeudi ces protestations en repoussant à 2028 des négociations d'adhésion avec l'Union européenne - un objectif inscrit dans la Constitution de cette ex-république soviétique.
L'opposition accuse le gouvernement de vouloir se rapprocher de Moscou, et d'imiter ses méthodes répressives et autoritaires.
Les Géorgiens défilent donc pour l'UE tout autant que contre la Russie voisine, la foule scandant régulièrement des slogans hostiles au Kremlin.
"On veut la liberté, et on ne veut pas se retrouver en Russie", disait lundi soir un manifestant de 21 ans, Nika Maghradzé.
Son amie Ani, 22 ans, acquiesçait. "On veut l'Europe!", précisait-elle, se disant prête à revenir "tous les jours".
"Ne soyez pas les esclaves de la Russie", pouvait-on lire sur une pancarte.
- "mouvement sans précédent" -
Des manifestations ont aussi eu lieu ailleurs dans le pays, comme à Batoumi, la deuxième ville de Géorgie, selon les médias locaux.
"Dans toute la Géorgie, les gens se soulèvent contre le régime fantoche russe", a salué lundi soir la présidente Salomé Zourabichvili, y voyant "un mouvement sans précédent".
Cette pro-occidentale est en rupture totale avec le gouvernement. Si elle ne dispose que de pouvoirs très limités, elle est populaire auprès des manifestants, dont le mouvement, largement spontané et organisé en ligne, n'a ni leader politique dominant ni réelle structure.
"Elle est notre seule chance", a estimé Mariam, une économiste de 43 ans, réfugiée lundi soir dans église pour échapper aux policiers. Elle espère que la présidente "arrivera à consolider l'opposition".
Lundi soir, les forces de l'ordre ont utilisé de puissants jets d'eau et des gaz lacrymogènes dès le milieu de soirée pour disperser la foule, qui a répliqué avec des tirs de feux d'artifices.
Tous les soirs, les policiers veulent ainsi chasser les protestataires de la place du Parlement, épicentre de la mobilisation et des tensions.
Lundi soir, tout comme les nuits précédentes, des manifestants, se sont volontairement placés sous les jets d'eau, se trémoussant sous le regard des agents protégés par des boucliers. D'autres ont entonné l'hymne géorgien, immobiles, face au barrage de policiers.
Plusieurs dizaines de manifestants, journalistes et policiers, ont déjà été blessées lors de heurts en marge de ces rassemblements, même si le chiffre exact n'a pas été établi.
- Ligne dure -
Le Premier ministre Irakli Khobadidzé doit tenir une conférence de presse ce mardi à 14 heures locales (10H GMT) tout comme il l’avait fait la veille, a annoncé son équipe.
Le gouvernement assure ne pas renoncer à l'UE malgré son annonce. Lundi, Irakli Khobadidzé avait assuré que son gouvernement ferait le "maximum d'efforts" pour rejoindre l'Union européenne qu'il accuse pourtant de chantage, Bruxelles lui réclamant un changement de cap et ayant évoqué des sanctions.
Mais il a aussi rejeté toute négociation avec l'opposition, qui réclame de nouvelles législatives.
Irakli Khobadidzé a aussi insinué que le mouvement de protestation était le fruit d'une ingérence extérieure, dénonçant un financement "depuis l'étranger".
Quoi qu'il en soit, "il n'y aura pas de révolution en Géorgie", a-t-il estimé.
L'autorité du Rêve géorgien est contestée par l'opposition, qui l'accuse d'avoir "volé" les élections législatives du 26 octobre.
Le Rêve géorgien assure lui devoir éviter au pays le destin de l'Ukraine, envahie par les troupes russes depuis bientôt trois ans. Ses responsables accusent l'Occident de vouloir entraîner la Géorgie dans une guerre avec Moscou, reprenant là le discours du Kremlin.
Or 20% du territoire géorgien est de facto sous contrôle russe, notamment du fait de l'invasion russe de 2008.
(S.G.Stein--BBZ)