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Homosexuels ou bisexuels, ils ont parfois cessé d'avoir des relations par peur de la variole du singe et sont "agacés" par les réactions publiques et privées face à l'épidémie montante: au premier jour d'un service de vaccination spécifique à Paris, les patients oscillent entre prudence et colère.
"Cela fait trois semaines que j'essaye d'obtenir un rendez-vous. J'ai appelé 120 fois sans succès", affirme Arnaud, qui n'a pas voulu donner son nom à l'AFP. Et finit par obtenir un créneau sur place.
"On a un ministre beau parleur, mais tout ne va pas si bien dans la réalité", fustige cet homme de 60 ans, "content" de se faire vacciner avant de partir en vacances.
Lundi, le ministre de la Santé François Braun avait annoncé le déstockage de plus de 42.000 doses de vaccin et affirmé avoir "largement le nombre de doses suffisantes pour la population qui est principalement à risque".
Soit "les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes rapportant des partenaires sexuels multiples, les personnes trans rapportant des partenaires sexuels multiples, les travailleurs du sexe" et "les professionnels exerçant dans les lieux de consommation sexuelle", depuis l'élargissement de la vaccination le 11 juillet. Plus de 6.000 personnes ont déjà reçu cette vaccination préventive, a indiqué le ministre.
Dans le centre de santé municipal Edison, situé près de la place d'Italie (XIIIe arrondissement), seuls des homosexuels ou bisexuels, parfois doublement éligibles en tant que soignants, sont venus se faire administrer une dose initiale mardi après-midi, un mois avant la dose de rappel.
M. Hingray espère des renforts rapides d'effectif et de doses pour arriver à un rythme de croisière de 1.000 vaccinations hebdomadaires à Edison.
- "Des relents de jugement" -
"Bravo! On a tenu trois mois avant l'ouverture d'un centre", lance, sarcastique, Jean-Yves Douineau, "un peu agacé" car "fatigué d'appeler partout depuis une semaine".
Cet habitant du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne) pense être tout juste guéri de la variole, après avoir été victime d'éruptions cutanées et ne décolère pas contre le manque de réactivité des autorités sanitaires.
"La pandémie est en train d'exploser et cela ne m'étonne pas", dit cet homme de 51 ans en établissant un lien avec l'épidémie du VIH au début des années 1990.
Y compris dans le regard des proches. "Ce n'est pas méchant, j'ai une famille hyper open, mais je sens des relents de jugement, avec les mêmes choses que j'entendais en 1990: +oui, mais si vous vous protégiez...+".
Se protéger, Karim vient pour cela. Ce bisexuel de 44 ans qui fréquente habituellement "les lieux de drague ou les bars gay" dit n'avoir "plus de rapport sexuel depuis un moment à cause de la variole".
Depuis une contamination au Covid-19 fin 2021, Karim n'a pas complètement récupéré le goût. Alors, il se vaccine par "peur des conséquences inesthétiques, des douleurs", mais aussi par celle de transmettre cet autre virus à ses parents ou ses partenaires, "y compris féminins".
Envers ces dernières joue aussi la "peur de la stigmatisation: nous, les bis, avons été accusés de transmettre le VIH aux femmes. Je préfère prendre les devants et éviter les risques."
- Moins de trente ans, insouciants? -
Arnaud, lui, pointe du doigt une différence générationnelle avec les "moins de 30 ans qui se soucient peu de ce genre de choses".
Il est vrai que, dans la salle d'attente, les patients ont en majorité plus de 40 ans.
Parmi les plus jeunes, Alexis, 19 ans, n'a pas changé sa vie sexuelle depuis l'identification fin mai des premiers cas en France. Mais "je m'en inquiète depuis que j'ai vu sur internet à quoi cela ressemblait", dit cet étudiant en école de commerce.
Dix ou quinze minutes d'attente, autant pour s'assurer que le patient se porte bien après l'injection: l'infirmière, Laura Cohen, se félicite d'une "organisation fluide".
Les gens sont "plus renseignés, moins stressés et plus reconnaissants que pour le Covid, l'ambiance est plus apaisée et apaisante", estime cette vacataire.
(B.Hartmann--BBZ)