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Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez a accusé mercredi le propriétaire de X Elon Musk d'"attaquer ouvertement (les) institutions" et d'"attiser la haine" et mis en garde contre la résurgence du fascisme à l'occasion du 50e anniversaire de la mort du dictateur Franco.
"L'internationale réactionnaire, comme l'a dit le président (français) Macron il y a quelques jours, (...) menée par l'homme le plus riche de la planète, attaque ouvertement nos institutions, incite à la haine et appelle ouvertement à soutenir les héritiers du nazisme en Allemagne lors des prochaines élections", a dénoncé le dirigeant socialiste, sans citer nommément le milliardaire.
Depuis des semaines, Elon Musk multiplie les provocations sur X, s'invitant en particulier dans les débats politiques au Royaume-Uni et en Allemagne, en soutien aux droites radicales, obligeant plusieurs hauts responsables européens à fustiger ses interventions.
Mercredi, le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot a exhorté la Commission européenne à agir avec "la plus grande fermeté" contre les ingérences, notamment celles d'Elon Musk, dans le débat public européen.
Pour Pedro Sánchez, il s'agit d'"un défi qui devrait interpeller tous ceux (...) qui croient en la démocratie".
"Les régimes autocratiques progressent dans la moitié du monde" et "le fascisme que nous pensions avoir laissé derrière nous est déjà la troisième force politique en Europe", a martelé le chef du gouvernement dans son intervention au Musée Reina Sofía de Madrid, qui abrite le célèbre tableau de Pablo Picasso "Guernica", un des symboles de la lutte antifranquiste.
M. Sánchez a aussi appelé à combattre "les fake news". C'est "la principale arme des ennemis de la démocratie", a-t-il insisté au cours de son intervention marquant les débuts des commémorations de la mort du dictateur Franco et de l'avènement de la démocratie en Espagne.
- "Immense tristesse"-
Le Parti populaire (PP), la principale formation de l'opposition de droite, avait décidé de boycotter cette cérémonie organisée par l'exécutif, illustrant le fait que les plaies sont encore loin d'être refermées en Espagne un demi-siècle après la fin du franquisme.
Considérant que cet événement relevait de l'opportunisme politique et avait pour seul but de détourner l'attention de l'opinion des déboires de M. Sánchez, dont plusieurs proches notamment sont visés par des enquêtes judiciaires, le chef du PP Alberto Núñez Feijóo a préféré se rendre dans la région de Valence, touchée par les inondations meurtrières du 29 octobre.
"Sánchez, avec Franco. Feijóo, avec les Valenciens", a commenté le PP dans un communiqué.
Le roi Felipe VI n'était pas présent lui non plus, ayant invoqué des raisons d'agenda, selon le gouvernement.
Le dictateur Franco a gouverné l'Espagne de la fin de la guerre civile, en 1939, jusqu'à sa mort, à l'âge de 82 ans, le 20 novembre 1975. Deux ans plus tard, l'Espagne célébrait des élections démocratiques et, en 1978, la Constitution actuelle était adoptée par référendum.
"Il n'est pas nécessaire d'être d'une certaine idéologie, ni de gauche, ni du centre, ni de droite, pour regarder avec tristesse, avec une immense tristesse et aussi avec terreur, les années sombres du franquisme et craindre que cette régression ne se répète", a déclaré M. Sánchez en réponse aux critiques du PP, héritier d'un parti (Alliance populaire) fondé en 1976 par un ancien ministre de Franco.
L'initiative de commémorer la mort du dictateur a été annoncée en décembre par le Premier ministre et avait pour "objectif unique" de "mettre en valeur la grande transformation réalisée pendant ce demi-siècle de démocratie", a-t-il expliqué.
La mort de Franco n'avait été jusqu'alors commémorée que par ses partisans pendant des messes à son imposant mausolée à une cinquantaine de kilomètres de Madrid, dont sa dépouille a finalement été déplacée en 2019 à l'initiative de Pedro Sánchez.
Ce dernier a également fait voter en 2022 une "loi de mémoire démocratique" qui prévoit en particulier la création d'un registre des victimes du franquisme et le retrait des symboles de la dictature.
Mais la loi n'a pas permis de juger les tortionnaires encore en vie, qui bénéficient de la loi d'amnistie votée au cours de la transition vers la démocratie.
(K.Lüdke--BBZ)