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Les chancelleries étrangères, au départ prudentes, multiplient les démarches pour établir un contact avec le nouveau pouvoir islamiste en Syrie, une semaine après la chute de Bachar al-Assad.
A Damas, l'émissaire de l'ONU pour la Syrie, Geir Pedersen, a appelé dimanche à une aide humanitaire accrue et à éviter les actes de "vengeance".
"Nous devons veiller à ce que la Syrie reçoive une aide humanitaire immédiate accrue pour la population et pour tous les réfugiés qui souhaitent rentrer", a déclaré M. Pedersen, dont la visite est la première d'un haut responsable de l'ONU depuis la fuite de M. Assad en Russie.
Plusieurs pays et organisations avaient salué la chute d'Assad, disant cependant attendre de voir comment les nouvelles autorités, musulmanes sunnites, vont traiter les minorités du pays multiethnique et multiconfessionnel.
Après Washington samedi, le Royaume-Uni a annoncé dimanche avoir établi des "contacts diplomatiques" avec le groupe radical islamiste Hayat Tahrir al-Sham (HTS), à la tête de la coalition de groupes rebelles qui a chassé M. Assad du pouvoir.
HTS "reste une organisation terroriste interdite (au Royaume-Uni), mais nous pouvons avoir des contacts diplomatiques", a déclaré le ministre britannique des Affaires étrangères David Lammy à des médias britanniques.
La France a elle annoncé l'envoi d'une mission diplomatique mardi à Damas, la première depuis 12 ans, pour "établir de premiers contacts" avec les nouvelles autorités.
Doha a annoncé l'arrivée d'une délégation dimanche en Syrie où elle a rencontré des responsables du gouvernement de transition, tout en préparant la réouverture de son ambassade.
La Turquie, acteur majeur dans le conflit en Syrie et soutien des nouvelles autorités, avait déjà rouvert samedi son ambassade à Damas après plus de 12 ans de fermeture.
Le 8 décembre, la coalition rebelle est entrée à Damas et annoncé le renversement du pouvoir, après une offensive fulgurante qui lui a permis de s'emparer d'une grande partie du pays en 11 jours. Lâché par ses alliés iranien et russe, M. Assad a fui à Moscou.
HTS, ex-branche syrienne d'Al-Qaïda, affirme avoir rompu avec le jihadisme mais reste classé "terroriste" par plusieurs capitales occidentales, dont Washington.
- Messe célébrée à Damas -
Après 50 ans de règne sans partage du clan Assad et d'une répression implacable, les nouvelles autorités s'emploient à rassurer la communauté internationale.
Le nouveau Premier ministre chargé de la transition, Mohammad al-Bachir, a promis de "garantir les droits de tous".
Après l'euphorie, les Syriens tentent de reprendre leur vie normale.
Dimanche, une partie des élèves ont repris le chemin de l'école dans la capitale, où les universités ont également rouvert leurs portes.
"On se sent libérés! On peut enfin dire ce qu'on pense sans avoir peur", lance Yasmine Chehab, une étudiante en littérature anglaise à l'Université de Damas.
- "Je cherche mon fils" -
Mais chaque jour qui passe depuis la chute de M. Assad donne aussi lieu à des découvertes macabres, témoignage des pires exactions du pouvoir déchu.
A la morgue de l'hôpital al-Moujtahed de Damas, des habitants ont afflué après que des combattants de HTS ont ramené 35 corps, dont 21 ont déjà été identifiés par leurs familles, selon Assad Sakr, qui tient un grand registre.
"Que Dieu vienne en aide à toutes ces personnes", dit-il à l'AFP.
Photos de jeunes hommes disparus à la main, des familles se pressent autour des 14 corps restants.
"Je cherche mon fils", dit Fatima Marakbawi, la quarantaine. "Ils l'ont pris il y a 11 ou 12 ans. Il y a 9 ans, il était à Saydnaya, maintenant il n'y est plus et mon coeur est brisé."
- Engagements du nouveau pouvoir -
Voisine de la Syrie, la Turquie s'est dite "prête" à fournir de l'aide militaire si le nouveau gouvernement syrien le lui demande, selon son ministre de la Défense, Yasar Güler.
Il en outre affirmé que les nouvelles autorités s'étaient engagées à "respecter tous les institutions gouvernementales, l'ONU et les autres organisations internationales", et promis de signaler toute trace d'arme chimique à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques.
Autre voisin de la Syrie, Israël, a annoncé dimanche un projet visant à doubler la population dans la partie du Golan syrien occupée et annexée.
"A la lumière de la guerre et du nouveau front en Syrie et de la volonté de doubler la population du Golan (...), il s'agit d'une décision qui renforce les localités du Golan et l'Etat d'Israël", a indiqué le bureau du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Israël a conquis une partie du Golan, dans le sud-ouest de la Syrie, lors de la guerre israélo-arabe de 1967, avant d'annexer ce territoire en 1981. Seuls les Etats-Unis, sous l'administration de Donald Trump, ont reconnu cette annexion en 2019.
Meurtri par près de 14 ans de guerre dévastatrice déclenchée par la répression de manifestations prodémocratie, la Syrie est minée par une économie en lambeaux et des sanctions internationales.
Sans oublier les ingérences étrangères et un bilan humain très lourd: un demi-million de morts et six millions de Syriens en fuite.
(G.Gruner--BBZ)