AEX
3.2500
On dirait le Sud. L'équipe de France de volley, entraînée par un Italien qui s'adresse dans sa langue à un groupe dont l'écrasante majorité a joué ou évolue en Italie, a par certains aspects de faux airs de "Nazionale", son adversaire mercredi (17h30) en quarts de finale du Mondial à Ljubljana.
Andrea Giani l'a promis. Il parlera très prochainement la langue de Molière, qu'il comprend de mieux en mieux, et prendra des cours de français "tous les jours" en rentrant à Modène sitôt la compétition terminée.
Mais, en attendant, l'ancienne légende du volley italien, détenteur du record du nombres de capes avec la sélection (474 entre 1988 et 2005), triple champion du monde (1990 à 1998), communique dans sa langue natale avec les joueurs français.
Question de facilité et de rapidité, lui qui a été nommé après la démission surprise fin mars du Brésilien Bernardinho pour raisons personnelles.
"La majorité d'entre nous a joué, joue ou va jouer en Italie. Les sept titulaires, en plus, comprennent tous l'italien donc il peut donner des infos plus rapidement" durant le, explique le capitaine Benjamin Toniutti.
Des 14 joueurs retenus pour le Mondial, seuls les remplaçants Antoine Diez, Quentin Jouffroy et Médéric Henry n'ont en effet jamais évolué en "SuperLega". Qui accueillait la saison écoulée Earvin Ngapeth (Modène), Barthélémy Chinenyeze (Milan, Civitanova en 2022-2023), Jean Patry (Milan) et Antoine Brizard (Piacenza).
Dans ses bagages, Giani, 52 ans et qui a eu sous ses ordres plusieurs Bleus à Milan et Modène, a emmené l'adjoint Roberto Ciamarra et apporté plusieurs marques de fabrique du volley italien: une dose de rigueur, un usage plus poussé des statistiques et une attention particulière portée au service, secteur dans lequel Giani veut voir les Bleus prendre davantage de risques.
"On s'entraîne beaucoup, beaucoup plus", raconte Ngapeth.
Notamment sur leur mise en jeu. "Etre agressif au service, c'est une marque du championnat italien. On a essayé de faire comprendre aux joueurs que c'est un secteur important qu'il faut travailler", explique Roberto Ciamarra.
- "Pays de la statistique" -
Les statistiques, elles, sont davantage utilisées qu'avec Laurent Tillie, le sélectionneur du titre olympique l'été dernier, "qui disait qu'il n'y comprenait pas forcément tout", note Antoine Brizard.
Même si Giani va "beaucoup moins loin" dans leur utilisation que certains de ses compatriotes, poursuit Brizard.
"C'est vrai que l'Italie a cette image du pays de la statistique (en volley). Déjà, le logiciel utilisé est italien, et les premiers +scouts statisticiens+ étaient italiens" confirme Paolo Perronne, le statisticien... italien depuis plusieurs années des Bleus.
Ces derniers ont progressé, et mécaniquement avec l'équipe de France, en se confrontant au plus haut niveau au quotidien, en Italie et en Pologne, les deux références.
"C’est à partir du moment où 80% des joueurs sont partis dans les gros championnats à l’étranger que nos résultats ont commencé à décoller. On a fait un bond énorme", confirme Ngapeth.
"En Italie, ça va plus fort, plus haut, plus vite. Il y a des équipes aussi fortes qu'une équipe nationale. On ne peut lâcher aucun match chaque week-end. Et on travaille beaucoup tactiquement", complète Chinenyeze.
- "Les dents dehors" -
Le rendez-vous de mercredi face aux Italiens champions d'Europe en titre a donc forcément une saveur particulière.
"On a pu voir quand on les a joués chez eux en juillet en Ligue des nations (victoire en demi-finales à Bologne 3-0): on avait les dents dehors!", note Ngapeth.
"Ils vont avoir envie d'une belle revanche", pronostique Chinenyeze, qui anticipe les chambrages à venir en rentrant en Italie.
Et Giani, que pense-t-il de ces nouvelles retrouvailles avec son pays natal, déjà affronté comme sélectionneur de la Slovénie et de l'Allemagne?
"Peu importe l'adversaire, il faut gagner. Une fois le match commencé, on n'y pense plus", a-t-il d'abord répondu mardi.
Relancé sur ce qu'il ressentait en entendant l'hymne italien dans le camp d'en face, il s'est montré plus loquace: "C'est compliqué à expliquer, c'est un truc qu'on ressent de l'intérieur. Ca fait quelque chose."
(K.Lüdke--BBZ)