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A l'origine d'un record d'hospitalisations "depuis plus de dix ans", qui alimentent la crise en pédiatrie, l'épidémie de bronchiolite frappe tôt et fort cette année en France, comme dans d'autres pays, poussant le gouvernement à déclencher un plan d'urgence national prévu pour les situations sanitaires exceptionnelles.
Constatant une "poursuite de l’augmentation" des indicateurs épidémiques "malgré un infléchissement" lié aux vacances de Toussaint, Santé publique France a souligné mercredi des "nombres de passages aux urgences et d'hospitalisations pour bronchiolite très élevés et à des niveaux supérieurs à ceux observés aux pics épidémiques depuis plus de 10 ans".
Toute la métropole est touchée, la partie nord plus fortement.
Face à ce scénario noir, le ministre de la Santé François Braun a annoncé au Sénat le déclenchement d'un "plan ORSAN (organisation de la réponse du système de santé en situations sanitaires exceptionnelles) spécifique à cette épidémie, pour renforcer encore les moyens des ARS (agences régionales de santé) et permettre que l'ensemble de l'hôpital puisse se concentrer sur ce problème particulièrement aigu aujourd'hui".
"Cela ne signifie pas que le plan blanc est déclenché dans l'ensemble des hôpitaux de France", mais seulement dans un "nombre limité" à ce stade, a précisé l'entourage du ministre.
Le "plan blanc" contient des mesures d'organisation destinées à faire face à une situation sanitaire exceptionnelle ou une activité accrue d'un hôpital.
Courante et très contagieuse, la bronchiolite, causée le plus souvent par le virus respiratoire syncytial (VRS), provoque chez les bébés une toux et une respiration difficile, rapide et sifflante.
Si elle peut angoisser les parents, elle est la plupart du temps bénigne. Mais, dans certains cas, elle peut nécessiter un passage aux urgences, voire une hospitalisation.
Près de 6.900 enfants de moins de deux ans sont passés aux urgences pour bronchiolite en métropole du 31 octobre au 6 novembre, une hausse hebdomadaire de 7% - bien moindre toutefois que l'augmentation précédente (+47%). Quelque 2.337 enfants ont finalement été hospitalisés.
- "Effet rebond" -
"Avant la pandémie de Covid-19, les épidémies de bronchiolite étaient connues pour leur grande régularité, avec un pic systématiquement atteint autour de la 50ème semaine de l'année. La pandémie est venue bouleverser ce relatif équilibre", expose à l'AFP Pascal Crépey, épidémiologiste à l'Ecole des hautes études en santé publique à Rennes.
Après une circulation plus faible du principal virus causant les bronchiolites en 2020, l'épidémie 2021 a démarré début octobre en France, dans un contexte de fin de confinements.
"L'épidémie 2022 semble se profiler comme celle de l'an dernier pour son démarrage, mais il est encore difficile" de déterminer si le pic approche, selon Pascal Crépey.
Côté Santé publique France, l'épidémiologiste Sophie Vaux "s'attend à ce que ça continue de monter" et n'exclut pas que "le rythme hebdomadaire remonte une fois estompé l'effet des vacances".
Comment expliquer cette envolée singulière?
L'une des hypothèses est une circulation simultanée de virus qui, d'ordinaire, se succèdent plutôt, selon Sophie Vaux. "Le principal responsable de la bronchiolite et de ses effets les plus graves, le VRS, circule plus précocement. D'autres virus pouvant provoquer la bronchiolite, comme les rhinovirus ou metapneumovirus, circulent aussi actuellement", précise-t-elle à l'AFP.
Autre hypothèse: un "effet rebond" lié à une forme de "dette immunitaire" post-Covid, ajoute-t-elle. Cette "dette" pourrait concerner "des enfants (plus grands que les nourrissons) et des adultes, dont des femmes enceintes qui auraient transmis moins d'anticorps à même de protéger leurs nourrissons".
- Aux Etats-Unis aussi -
En France, comme dans d'autres pays, cette épidémie précoce est une mauvaise nouvelle pour des systèmes hospitaliers fragilisés par le Covid.
Cette épidémie, "encore en vague ascensionnelle", a "surpris initialement le système de santé, qui est obligé de se réorganiser", a déclaré dimanche le porte-parole du gouvernement Olivier Véran.
Depuis mi-septembre, 38 enfants en réanimation pédiatrique ont été transférés d'Ile-de-France vers d'autres régions.
D'autant que la bronchiolite n'a fait qu'aggraver la crise des urgences pédiatriques, liée à des conditions de travail insatisfaisantes et à un manque de personnel.
La France n'est pas seule en difficulté. Aux Etats-Unis, une "triplédémie" de bronchiolite, grippe et Covid sévit lors d'une saison précoce qui éprouve les hôpitaux.
Un espoir semble se profiler côté traitements/vaccins, après des décennies de recherche.
L'Union européenne a approuvé un traitement préventif en mesure d'empêcher les formes graves de bronchiolite chez l'ensemble des bébés, ont annoncé vendredi les groupes AstraZeneca et Sanofi, qui le développent. Ces anticorps de synthèse ne seront pas disponibles avant la saison 2023.
Pfizer a, lui, communiqué des résultats positifs pour un vaccin anti-VRS, ouvrant la voie à une future approbation.
(K.Müller--BBZ)